Le trait de la séduction. Dessins de l’École de Fontainebleau

Lorsque François Ier retrouve le territoire national, en 1528 après sa captivité espagnole, c’est sous le signe de l’unité et de la grandeur qu’il entend gouverner.

Délaissant le pays de Loire, il désigne l’Ile-de-France comme le siège du pouvoir et Fontainebleau comme la nouvelle capitale des arts.

Après la défaite de Pavie, François Ier fait installer ses plus belles œuvres italiennes à Fontainebleau, et réunit en son palais, des artistes pouvant rivaliser avec les grands maîtres italiens tels que Léonard de Vinci, Michel-Ange et Raphaël.

Il invite ainsi de nombreux artistes italiens, dont Rosso, peintre maniériste florentin, le Primatice, collaborateur de Jules Romain au palais du Té à Mantoue, et Benvenuto Cellini, orfèvre, sculpteur et dessinateur florentin.

Si le château est célèbre pour la sobriété de son architecture conçue par Gilles le Breton, il l’est surtout pour la somptuosité de ses décors où différents arts sont associés.

C’est cette rencontre pluridisciplinaire à Fontainebleau qui caractérise ce que l’on nommera plus tard « l’école de Fontainebleau ».

Le musée de Condé au château de Chantilly est très riche en dessin préparatoire des artistes de l’école de Fontainebleau, notamment du Primatice. Une grande partie de ces chefs-d’œuvre ont été réunis par Henri d’Orléans, duc d’Aumale, au XIXe siècle.

Il est donc exaltant pour le musée de Condé de présenter à ses visiteurs, à l’occasion du bicentenaire de la naissance du duc d’Aumale, une exposition s’appuyant sur un grand nombre de dessins et quelques manuscrits exceptionnels afin de mieux comprendre cette école artistique si féconde.

L’exposition propose d’explorer l’école de Fontainebleau autour de cinq thèmes majeurs.

Tout d’abord l’importance du dessin sur le chantier de Fontainebleau.

Lorsque Primatice vient travailler sur les décors du château, il doit travailler avec Rosso Fiorentino.

Lorsque celui-ci se suicide en 1540, c’est Primatice qui devient en charge du chantier colossal.

Il utilise beaucoup la technique du dessin préparatoire à la sanguine. C’est une nouveauté en France de travailler à partir de dessin. Le musée de Condé possède d’ailleurs le seul dessin préparatoire connu pour la galerie François Ier à Fontainebleau dont la Danaé du Primatice fait partie.

On y retrouve l’exaltation du charme féminin et de l’amour faisant partie de l’esthétique bellifontaine.

L’évolution du style du Primatice tend vers un style de plus en plus élégant et raffiné, comme on le voit dans sa représentation de François Ier en César.

Ensuite, on peut découvrir le rayonnement des décors bellifontains qui exercent une influence durable sur l’art français jusqu’à la fin du XVIe siècle.

Grâce aux gravures et aux dessins, la technique des artistes italiens se répand à Paris et inspire Baptiste Pellerin, aux côtés de Jean Goujon et d’Antoine Caron, devenant l’un des tenants du langage bellifontain sur la capitale.

Mais l’esthétique bellifontaine ne s’arrête pas à Fontainebleau et Paris. Elle se diffuse largement pour différents supports : peinture, sculpture, architecture, orfèvrerie, vitrail, tapisserie, gravure, …

Les modèles dessinés sont l’œuvre des artistes de la Renaissance très souvent polyvalents.

Le musée de Condé détient nombre de feuilles à destination, d’armuriers, de fournisseurs d’épée, ou d’orfèvres, tel que ce projet de coupe sur pied de l’école de Fontainebleau.

Puis, au cours du XVIe siècle, les manuscrits enluminés se raréfient. Mais ils connaissent un chant du cygne magnifique sous l’impulsion du connétable Anne de Montmorency, propriétaire de Chantilly, des Guise et du roi.

Les programmes d’illustrations d’ouvrages ou de dessins sur parchemin sont profondément renouvelés, avec un goût pour la grisaille ou les scènes en camaïeu qui renvoient à l’idée d’une certaine antiquité.

Enfin, l’exposition s’achève sur les portraits bellifontains, notamment ceux des Valois à cheval, démontrant que l’art de Fontainebleau est indissociable du pouvoir.

En effet, dès le début de son règne, François Ier souhaite une statue équestre à son image, qu’il ne parvient pas à obtenir vu la complexité de la réalisation.

Cependant, il promeut la diffusion de son portrait équestre, imaginé par Jean et François Clouet, puis repris par Antoine Caron qui travaille dans l’orbite de Primatice à Fontainebleau.

Deux autres lieux sont à visiter dans la continuité de l’exposition du musée de Condé, pour appréhender pleinement les chefs-d’œuvre de l’école de Fontainebleau.

Tout d’abord, jusqu’au 15 octobre, l’exposition Renaissance de la Renaissance, au château de Fontainebleau, présente des huiles sur toile de Jean Alaux qui proposa en 1834, un projet préparatoire à la restauration de la salle de Bal, afin de faire renaître le décor bellifontain d’origine.

Puis, au domaine de Chaalis, à la fin de la restauration de la chapelle Sainte-Marie début novembre, il sera possible d’admirer l’un des rares décors de la Renaissance peint « à fresque », encore visible en France. Hippolyte d’Este, qui dirigea l’abbaye de Chaalis à partir de 1541, qui demanda à Primatice de décorer la chapelle. Le décor de cette chapelle révèle l’influence de l’œuvre de Michel-Ange, de Raphaël ou de Jules Romain, sur le travail de Primatice.

Olivia Bellin-Zéboulon

Crédits photo : Michel Urtado

Du 7 août 2021 au 7 novembre 2021

Le trait de la séduction – Dessins de l’École de Fontainebleau

Château de Chantilly, Cabinet d’arts graphiques

Commissariat : Mathieu Deldicque, conservateur du patrimoine au musée de Condé

Château ouvert de 10h à 18h / 20h pour le parc – Dernier accès 1h avant la fermeture de la billetterie

Fermeture hebdomadaire le mardi –

Réservations sur place ou en ligne : https://billetterie.domainedechantilly.com/fr-FR/accueil