Jusqu’au 5 mars 2023, avec le soutien exclusif de la Maison Chanel, le Palais Galliera accueille une rétrospective saisissante et magistrale consacrée à la vie et à la carrière de la charismatique mexicaine Frida Kahlo (1907 – 1954). Pour la première fois en France, présentant plus de deux cents objets constituant un vocabulaire artistique unique, l’exposition « Au-delà des apparences » éclaire le rôle de l’artiste au monosourcil dans le développement des grands mouvements de la modernité et retrace la manière dont l’artiste a façonné, tel un manifeste, son corps-sujet nourri par son héritage culturel et par son expérience du genre et du handicap.
Ces objets proviennent majoritairement de la Casa Azul, la maison où Frida est née, a grandi, vécu, aimé, créé et trépassé : vêtements, correspondances, accessoires, cosmétiques, médicaments, prothèses médicales et corsets peints à la main tels des toiles en 3D depuis son lit de malade qui lui tenait lieu de refuge et de scène… Ces effets personnels ont été mis sous scellés au décès de l’artiste, en 1954, par son mari le peintre muraliste mexicain Diego Rivera, et ont été redécouverts cinquante ans plus tard en 2004.
Cette précieuse collection, comprenant aussi des robes traditionnelles Tehuana affirmant des valeurs matriarcales, des colliers précolombiens chargés de mémoire collective, des ex-voto qu’elle collectionnait par centaines s’associent à des films, des photographies de l’artiste, offrant au public une narration visuelle au plus proche de l’intime de sa vie hors norme déployée en sept sections : «Je suis née ici», «La Casa Azul», «Gringolandia», «Paris», «Handicap et créativité», «Œuvres et tenues», «Frida Kahlo : un look contemporain».
En modelant l’image de son corps handicapé par la poliomyélite à 6 ans et son gravissime accident de tramway à 18 ans, Frida Kahlo a joué un rôle de pionnière. Par le choix de vêtements et d’accessoires adaptés à ses besoins médicaux et à ses particularités physiques mais affirmant également sa mexicanité, elle est devenue actrice de la construction d’une apparence audacieuse et singulière. Comme l’indiquent les reprises, les brûlures de cigarettes, les taches et les marques de peinture présentes sur de nombreux vêtements, ses tenues faisaient partie intégrante de sa vie, de son art et de son identité. Par ailleurs son apparence lui permit d’exprimer ses préoccupations sociétales et politiques dont son soutien âme et corps au révolutionnaire Trotski.
D’abord traitée avec condescendance comme « l’exotique » troisième épouse de Rivera qui « se mêlait joyeusement d’art », Frida s’affirma en tant que peintre notamment auprès des Surréalistes qu’elle qualifiait de « grands cacas », ces derniers ne comprenant rien à son positionnement résolument dans le réel. Se moquant d’André Breton elle déclara avec humour : « Je ne savais pas que j’étais une surréaliste jusqu’à ce que Breton vienne au Mexique et me le dise… ».
Elle qui souhaitait « ne jamais passer inaperçue dans la vie » a tenu son pari. La suite de la visite dans le Salon d’honneur l’atteste avec une superbe exposition-capsule, présentée jusqu’au 31 décembre 2022, qui aborde l’influence de l’artiste sur la mode contemporaine et la façon dont elle demeure, encore de nos jours, une icône et une source d’inspiration pour les designers, parmi lesquels Alexander McQueen, Jean Paul Gaultier, Karl Lagerfeld pour Chanel, Riccardo Tisci pour Givenchy, Maria Grazia Chiuri pour Dior ou Rei Kawakubo pour Comme des Garçons.
En nous laissant ce remarquable double legs, matériel et immatériel, Frida Kahlo se place à la croisée de l’histoire de l’art et de la mode. Les caractéristiques de ses tenues donnent vie à sa peinture, tandis que les toiles révèlent le vêtement dans toute sa « Resplendeur » ou signification symbolique, redéfinissant ainsi, irrévocablement, les frontières entre biographie, autoportrait et expression vestimentaire. A voir et à revoir !
Commissariat d’exposition : Circe Henestrosa, conceptrice et commissaire de l’exposition, directrice de l’école de mode Lasalle College of the Arts, Singapour ; Miren Arzalluz, directrice du Palais Galliera, assistée de Alice Freudiger ; Gannit Ankori, conseillère curatoriale, PhD, directrice et conservateur en chef Henry and Lois Foster, Rose Art Museum, Etats-Unis
Scénographie : Sandra Courtine
De nombreuses visites guidées et ateliers thématiques pour tous publics sont proposés ainsi que deux temps forts :
-Dia de los Muertos – La Fête des Morts le mercredi 2 novembre 2022
Réservations : www.billeterie-parismusees.paris.fr
-Festival « Viva la Vida » jusqu’au 25 mars 2023
Programmation à retrouver sur : www.sre.gob.mx et @vivalavidafest
Palais Galliera, 10, avenue Pierre 1er de Serbie – Paris 16ème
Ouverture : du mardi au dimanche de 10h à 18h et en nocturne les jeudis et vendredis jusqu’à 21h. Le musée est fermé les lundis, le 1er mai, le 25 décembre et le 1er janvier
Catalogue de l’exposition : 42€
Restaurant éphémère Les petites mains ouvert jusqu’à fin octobre de 11h à 20h
Texte et photos : Valmigot