Les gros patinent bien

Si vous cherchez un spectacle à l’humour décalé, tout en étant éco-responsable, ne chercher pas plus loin, il faut aller voir Les gros patinent bien, au théâtre Saint-Georges, jusqu’au 24 février 2024, une odyssée poétique et déjantée, véritable feu d’artifice de bouts de carton et sacrée Meilleur Spectacle de théâtre public aux Molières 2022.

En s’installant, le spectateur découvre les décors de la scène, entièrement en carton.

Puis le spectacle commence et on découvre, caché depuis le début dans une immense boite en carton, un homme un peu replet, vêtu d’un costume à carreaux trois pièces. Il s’exprime dans une langue qui ressemble à de l’anglais mais ça n’en est pas.

Mais nul besoin de traducteur pour comprendre l’histoire incroyable qu’il raconte.

Son aïeul aurait été maudit par une sirène au bord d’un fjord avant de traverser toute l’Europe pour la retrouver, affrontant maintes péripéties. Il s’évade en patins, à trottinette, en avion cartonné. Il découvre l’Écosse, repart vers le sud à dos de mulet, assassine quelques cornemuseurs au passage, cherche l’amour, toujours.


En showman impressionnant, Olivier Martin-Salvan incarne ce comédien fantasque qui rejoue ces folles aventures. À ses côtés, l’inépuisable Pierre Guillois s’échine à suivre le fil de l’histoire, tout en s’affairant à faire apparaître le décor à coups de pancartes en carton. Et accessoirement à insuffler un brin de logique à ce récit délirant.

Le contraste entre l’acteur rondouillard en costume en tweed bien chaud, qui reste assis durant tout le spectacle, et son acolyte malingre en maillot de bain qui s’agite dans tous les sens autour de lui, insuffle un vent de folie à la mise en scène parfaitement orchestrée.

Après Bigre, Molière de la Comédie 2017, Pierre Guilloiset Olivier Martin-Salvan invitent les spectateurs à un voyage imaginaire, fusion des délires d’un cabaret de « cartoons » et d’une épopée shakespearienne.

Grâce à leur expérience sur la gestion des accessoires et la poésie qu’ils y trouvent, le duo de clowns sans en être, souhaitaient écrire un spectacle leur permettant d’atteindre des publics plus larges.

Projet réussi, Les gros patinent bien font rire les plus jeunes, les moins jeunes et tous les publics aimant l’humour très second degré voir dixième degré avec les blagues sur les migrants.

Dès la première répétition, les comédiens commencent à écrire sur des cartons qui trainent, à l’aide de gros marqueurs noirs, le nom des accessoires, décors, personnages…

Soudain l’histoire qu’ils racontent s’ouvre sur d’infinis possibles grâce à ce procédé ingénieux.

Ainsi, pas à pas, ou carton après carton, le spectateur voyage avec cet homme qui ne bouge pas tout en faisant le tour de l’Europe. Son régisseur survolté, ou préposé au décor, fait défiler, derrière cet homme immobile, les paysages, et tous les éléments de l’histoire.

Grâce à des centaines de morceaux de carton sur lesquels sont inscrits les noms des pays, la météo, les animaux, les vêtements, les accessoires, le récit des aventures rocambolesques de ce personnage hors du temps, est une explosion d’idées aussi géniales qu’elles sont absurdes.

Chacun y verra la référence de duo comique qu’il préfère, entre Monty Python, Frères Cohen ou Laurel et Hardy, Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois, composent un spectacle délirant, absolument jouissif tant par l’économie de moyens déployés que par l’imagination incroyable et irrésistible, avec des gags débridés et burlesques assurés par un duo de comédiens extrêmement talentueux.

Un spectacle de et avec Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois ; En alternance avec : Jonathan Pinto-Rocha et Grégoire Lagrange ; Ingénierie carton : Charlotte Rodière

Olivia Bellin-Zéboulon

Crédit photo : Fabienne Rappeneau

Jusqu’au 24 février 2024
Mardi, mercredi, vendredi et samedi à 20h – Dimanche 24 décembre à 15h – Dimanche 31 décembre à 21h – Public : à partir de 11 ans

Théâtre Saint-Georges, 51 rue Saint-Georges, 75009 Paris