Dansaekhwa, au-delà de la peinture

Une exposition qui retrace l’histoire du monochrome coréen.

Au cours des années 1970, une nouvelle forme d’abstraction picturale naît en Corée du Sud: Le Dansaekhwa. Mouvement majeur d’avant-garde dont sont issu Lee Ufan, Yun Hyong Keun, Chung Sang Hwa, Choi Myoung Young. Il est célébré depuis quelques années dans les plus grandes institutions et galeries internationale.

« Depuis le début du XXe siècle, la Corée du Sud avait subi des secousses successives : d’abord la colonisation japonaise ; ensuite la Guerre de Corée, qui a suivi de près la Libération ; ensuite les dures années de la dictature militaire. Reconstruire une nation détruite par la guerre, voilà la priorité absolue des années 1960-70. Ces années-là, la Corée du Sud a connu une croissance et des progrès remarquables. Mais cette restauration matérielle, réalisée d’urgence, avait un prix. Un climat socio-économique tendu ne permit pas de regarder en arrière.

Les traditions, ainsi que le patrimoine culturel, se retrouvèrent oubliés, voire rejetés, dans la poursuite de la prospérité. Le peuple dans son ensemble a dû composer avec un vide intérieur, détaché du passé ; ce fut pareil pour la communauté artistique. De l’autre coté du globe, l’art occidental essayait de nouvelles idées, de nouvelles méthodes – d’abord en introduisant l’expressionnisme abstrait aux États-Unis et son antithèse européen, l’art informel, au cours des années 1940-50; puis le minimalisme, dans les années 1960-70.

Certains artistes coréens se sont aperçus qu’il était temps de rétablir leur identité en tant qu’artistes contemporains, en contestant les idées reçues et en créant de nouvelles méthodes.

Selon Lee Il, poète et historien, ‘ce dont nous sommes chargés aujourd’hui, c’est de dépasser le sentiment dominant de perte, de rupture avec le passé… la seule solution, c’est de trouver une nouvelle façon d’aborder l’art contemporain.’ Sans palabres théoriques, Lee analysa avec justesse comment s’accommoder de l’héritage culturel tout en gardant la contemporanéité et en triomphant de la spécificité locale. Tel fut le contexte de l’émergence du mouvement Dansaekhwa.

Le Dansaekhwa – initié par une poignée d’artistes, dont Park Seo Bo – réinventa le langage artistique coréen de façon radicale. Au lieu de représenter des objets, les artistes Dansaekhwa employaient une méthode décrite comme ‘performance méditative’ ou ‘manœuvre répétitive.’ La trace de leur acte physique, les coups de brosse récurrents, tout comme le grattage ou le trait répété, s’accumulaient sur la surface de la toile. Résultat : un corps de travail qui semblait dissoudre l’ordre établi. Le style collectif des artistes concernés attira l’intérêt international grâce à l’exposition Cinq Artistes Coréens – Cinq Sortes de Blanc à la Tokyo Gallery en 1975. Depuis lors, le Dansaekhwa est reconnu comme le premier mouvement artistique coréen à se procurer une réputation mondiale, tout en laissant une influence profonde sur le paysage artistique en Corée du Sud.

Le Dansaekhwa représente le savoir-faire d’un groupe d’artistes coréens des années 1970, vivant à une époque où le récit artistique se focalisait sur l’Occident. Rompant avec les pratiques conventionnelles, ils ont cherché leurs propres moyens d’expression artistique, tout en y entrelaçant avec doigté leur identité culturelle. D’aucuns considèrent leur travail comme une consommation d’actions répétitives qui conduisent à un lien indissociable entre l’artiste et son oeuvre. D’autres y perçoivent une trace de fermentation, à travers laquelle la durée du temps est condensée. En fin de compte, le Dansaekhwa incarne la véritable quête de l’essence : une essence que l’on atteint en supprimant tout excès. Malgré la variété de méthodes et de techniques employées par ses différents artistes, le Dansaekhwa partage une base commune de simplicité absolue.

Dong Jo Chang – Directeur, The Columns Gallery

Exposition du mardi 21 juin au samedi 9 juillet 2016
de 11h à 18h (du lundi au samedi)
Ouverture exceptionnelle le samedi 9 juillet 2016

PIASA
118 rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 Paris – France