À l’occasion de l’entrée de l’intégralité de l’œuvre de Marc Riboud dans les collections nationales, le musée Guimet consacre une importante rétrospective à la hauteur du grand photographe. Pas moins de 50 000 photographies, principalement en Asie, sont laissées par le grand Monsieur. De ses premières photographies à Lyon, ville de son enfance, jusqu’à ses ultimes photographies en Chine, 50 ans de carrière se déroulent sous nos yeux, nous faisant sillonner le monde, en rendant hommage au photographie disparu en 2016.
Cette grande exposition est le fruit de la rencontre en 2013 entre Sophie Makariou, directrice du musée Guimet, et Catherine Riboud, épouse du photographe mais également belle-sœur de deux grands donateurs du musée, Jean et Krishnâ Riboud. C’était le souhait de Marc Riboud que son œuvre entre dans un musée. Ainsi, le Musée national des arts asiatiques œuvre, main dans la main avec l’association des Amis de Marc Riboud, à la patrimonialisation de son travail.
Le parcours de l’exposition nous plonge ainsi au cœur de la richesse de ce fonds photographique. Les premiers temps sont ceux passés en France, entre 1942 et 1954, notamment à Lyon. Déjà, le photographe compose ses images avec attention, immortalisant les événements majeurs du temps avec finesse, tel que ce fût le cas pour son mythique cliché d’un peintre en lévitation sur la Tour Eiffel. Celui-ci, parut dans le célèbre magazine américain Life, lui permet d’entrer chez Magnum, coopérative photographique fondée en 1947, au sein de laquelle il rencontre de grandes figures de la photographie, telles que Henri Cartier-Bresson ou Robert Capa, ce dernier l’incitant à réaliser son premier long voyage en 1954 en Angleterre. Il y saisi, comme en France, les moments de la vie, entre passants londoniens flânant dans les parcs et dockers en grève.
Par la suite, se sont enchaînés ses grands voyages. D’abord vers l’Orient, entre 1955 et 1958 : en Turquie, Yougoslavie, il photographie le quotidien des enfants des rues. Puis il se dirige vers l’Iran, voguant jusqu’au Pakistan, où il connait son premier contact avec le nouveau monde de l’Islam. Il clôt son voyage par l’Indonésie et le Japon. Mais l’étape majeure de ce voyage fût la découverte de la Chine en 1957, une rencontre cruciale, puisqu’il y retournera à plusieurs reprises jusqu’en 2010. Il était alors l’un des rares photographes à accéder au pays, et il y rapporte un témoignage historique précieux, en photographiant cet état dont l’évolution rapide intriguait. Il immortalise un pays emplit d’espoir, en pleine émulation artistique, juste avant la grande fracture de la lancée du « Grand Bond en avant » dès 1958.
Tout au long de l’exposition, présentée chronologiquement, nous voyageons dans les pays de Marc Riboud : le Japon et l’Alaska en 1958, les Indépendances, entre autres au Ghana et au Nigéria entre 1957 et 1962. Mais également le Vietnam et la lutte internationale menée contre la guerre qui s’y déroule, notamment aux États-Unis, où il immortalise sa mythique photographie de la Jeune fille à la fleur, en 1967.
S’en suivent le Cambodge et le Bangladesh, pour enfin terminer sur ses grands travaux en Chine, réalisés entre 1965 et 2006. Il en rapport de nombreux clichés qui documentent les différentes phases sociales et politiques de ce pays, de la Révolution culturelle au « boom » économique. L’arrivée de la couleur sur les photographies, sert à la transmission de son message : par le rouge notamment, il fait transparaître toute la sévérité du règne de Mao Zedong (1893-1976). À cette période de troubles, succède l’adoucissement dans les années 1970, sous l’influence de Zhou Enlai, suivi de l’émergence d’une société de consommation de masse, guidée par la jeunesse chinoise.
Enfin, un instant de contemplation nous est offert au cœur de l’espace consacré à la série réalisée entre 1986 et 1991 parmi les monts Huang Shan. Le photographe s’imprègne de ces paysages de sommets escarpés, baignés d’épaisses brumes, qui ont tant inspirés les peintres chinois. Il visite lui-même ces montages à plusieurs reprises, sur les conseils de son ami, le peintre Zao Wou-Ki.
Ainsi, Marc Riboud aura su capture la sensibilité du monde et les diverses formes d’humanité qui y habitent, immortalisant sa richesse et sa beauté avec un regard unique. Cette grande rétrospective est l’occasion de (re)découvrir son œuvre titanesque, mais aussi de faire le tour du monde… Ce qui ne serait, actuellement, de refus pour personne !
Commissariat d’exposition : Sophie Makariou, Lorène Durret (Les amis de Marc Riboud), Jérôme Ghesquière
Julie Goy
Jusqu’au 1er mars 2021 ?
Musée national des Arts asiatiques – Guimet (MNAAG)
6, place d’Iéna, 75116 Paris
Tous les jours de 10h à 18h sauf le mardi.
Réservation conseillée : http://billetterie.guimet.fr