Opéra-bouffe (dans tous les sens du terme…) en trois actes, Falstaff est l’oeuvre ultime du compositeur italien Giuseppe Verdi (1813-1901), magnifiquement coloré par le metteur en scène allemand et actuel directeur de l’Opéra Comique de Berlin, Barrie Kosky.
C’est l’histoire d’un gérant d’auberge, le bedonnant et farcesque Falstaff, qui, en proie à ses désirs pour le féminin et en quête d’argent pour payer ses dettes, tente de séduire deux dames à la fois, dont la femme du riche bourgeois Ford. Offusquées de l’outrage fait à leur dignité et plus encore à leur intelligence, elles décident de mettre en place une vengeance féroce, teintée de scandale et d’humour. Lui ayant fait croire toutes deux en leur fol amour pour lui, l’une des deux l’invite à la retrouver « dalle due le tre » – entre deux heures et trois heures – le même jour, pour les venger. Falstaff pris au piège se retrouve contraint de se cacher de l’une puis de l’autre, et termine jeté dans le fossé… Le pauvre coureur, atterré, noyant son chagrin dans le vin de Xéres, reçoit la visite d’une servante venant lui annoncer méprise et lui présenter une lettre d’amour d’Alice Ford le priant de venir le rejoindre dans la nuit. Enivré par l’éventualité d’une relation avec la jolie femme, Falstaff tombe à nouveau dans le piège et finit de se faire humilier publiquement devant une foule de choristes moralisateurs…
Dans cette version seventies du livret d’Arrigo Boito placée sous le signe de l’humour et de la truculence, Falstaff, incarné par le magistral Christopher Purves, resplendit d’ineptie et de trivialité. En effet, c’est dans son plus simple appareil qu’on le voit pour la première fois, en cuisine, portant un tablier certes… mais les fesses à l’air !
Papiers peints design, costumes assortis, gâteaux extravagants, couleurs vives et personnages ubuesques – tout dans ce spectacle cherche d’une façon comico-shakespearienne à amuser la galerie,d’ailleurs particulièrement friande de la trépidante mascarade proposée sur scène.
Comique oui, mais c’est aussi particulièrement adaptée à la partition musicale que se déroule la mise en scène, les comédiens-chanteurs effectuant une série de bruits et gestes en rythme et en adéquation avec la musique, divinement interprétée par l’orchestre de l’Opéra National de Lyon dirigé par Daniele Rustioni. L’intelligence humoristique de la lecture de Barrie Kosky se construit en accord avec la proposition musicale, allant même jusqu’à la transformer à l’occasion de numéros d’acteurs affectant les rythmes et sonorités à coups de bruits de hachoir ou de claquements de doigts jazzy…
Du côté de l’expérience spectateur, c’est non seulement la vue et l’ouïe mais l’odorat qui est sollicité, témoin des effluves aillées des préparations culinaires de Falstaff : il s’agit d’une dimension rare et fort agréable à vivre – véritable emprunte du metteur en scène de génie.
Créé à l’été 2021 au Festival d’Aix-en-Provence, ce spectacle « feel good » est à voir !
Musique de Giuseppe Verdi, Livret d’Arrigo Boito, Mise en scène de Barrie Kosky.
Interprétée par l’Orchestre et le choeur de l’Opéra National de Lyon sous la baguette de Daniele Rustioni. Avec Christopher Purves, Stéphane Degout et Carmen Giannattasio.
https://billetterie.opera-lyon.com/selection/event/date?productId=10228350485385&lang=fr
Valentine Pierre
19, 21 et 23 octobre 2021 à 20 h
Opéra National de Lyon, 1 place de la Comédie, 69001 Lyon.