Icônes de L’art Moderne, La collection Chtchoukine
Les 250 visages d’une maîtresse tyrannique.
274 exactement quand le 29 octobre 1918 tombe le décret de nationalisation.
274 œuvres mais une seule passion dévorante : La peinture.
Sergueï Ivanovitch Chtchoukine a aimé la peinture comme on aime une femme, d’un amour exclusif, d’un amour qui ne peut vivre un instant loin de l’être aimé.
A mesure qu’il construit son œuvre – sa collection – Chtchoukine, nouveau Pygmalion, se retrouve pieds et poings liés, prisonnier d’une passion à laquelle il ne sait plus résister et qui l’éloigne chaque jour un peu plus des siens; son épouse et ses deux fils.
Par deux fois il essaiera de se désintoxiquer allant jusqu’à tout quitter (son cher Moscou, son cher Paris) pour s’exiler, tel un anachorète des premiers temps du christianisme, au monastère Sainte-Catherine au cœur du Sinaï.
Rien n’y fait. Il est définitivement accro. La passion est la plus forte. Il rentre en Europe.
Il revient hanter les ateliers des peintres parisiens. Il achète. Il achète. Il achète.
Comment aurait-il pu résister quand la folle maîtresse pour laquelle il oublie tout ce qui n’est pas elle a pour nom Cézanne, Gauguin, Van Gogh, Matisse, Picasso, Derain, Krohn, Denis, Monet, Marquet, Douanier Rousseau, Malévitch, d’autres encore.
Pour avoir trop follement aimé la peinture Chtchoukine avait sans doute perdu de vue sa propre vie. Pour autant, non seulement cet amour fou ne l’a pas rendu aveugle mais il a aiguisé son regard, affûté sa perspicacité, consolidé la prescience qui déterminait ses choix. La peinture qu’il aimait n’était pas celle du XIXème siècle finissant, n’était pas celle de son temps à lui mais celle des temps à venir, celle du XXème siècle et au-delà.
Aujourd’hui il nous les offre dans un cadre qui les met en valeur bien mieux qu’au palais Trubetskoï.
Pierre Vauconsant
Jusqu’au 20 février 2017
Fondation Louis Vuitton
8 Avenue du Mahatma Gandhi
Bois de Boulogne
75116 Paris
Lundi, mercredi, jeudi : 11h-20h. Vendredi nocturne : 11h-23h