Margaw, chapitre 7

Nouvelle de Nicolas Jolivalt

Chapitre 7.

Le ciel est limpide. Clair. Je me souviens de son tourment habituel. Nuageux. Triste. Pluvieux. Fier.

Moments de répit dans ma vie. Je rencontre des gens. J’en tombe amoureux. Valse des sentiments. Parfois honteux. Des relations en même temps. Etats mystérieux.

La ville, balayée par la douceur printanière, se remplit de couleurs et de pollen. La brise caresse les passants, les mêmes qui patinent en hiver.

Dans le métro, les passagers, secoués dans leur train-train quotidien, vont cahin-caha rejoindre bureaux et autres tracas.

Circulation dense. Je me laisse bercer par son grondement. Les klaxons ponctuent son déplacement. Mon imagination flanche.

Aux feux tricolores, je traverse au vert.

Je me réveille.
Chambre d’hôpital. Fleurs fanées. Seringue à la main. J’ai mal. Au plafond, des épées. Fantômes malins.

Je deviens violent. Des coups pleuvent sous mes sentiments. Je retourne l’appartement. Des anges absents. Mes démons alcoolisés m’entourent. Ils me semblent réconfortants. Feu rouge.

Je perçois une guitare. Une voix masculine chante :
On the road, je file… et tout est bien tranquille…Toi tu rôdes, moi je dors… Tu m’épies et m’explores…
Je songe au sang des anges… et le ciel devient orange…
On the road, je drive… On the road, j’exhale…je file… et tout est bien tranquille… Toi tu rôdes, moi je meurs… Tu m’épies, vois ces fleurs…

Des sanglots longs. Prisonnier de mon corps. L’âme amère. Je me rendors.

J’entends des cris dans le couloir. Des murmures aussi. De ma fenêtre, je vois des gens souffrants. Des fous. L’hôpital, défouloir de l’esprit. Drogué de médicaments, je me sens insouciant.

Je sors de ma chambre. Affronter les patients. J’enroule un chapelet autour de mon poignet. Tenter de renaître de mes cendres. On vient me voir. On me parle. Propos incohérents. Leurs traumatismes ? Leur rempart au temps.

Ma chambre, havre de paix. Je suis immobile. Détresse, faiblesse. Idées chaotiques. La folie et la violence de mes voisins me rendent stoïque. Je les délaisse.

Des cachets sont mes seuls repas. Je les compte un par un. Roses, bleus, habits d’apparat. Mes infirmiers sont des radins.

Les médicaments me délassent. Je compte les dalles au plafond. Caché sous mes draps, je m’endors d’un sommeil profond.

Des bas-fonds de mes viscères, une balle de revolver.

Somnifère.

Le clair de lune est en colère. Sa pâleur fait place à sa rousseur.  Sur mon lit, je m’isole de l’enfer. J’attends les heures.

Des semaines passent. Je me rétablis, sous le regard bienveillant des astres. Je rentre dans la Réalité crasse.

Le manque d’argent se fait sentir. Je suis un funambule dans ma bulle de temps. Sur mon fil, j’avance lentement. Mon corps vacille à chaque mouvement.

(à suivre…)