La vie après la vie 6/6
Père François Brune, théologien, écrivain et conférencier
Vents d’Orage : Vous avez lutté votre vie durant pour faire progresser la connaissance tant au plan scientifique que théologique…
François Brune : L’enseignement de Saint Augustin a profondément marqué l’occident, contribuant à fausser la compréhension de la Bible sur l’au-delà, la vie éternelle et le sens du passage de la mort. Mon dernier livre de théologie portait un titre quelque peu provocateur, « Retrouver Dieu malgré l’Eglise – Le désastre théologique ». Je voulais témoigner de l’erreur commise par l’enseignement, catholique comme protestant, offrant un portrait d’un Dieu exigeant le sacrifice de son fils pour laver les pêchers des hommes. Il ne faut donc pas s’étonner que tant de personnes aient peur de Dieu ou s’en soient détournées. Les théologiens d’Orient insistent bien davantage sur l’inclusion des hommes dans le Christ, soulignant autant la consubstantialité de Jésus à Dieu dans sa divinité que sa consubstantialité à l’Homme dans son humanité.
VdO : Une erreur qui a pu marquer les esprits même de manière inconsciente ?
FB : Bien entendu. En Occident, notre subconscient est profondément marqué par une image de Dieu théologiquement monstrueuse, scientifiquement intenable et une morale étroite et répressive.
VdO : Le fruit des recherches évoquées dans notre dossier, aux plans scientifique, philosophique et théologique, participent-ils d’un combat contre l’apostasie annoncée dans la Bible, traduisant une crise profonde de l’Eglise ?
FB : Ils préparent un renouveau de l’Eglise, indéniablement. La mort doit être appréhendée comme un retour dans la maison du Père et non comme un jugement terrifiant. Ce changement de paradigme n’influe d’ailleurs pas seulement sur la mort mais sur la vie toute entière.
VdO : Selon vous, pourquoi la mort, notamment d’un point de vue médiatique et sociologique, est-elle devenue une telle abstraction ? Pourquoi les mass médias relayent aussi peu les avancées sur l’hypothèse d’une vie après la mort ?
FB : Comme en témoigne Stéphane Allix, un journaliste est soumis à une rédaction pas toujours encline à la nouveauté, à la remise en question de certains dogmes. Il y a une prise de risque qui n’est pas assumée spontanément. D’où l’importance de continuer à publier des ouvrages, des articles de fond tout en veillant à vulgariser le propos pour permettre au plus grand nombre de s’ouvrir au sujet sans appréhension. On ne peut plus se contenter de relayer des propos qui évacuent la problématique, du genre « Je croirais plutôt malgré les miracles que grâce à eux » ! Bertrand Méheust, docteur en sociologie et historien de la métapsychique, entreprend un travail considérable qui ne trouve pas l’écho qu’il mérite. Il est notamment l’auteur d’un livres majeur sur lequel je m’appuie beaucoup pour mes propres recherches et publications, « Jésus thaumaturge ».
VdO : Les miracles, comme une épine dans le pied de l’Eglise ?
FB : Oui, dans une certaine mesure. Elle les évoque avec gêne. S’il est vrai que la foi ne se fonde pas sur les miracles, ils n’en demeurent pas moins des faits historiques. Une partie considérable de la Bible, près d’un tiers des Evangiles, se consacre aux miracles qui témoignent de la toute-puissance de Dieu. Je décris dans mon dernier ouvrage la manière dont nos exégètes ont minimisé cette question.
VdO : Cette négation de la vie éternelle symboliserait ce chemin de croix final que l’Eglise devrait emprunter tel qu’annoncé par Jésus lui-même ?
FB : Une seule parole du Christ fait mention de cette crise finale, se demandant s’il trouvera la foi à son retour glorieux. Je ne saurais dire si nous vivons actuellement cette crise finale mais celle-ci s’inscrit dans une succession de crises, de persécutions. Le sentiment anti religieux se manifeste depuis plusieurs siècles, en particulier contre le christianisme, et ce sous de multiples formes.
VdO : Quel est le rôle de la Vierge Marie ou encore de Saints comme Sainte Thérèse de Lisieux ?
FB : De nombreuses personnes ayant connu une expérience de mort provisoire -adjectif que je préfère à imminente- témoignent de leur présence aux côtés du Christ, en tant que co rédempteurs même si ce n’est pas à égalité avec le rôle du fils de Dieu.
VdO : Quel avenir entrevoyez-vous à cette question d’une vie après la mort ?
FB : Je crois qu’il faut rester optimiste. Les découvertes scientifiques, en particulier de la physique quantique, constituent le meilleur allié du renouveau spirituel. Cette discipline tend à démontrer que l’esprit et la matière sont comme les deux faces d’une même médaille, permettant peu à peu d’expliciter, d’éclairer le phénomène de bilocations tels qu’en connaissent les grands mystiques ou même celui de résurrection du Christ. A un certain niveau, le temps et l’espace ne jouent plus aucun rôle. Les Pères grecs l’affirmèrent dès les débuts du christianisme, comprenant intuitivement -ou plus surement de manière inspirée- que l’eucharistie célébrée à chaque instant dans tous les coins de la planète, participe de la même communion que nous recevons de Jésus lui-même, nous rendant présents à la Cène. Ce qu’ils avaient « deviné » se trouve aussi confirmé par les phénomènes de stigmatisation qui participent là-encore de la même et unique crucifixion du Christ sur le Mont des Oliviers.
VdO : Malgré votre décision de ne plus donner de conférences ou d’interviews, vous avez pourtant souhaité apporter votre éclairage sur notre dossier. Pourquoi ce choix ?
FB : Il m’arrive de temps à autre de sortir de mon silence, de faire exception quand le sujet le mérite. Aujourd’hui plus que jamais, un travail conséquent comme celui-ci se révèle d’une importance capitale. Vous avez réuni des interlocuteurs de premier plan et je suis heureux de pouvoir contribuer à ce qui mérite d’être publié à l’adresse d’un large public.
Dossier Vents d’Orage aka David Fargier,