Mexique 1900 – 1950 Diego Rivera, Frida Kahlo, José Clemente Orozco et les avant-gardes

Mexique 1900 – 1950 Diego Rivera, Frida Kahlo, José Clemente Orozco et les avant-gardes

« Au-dessus du Volcan …
planent les trois grands, les trois géants de la peinture mexicaine du premier vingtième siècle,  Diego Rivera, Frida Calho, Jose Clemente Orozco, eux dont l’irrépressible éruption dans le monde de l’art a bien failli ensevelir et faire oublier d’autres très grands noms d’une peinture qui allait amener l’Europe à regarder autre chose que son nombril, à découvrir qu’un autre pôle de création émergeait dans le cône sud de l’Amérique.
Vasconcelos, Zàrraga, Siqueiros, Cueto, Montenegro, Nahui Olin, Tamayo, d’autres encore. Ils sont tous là, au Grand Palais, à Paris.
Muralistes, tout comme l’avaient fait les maîtres verriers et les sculpteurs du moyen-âge aux frontons des cathédrales, ils ouvrent pour ceux qui ne savent pas lire le grand livre d’une geste non plus chrétienne mais marxiste et même stalinienne ; une histoire en train de s’accomplir.
Pour cette tâche immense ils convoquent le vieux fonds précolombien et le métissent d’inventions européennes ; au cubisme, au fauvisme, à l’expressionisme, au machinisme.
Volcan toujours pas éteint, la peinture du Mexique de cette époque, pour être une peinture qui raconte, n’en est pas moins incandescente tant par la couleur que par son contenu émotionnel, social, politique et, bien sûr…  révolutionnaire. Certaines œuvres choisissent de montrer la misère subie,   acceptée, d’autres la révolte.  Passe l’ombre de Zapata.

Au-dessous du volcan.

Ils ne s’y sont pas trompé. Ils ont compris avant les autres qu’en ce début de vingtième siècle, l’Europe n’était pas seule au bord du volcan, que d’autres révolutions pas seulement artistiques, se levaient ailleurs, que d’autres énergies donnaient le branle loin de Paris, de Berlin ou de Moscou.

Ils sont donc là, eux aussi, silencieux, invisibles mais présents.

Derrière Rivera, Calho et Orozco se dressent les silhouettes de Malcolm Lowry, de Bunuel, de Dali, d’Artaud, de Breton, de Steinbeck de Traven et celle, piolet levé, de Ramon Mercader, l’assassin de Léon Trotsky.

Exposition à tiroirs ? Elles le sont toutes mais celle-là plus que d’autres sans aucun doute. »

                                                                                   Pierre Vauconsant

L’art du Mexique au XXe siècle présente le paradoxe d’être étroitement connecté aux avant-gardes internationales, tout en présentant une incroyable singularité, une étrangeté même, et une puissance qui défient notre regard européen.

Dans la première partie de l’exposition, on découvre comment cette modernité puise son inspiration dans l’imaginaire collectif et les traditions du XIXe siècle. Cette relation, évidente dans l’art académique qui se développe après la restauration de la République en 1867, se prolongera dans les préceptes idéologiques de l’École Mexicaine de Peinture et de Sculpture, dirigée par José Vasconcelos à partir de 1921. Les courants internationaux viennent contrebalancer cet ancrage dans la tradition.

Au tournant du XXe siècle, symbolisme et décadentisme trouvent au Mexique des expressions fascinantes comme le célèbre tableau d’Ángel Zárraga, La Femme et le pantin (1909). Peu à peu s’affirment les expérimentations esthétiques d’artistes mexicains en contact avec l’avant-garde parisienne dans les premières décennies du siècle, au premier rang desquels Diego Rivera.

La deuxième partie de l’exposition s’attache à montrer comment la Révolution mexicaine, en tant que conflit armé, comportait la planification d’un nouveau projet national. La création artistique des années qui ont suivi la révolution revêt un caractère idéologique ; elle s’appuie sur d’autres moyens que la peinture sur chevalet, tels que le muralisme et le graphisme.

L’exposition met naturellement l’accent sur les œuvres des trois artistes phares du muralisme mexicain, los tres grandes : Diego Rivera, David Alfaro Siqueiros, José Clemente Orozco. Cette révolution masculine, qui a ouvert la voie à de nombreuses possibilités nouvelles, a permis aux femmes de participer à l’effort économique ; cette situation les a encouragé à se faire elles aussi une place sur la scène artistique, en tant que peintres ou mécènes.

L’arbre Frida Kahlo ne doit pas cacher une forêt de personnalités extraordinaires comme Nahui Olin, Rosa Rolanda ou les photographes Tina Modotti et Lola Álvarez Bravo.

Parallèlement à l’École Mexicaine de Peinture et de Sculpture des années 20 et 30, cette période a également été marquée par l’avènement de nombreuses autres démarches expérimentales.

Le triomphe du muralisme et de l’art nationaliste a éclipsé ces mouvements d’avant-garde alternatifs, qui ont revendiqué le droit de participer à la scène artistique internationale, indépendamment du paradigme révolutionnaire.

La troisième partie de l’exposition permet de découvrir toute une sélection d’artistes et d’œuvres se présentant comme des alternatives aux discours idéologiques de l’époque, des masques hallucinants de Germán Cueto aux portraits énigmatiques de Robert Montenegro et aux abstractions de Gerardo Murillo « Dr. Atl » ou Rufino Tamayo.

Enfin, la quatrième partie, intitulée Rencontre de deux mondes : Hybridation, montre comment, depuis le début du XXe siècle, la présence d’artistes mexicains aux États-Unis, comme Marius de Zayas, Miguel Covarrubias et surtout les grands muralistes, a joué un rôle décisif pour les mouvements d’avant-garde de villes comme New York, Détroit ou Los Angeles. Inversement, du fait de la notoriété acquise par les artistes mexicains à l’étranger durant les premières décennies du XXe siècle, de nombreux artistes étrangers ont décidé de délocaliser leur activité au Mexique.

En collaboration avec les artistes locaux, ils sont parvenus à développer une scène particulièrement riche, notamment autour du surréalisme avec Carlos Mérida, José Horna, Leonora Carrington et Alice Rahon.

L’exposition clôt la chronique de ces échanges, sources d’une perpétuelle « renaissance », avec l’arrivée de Mathias Goeritz au Mexique en 1949, mais leur vitalité est encore illustrée dans les œuvres d’artistes majeurs de la scène actuelle, à l’image de Gabriel Orozco et de ses « frottages » pris dans le métro parisien.

du 5 octobre 2016 au 23 janvier 2017

Grand Palais
3 Avenue du Général Eisenhower, 75008 Paris
Tous les jours (sauf mardi) de 10h à 20h, nocturne le mercredi jusqu’à 22h