Sur la route des chefferies du Cameroun. Du visible à l’invisible

Cette exposition remarquable présente l’art des communautés établies sur les hauts plateaux des Grass Fields, à l’Ouest et au Nord-Ouest du Cameroun. Dans une perspective inédite portée par l’association La Route des Chefferies, l’exposition aborde la culture des communautés et la préservation d’un patrimoine unique, historique et vivant.

Architecture monumentale, forge, créations perlées, sculpture sur bois, production textile, danses traditionnelles du 16e siècle à nos jours, constituent un patrimoine précieusement conservé par les chefs traditionnels. Investis de pouvoirs quasi-divins, ces derniers en sont les principaux dépositaires, garants à la fois de la tradition et du lien entre le monde des ancêtres et celui des vivants.

Dans une démarche de sauvegarde et de mise en valeur des patrimoines traditionnels, soutenue par l’association La Route des Chefferies, l’exposition déploie ainsi plus de 270 œuvres dont 230 conservées par plusieurs chefs et lignages familiaux. Si l’art ancien du Cameroun a fait l’objet de nombreuses expositions dans des musées occidentaux, Sur la route des chefferies du Cameroun aborde la culture des communautés dans une perspective inédite et immersive, une démarche collective de préservation des patrimoines traditionnels. Ponctuée d’œuvres d’artistes contemporains camerounais, elle met en valeur l’influence culturelle des chefferies sur l’art contemporain et la dimension vivante de ce patrimoine, le long d’un parcours conçu comme une plongée au cœur de la société bamiléké.

Entre la fin du 16e siècle et le 18e siècle sont fondés de nombreux royaumes définis par un territoire, une communauté et son histoire sous l’autorité d’un chef, assisté de notables réunis en conseil. Ils assurent jusqu’à ce jour le lien entre le monde des vivants et celui des ancêtres, veillent au respect des traditions et de la culture bamiléké. Depuis la fin des années 1960, l’État camerounais reconnaît aux chefferies le statut d’auxiliaire administratif. Aujourd’hui, l’association La Route des Chefferies s’est donnée pour mission de protéger et valoriser ce patrimoine historique et vivant (architecture, créations plastiques et arts intangibles).

La première partie de l’exposition illustre l’organisation typique d’une chefferie bamiléké dont les fondements reposent sur un système dans lequel politique, religion et organisation sociale sont intrinsèquement liées. L’architecture, le rapport à la nature, le dialogue de l’homme avec l‘animal et le culte des ancêtres sous-tendent cet urbanisme cosmogonique. L’organisation spatiale d’une chefferie ainsi que les savoir-faire importants de la société bamiléké, parmi lesquels l’art de la forge, l’art des calebasses et celui des fresques ouvrent le parcours.

La deuxième section éclaire les rapports entre art et pouvoir, à travers la présentation du rôle du chef, pilier social, économique et politique du royaume, du rôle des femmes, et de celui des multiples sociétés secrètes qui agissent comme un contre-pouvoir. Pilier social économique et politique du royaume dès le 16e siècle, le pouvoir du chef bamiléké est aujourd’hui dévolu aux affaires traditionnelles (litiges matrimoniaux, héritages, sorcellerie) et à un rôle de maintien de l’ordre public. Cette section comprend plus d’une dizaine de trônes où quatre chefferies sont mises à l’honneur successivement. Destinées aux chefs ou aux reines pour orner les objets de grande valeur, les broderies de perles colorées et de cauris présentées dans l’exposition sont réalisées par des femmes de la chefferie. Aujourd’hui, certaines artistes contemporaines s’inspirent des techniques traditionnelles pour leur donner une autre dimension.

La troisième partie de l’exposition évoque enfin les sociétés secrètes (confréries, corps de métiers, associations de classes d’âges…). Considérées comme des contrepouvoirs, ces congrégations conseillent, soutiennent ou contrôlent le chef et sont indispensables à l’équilibre de la communauté. Lors des grandes cérémonies, elles manifestent publiquement leur puissance toujours active. Le parcours se termine sur un espace immersif qui fait dialoguer des images d’archives et contemporaines de cérémonies où les costumes, coiffes, masques entrent en action par le biais de danses patrimoniales, rappelant de manière vibrante la dimension vivante de ce patrimoine.

Commissaire général : Sylvain Djache Nzefa Architecte urbaniste, fondateur et coordonnateur général de la Route des Chefferies. Commissaires associées : Cindy Olohou, Historienne de l’art, fondatrice et présidente de Wasanii Ya Leo ; Dr Rachel Mariembé, Enseignante-chercheur à l’Institut des Beaux-Arts de l’université de Douala à Nkongsamba, cheffe de département (PI) « Patrimoine et Muséologie ». Comité scientifique : Conseil des Chefs Traditionnels de l’Ouest Cameroun ; Pr Ousmane Abba Mahamat, Enseignant-chercheur, expert au centre du patrimoine du monde islamique et coordinateur de la Route du Sahel ; Aurélien Gaborit, Responsable de collection Afrique au musée du quai Branly– Jacques Chirac ; Philippe Charlier, Directeur du département de la recherche et de l’enseignement au musée du quai Branly–Jacques Chirac

Evénements en lien avec l’exposition : https://www.quaibranly.fr/fr/expositions-evenements/au-musee/spectacles-fetes-et-evenements/spectacles-et-concerts/

Du 5 avril au 17 juillet 2022

Musée du quai Branly–Jacques Chirac, 37 quai Branly, 75007 Paris

Mardi, mercredi, vendredi, samedi et dimanche de 10h30 à 19h. Nocturne le jeudi jusqu’à 22h. Fermeture hebdomadaire le lundi, sauf durant les vacances scolaires d’avril/mai, toutes zones confondues.

Photos : Véronique Spahis