Pour cette fin d’année, 17 artistes s’installent à la Galerie Mansart, au cœur du Marais à Paris, autour d’un sujet commun : la dualité. Chacun des artistes a été invité à contribuer à l’exposition, en proposant une de ses œuvres qui, selon lui, reflète au mieux sa position sur le sujet. L’occasion, pour les amateurs d’art contemporain, de découvrir un échantillon des travaux très divers de ces artistes d’horizons différents.
Sur différents médiums, les artistes nous communiquent leur univers. Daniela Baldelli place le féminisme au cœur de son travail, jouant sur la complexité du message transmis à travers le sens des mots et de la construction de l’œuvre. Parallèlement, Patricia Reinhart questionne sa féminité au travers de sa série d’autoportraits, constitués d’une superposition de photographies prises dans les photomatons des métros parisiens : son image devient une métaphore de l’expérience féminine.
D’autres artistes matérialisent la dualité humaine, sous différentes formes. L’œuvre de Florence Gourier s’intéresse aux expressions humaines, au travers d’une série de doubles portraits représentatifs des conflits internes rencontrés par tous. Cette même dualité se voit réconciliée dans les travaux d’Adrien Lamm : l’artiste joue sur les ambiguïtés, insistant sur cette différence complémentaire qui finalement créer l’unité. Cette multiplicité qui s’épanouie chez chacun d’entre nous, se matérialise également par le langage, au cœur du processus de travail de Markus Lichti : plaçant l’énigme au cœur de ses réalisations, il laisse à chacun la possibilité d’affirmer sa propre interprétation.
Des artistes s’intéressent aussi aux limites de l’œuvre. Ainsi, Jagna Ciuchta divise l’espace d’exposition en deux espaces grâce à son œuvre After House of Goats, conçu à partir d’une grande bâche en plastique recyclée, représentative du travail de l’artiste en général qui incorporent sans cesse ses réalisations dans d’autres configurations. D’une autre manière, Jonathan Binet questionne les limites de l’œuvre d’art, ici en déposant une partie de lui-même sur son dessin à la nicotine obtenu par son souffle, ou en coupant sa seconde œuvre, une toile, jouant ici avec les limites formelles du cadre.
De manière plus onirique, plusieurs artistes se questionnent sur l’univers dans son ensemble, et nous invitent à entrer dans leur monde. Les dessins d’Antoine Petel traduisent un univers en constante évolution, mystérieux qui peut s’avérer parfois complexe à saisir. Ces mêmes mouvements, ce changement, on le retrouve dans les ciels de Katherine Oh, qui traduisent l’ambivalence de ce qui n’a jamais été, et tout ce qui sera toujours. Dans cet ordre complexe de l’univers, Chiharu Shiota traduit dans ses lithographies la place tissée par présence humaine. Cette même humanité, est racontée par les Tondos de Rada Tzankova, grâce à des histoires humaines, constituées d’habitudes et d’un quotidien rassurant.
Interrogeant cette fois-ci l’envers de nos sociétés et de leurs dérives, la série Pilmoji de Jeanne Susplugas nous place face à ces emojis de l’ère numérique que l’on consomme comme des pilules, transformant nos manières d’écrire mais aussi, sans forcément qu’on le remarque, nos façons de penser. Toujours plongée dans l’ère numérique, Naomi B. Cook cherche à décoder de manière poétique le monde qui nous entoure, par l’analyse de données big data, s’appuyant tour à tour sur la Bourse de commerce et sur des conversations Tinder, dans ses deux œuvres Market Findings et Words Exchanged. De son côté, Motoko Tachikawa fait preuve d’une certaine nostalgie, recréant la fiction d’un passé dans lequel ses Mauvaises herbes recevaient l’attention d’être arrachées du sol, une valeur toujours plus importante qu’une éradication, avant même qu’elles existent, comme celle d’aujourd’hui.
Enfin, l’œuvre Atmospheric Mantle de la série Metaphysics of Core Matter de Silja Yvette nous fait prendre conscience d’une certaine absurdité des normes sociétales qui nous indiquent la valeur des choses. Elle nous présente une photographie de brassards de natation élevant de la mousse de polystyrène : s’y questionnent la futilité de certaines de nos actions, et la fragilité de nos désirs. De même, ces objets qui nous entourent, construits par l’homme, Odyssée Dao les questionne, créant une cuillère anthropomorphique. Celle-ci souligne une certaine forme de continuité entre les ustensiles que l’on fabrique et nous-mêmes, projetant nos « traces » tout au long de l’existence de l’objet.
Ainsi, n’hésitez pas à venir découvrir ces différentes perceptions du monde, qui se rencontrent pour votre plus grand plaisir.
Julie Goy
Double Trouble
Avec la participation de Daniela Baldelli, Cécile Bicler, Jonathan Binet, Naomi B. Cook, Jagna Ciuchta, Odyssée Dao, Florence Gourier, Adrien Lamm, Markus Lichti, Katherine Oh, Antoine Petel, Justine Ponthieux, Patricia Reinhart, Chiharu Shiota, Jeanne Susplugas, Motoko Tachikawa, Rada Tzankova, Silja Yvette.
Commissaire d’exposition : Gabriela Anco
Du 12 décembre 2020 au 31 janvier 2021
Galerie Mansart, 5 rue Payenne 75003 Paris
Du mardi au dimanche de 13h à 19h