24ème édition du Prix Liliane Bettencourt pour l’Intelligence de la Main®

Mardi 3 octobre 2023, la Fondation Bettencourt Schueller a remis la 24ème édition du Prix Liliane Bettencourt pour l’Intelligence de la Main®, dont le palmarès reflète la contemporanéité des métiers d’art et leur résonance avec les enjeux de notre époque : excellence des savoir-faire, ancrage territorial, valorisation de matières naturelles, promotion de modèles durables et responsables.

Les lauréats de l’édition 2023 ont été mis à l’honneur, sous le haut patronage de Rima Abdul Malak, Ministre de la Culture, par la présidente de la Fondation, Françoise Bettencourt Meyers, et par le jury présidé pour la première fois cette année par Laurence des Cars, présidente-directrice du musée du Louvre.

Les lauréats 2023

Talents d’exception : Pascal Oudet, tourneur sur bois, pour Laissez entrer le soleil

La puissance du chêne, l’infinie délicatesse de la dentelle… Avec « Laissez entrer le soleil », le tourneur sur bois Pascal Oudet signe l’une de ses œuvres les plus abouties, mêlant démarche artistique et savoir-faire d’exception. Sur le plan technique, l’œuvre a été composée à partir d’un chêne de 70 ans provenant d’une forêt de Côte d’Or dont une partie du tronc (60 cm de diamètre pour 100kg) a été patiemment travaillée, jusqu’à obtenir cette sculpture d’une stupéfiante légèreté – 300g à peine. Avec cette œuvre, Paul Oudet dévoile l’histoire intime de ce chêne, mettant en lumière ses cernes qui révèlent les étapes de sa croissance et ses accidents de vie, la qualité de son environnement et les conditions climatiques qui lui ont permis de s’épanouir.

Témoin silencieux de la dégradation de notre écosystème, l’œuvre porte à sa périphérie les marques de ces quatre dernières années de sécheresse exceptionnelle qui ont altéré son développement. Œuvre d’une pure beauté, « Laissez entrer le soleil » est également un plaidoyer pour la survie des arbres, et la nôtre.

Grâce à l’accompagnement de la Fondation, Pascal Oudet compte à l’avenir travailler sur un arbre en entier, et non plus seulement des troncs coupés. Ce projet monumental imposera un changement d’échelle, il constituera un vrai renouvellement de sa pratique sur les plans technique, logistique et scénographique.

Dialogues 2023 : Aurélia Leblanc, tisserande, Lucile Viaud, designer pour Pêche cristalline

Avec Pêche cristalline, la tisserande Aurélia Leblanc et la designer Lucile Viaud signent à quatre mains une œuvre aussi technique que poétique. Destinée à décorer la salle de restaurant du chef breton Nicolas Conraux, cette pièce témoigne du projet artistique et durable de ce duo qui a choisi de mettre son savoir-faire en commun, unissant recherche et artisanat pour créer ce tissage inédit, à partir de verre naturel et de fibres locales.

Le verre marin Glaz est fabriqué à partir de coquilles d’ormeaux et de micro-algues, les principales étapes de la production étant réalisées au sein du laboratoire Verres & Céramiques de l’Institut des Sciences Chimiques de Rennes où Lucile Viaud travaille depuis 2017 comme artiste-chercheuse. Les matériaux sont d’abord mis en fusion, puis travaillés à chaud pour former des baguettes de verre. Une à une, chaque baguette est réchauffée jusqu’à obtenir une « goutte », qui sera étirée à la main puis enroulée sur un tambour mécanique.

Plusieurs kilomètres de fils d’un diamètre de 230 à 240 microns sont alors prêts à passer par le métier à tisser d’Aurélia Leblanc. Après différentes étapes de préparation (ourdissage permettant de régler la densité et donc la souplesse et la transparence de l’étoffe, empeignage, enroulage), le travail de tissage est exécuté selon un motif imaginé en amont sur un logiciel ou à partir d’un dessin réel.

Aussi inédite que spectaculaire, cette œuvre porte une réelle puissance esthétique mais constitue aussi une prouesse technique qui ouvre de nouveaux champs dans la fabrication et l’application du verre. Autant d’expérimentations bienvenues dans un contexte de raréfaction des matières premières et d’une volonté de développer des nouvelles productions, plus économiques et écoresponsables.

Grâce à ce prix, Aurélia Leblanc et Lucile Viaud développeront des outils de production plus adaptés, notamment un métier dédié exclusivement au tissage de verre. La tisserande et la designer comptent également entamer un projet d’envergure : la création de vitraux pour une abbaye dans le Finistère.

Parcours 2023 : Lainamac, association filière laine française.

Conscient de la richesse unique de la laine et de la qualité des sociétés textiles limousines, un groupement d’entreprises et d’acteurs du territoire décide, en 2009, de fonder l’association Lainamac avec une mission : revitaliser cette filière alors en déclin et lui permettre de retrouver son rayonnement créatif. Pour cela, elle commence par fédérer l’ensemble de ses acteurs, de l’amont à l’aval, regroupant éleveurs, manufactures, filatures et artisans d’art…

L’association fédère aujourd’hui un réseau de 80 entreprises et dispose, depuis 2012, d’un organisme de formation pour pérenniser et transmettre les savoir-faire de la filière de la laine. Celui-ci déploie un cursus très complet (transformation de la laine, teinture naturelle, feutre, maille, filage, tissage, ameublement…), destiné aux entreprises souhaitant développer leur production mais aussi à des personnes en reconversion professionnelle. La structure se veut également un lieu d’expérimentation avec des ateliers partagés ; d’échanges avec des designers et des étudiants d’écoles d’art; de sensibilisation avec des stages pour les jeunes générations et un accueil du grand public.

Poursuivant sa mission, Lainamac inaugure en 2019 « Oh my laine », un showroom éphémère qui accueille durant la Paris Design Week une sélection de produits issus des univers de l’architecture intérieure, de la décoration, de l’artisanat d’art et de la création textile. Une façon de mettre en lumière les qualités de cette filière et susciter l’intérêt des grandes maisons, de plus en plus séduites par la qualité d’une production vivante, responsable, et 100% française.

L’accompagnement de la Fondation permettra à l’association de passer un nouveau cap pour l’ensemble de ses projets, notamment en recrutant un designer pour aider à structurer des offres de services personnalisées à destination des entreprises adhérentes à l’association, en créant une offre de résidence d’artistes au sein de ses ateliers partagés et en poursuivant le développement du projet « Oh my Laine » par la multiplication d’événements destinés aux prescripteurs et acteurs clés du marché.

La Fondation Bettencourt Schueller

À la fois fondation familiale et fondation reconnue d’utilité publique depuis sa création, la Fondation Bettencourt Schueller entend « donner des ailes aux talents », pour contribuer à la réussite et à l’influence de la France.

Pour cela, elle recherche, choisit, soutient, accompagne et valorise des femmes et des hommes qui imaginent aujourd’hui le monde de demain, dans trois domaines qui participent concrètement au bien commun : les sciences de la vie, les arts et la solidarité.

Dans un esprit philanthropique, elle agit par des prix, des dons, un accompagnement personnalisé, une communication valorisante et des initiatives co-construites.

Depuis sa création en 1987, elle a récompensé 647 lauréats et soutenu plus de 1200 projets portés par de talentueuses personnalités, équipes, associations et organisations.

https://www.fondationbs.org/

photos : Véronique Spahis