David... cela paraitra bien naïf ou présomptueux mais tant pis. Je ne saurais d’ailleurs expliquer pourquoi le fait de partager le même prénom m’arrache les viscères un peu plus encore. Lui qui a tellement compté dans ma construction, mon ouverture au monde. Il contribua à ma compréhension de l’autre comme de moi-même. Il comblait des failles, des cicatrices, il éclairait les troubles les plus intimes. Les artistes de cette trempe servent à cela.
Donner de la lumière et de l’amour quand eux en ont cruellement besoin, plus que vous et moi sans doute.
Bowie était un ange parmi les anges. Pour preuve il partageait leur capacité à prendre différentes formes, se réinventant à chaque pas. Il n’était pas un concept comme ses disques et projets l’ont laissé croire. David projetait les multiples facettes de l’être humain, des plus tendres au plus sombres. Un kaléidoscope à lui seul.
Que contait Major Tom si ce n’est la solitude face à l’immensité de l’univers et le destin sinistre qui nous attend. Hunky Dory ne constituait-il pas une tentative courageuse et ô combien réussie de dire l’ambiguïté des sentiments amoureux. Comment parvint-il à s’écrire de la sorte, à se réécrire sans se perdre ni devenir une caricature ? Certes il faut un don du ciel, une fibre naturelle et polymorphe faisant de son corps et de son esprit une pâte à modeler, une toile que l’on peint puis efface à l’envi pour mieux la décorer, à l’infini.
Mais il faut être aussi à l’écoute, une éponge captant l’instant, l’air du temps et les modes avant qu’elles se dévoilent au monde. Sans jamais vampiriser, c’est avec grâce, malignité et intelligence qu’il s’approcha de Lou Reed.
Sa carrière démarra réellement après leur rencontre, transformant le maladroit songwritter folkeux en créature de l’avant garde. Après la période infructueuse de Tin Machine, David attira à lui Robert Smith et Billy Corgan. Ceux-là même qui avaient pour un temps inscrit leurs pas dans les siens. Il lui fallait, sans l’air d’y toucher, goûter de leur génie pour continuer d’avancer dans la bonne direction.
Vous ne me croyez pas ?
Regardez pourtant qui se trouve sur cette photo prise à l’occasion du concert donné au Madison Square Garden pour son 50ème anniversaire. Brian Molko témoignait hier de ces instants bénis où les créateurs, aussi inventifs soient-ils, viennent se frotter l’un à l’autre pour mélanger les effluves des parfums de demain. David fut et restera une étoile noire et verte et jaune et rose et bleue parce qu’il lui fut donné d’être un astre de premier plan. La multitude de couleurs dont ce soleil s’est paré lui vint des dizaines d’ascendants et héritiers, pompant en eux l’hydrogène indispensable pour briller d’un feu nucléaire. A l’échelle du cosmos, 69 ans passent comme une allumette consumée si vite qu’on s’y brule les doigts.
Maintenant qu’il repose de l’autre côté du voile, une telle étoile, une géante rouge brillera dans nos yeux pour l’éternité.
David Fargier – Vents d’Orage
David… this will seem naive or presumptuous but never mind. I can’t even explain why, but sharing the same first name tears my guts out a little more. He who has been so important in my development, my openness to the world. He contributed to my understanding of the other as myself. He filled flaws, scars, he shone the most intimate troubles. Artists of this caliber are made for that.
To give light and love when they desperately need it more than you and me probably. Bowie was an angel among angels. As proof he shared their ability to take different forms, reinventing themselves at every step. He was not a concept like his records and projects suggested. David threw the many facets of the human being, from the softer to the darker ones. A kaleidoscope by himself.
Wasn’t Major Tom telling that we’re standing alone facing the vastness of the universe and the sinister fate that awaits us. Wasn’t Hunky Dory a courageous and successful attempt to say the ambiguity of romantic feelings. How did he managed to write himself such a way, to rewrite himself without getting lost or becoming a caricature? Surely it must be a gift from heaven, a natural and polymorphic fiber making his body and mind a modelling clay, a canvas that is painted and then erased at will to get better decorated again and again to infinity.
But one must also be attentive, a sponge capturing the moment, times and fashions before they are revealed to the world. Without ever vampirizing, it is with grace, intelligence and malice he approached Lou Reed.
His career really started after they met, transforming the folkish songwritter into an avant-garde creature. After the fruitless period of Tin Machine David approached Robert Smith and Billy Corgan. Those who had put their footsteps in his. He needed -without seeming to touch- to taste their genius to keep moving in the right direction.
You do not believe me ?
Look at this picture taken on the occasion of the concert given at Madison Square Garden for his 50th anniversary. Brian Molko talked yesterday about such blessed moments when creators, as inventive as they are, come to rub one another to mix the smell of tomorrow perfumes. David was and will remain a black and red and green and yellow and blue star because it was given to him to be a front-rank one. The multitude of colors which this sun was parried with came from its dozens of ancestors and heirs, pumping in them the necessary hydrogen to glow with a nuclear fire. At the scale of the cosmos, 69 years pass like a match fire, so quickly that it burns your fingers.
Now that it rests on the other side of the veil, such a star, a red giant will shine in our eyes for eternity.
David Fargier – Vents d’Orage