En ce moment une exposition toute particulière qui rend hommage à Beyrouth a lieu à la galerie Terrain Vagh dans le très charmant 5ème arrondissement de Paris près de l’institut du Monde Arabe. Tout le monde se souvient de l’explosion qui a frappé le port de Beyrouth le 4 août 2020 meurtrissant le pays et surprenant le monde entier entraînant alors un grand sentiment de compassion pour ce pays déjà touché par la guerre et la crise du Covid.
« Qu’elle soit courtisane, érudite ou dévote, péninsule des bruits, des couleurs et de l’or, ville marchande et rose, voguant comme une flotte, qui cherche à l’horizon la tendresse d’un port, elle est mille fois morte, mille fois revécue. »
Nadia Tuéni, poétesse libanaise (1935-1983) en évoquant Beyrouth.
Dix artistes, ayant tous un lien avec le Liban,ont été choisis par Moufida Adig, Véronique Grange-Spahis et Fatima Guemiah, commissaires de l’exposition, pour honorer la ville de Beyrouth à travers des photos, des peintures ou encore des sculptures. Cette exposition a été organisée dans l’optique de montrer que cette ville toujours détruite arrive toujours à se relever tel un Phénix qui renaît de ses cendres.
Le point de départ de l’exposition a lieu avec l’œuvre de Sara Abou Mrad : l’instant T. Après avoir ramassé des débris de verre dans la ville lui est venu l’idée de rassembler ces morceaux et d’en faire sortir une forme qui exprimerait le mouvement de fuite lors du drame. Ceci grâce à un moule qu’elle possédait déjà et avec lequel elle avait réalisé plusieurs sculptures d’un bonhomme prénommé le Dormeur en mouvement. Cette œuvre sera offerte au président Macron lors de son passage au Liban.
Nous découvrons ensuite les sculptures d’Hélène Lhote influencée par la culture du Moyen Orient où elle a vécu dans sa jeunesse et notamment par la poétesse Nadia Tueini dont elle s’est inspirée pour le nom de son œuvre. Les Bras de prophètes sont un méli-mélo de miroirs et autres matériaux qui représentent toutes les religions, toutes les cultures vivant ensemble en harmonie, dans le même style que son autre œuvre Terre de rêve.
Claude Mollard, photographe (et conseiller du président de l’Institut du Monde Arabe), nous dévoile 4 photos prises dans les jardins de la résidence des Pins (Ambassade de France) à Beyrouth entre 2013 et 2015 – des « Origènes », que l’on perçoit aisément. Il a aussi écrit un poème, Feuillets d’espoir, en 10 vers dont 4 correspondent aux photos présentes à la galerie. « Le résistant d’acier observe la mitraille / Le regard divisé au mortier du cachot / Déchirure écartée d’écorce au ciel rosé / Bleuissement palmé déjà en ses brisures. »
L’exposition se poursuit avec les peintures de David Daoud dont les souvenirs de Beyrouthont transformé les paysages qu’il représente selon sa propre vision fantasmatique de la ville.
Un peu plus loin dans la salle, nous découvrons deux artistes, Amal Alzahrani et Jean Merhi, dont les œuvres représentant la femme se font face. Sur l’une, figure une femme faisant barrage au débris de l’explosion de son corps nu et tenant en son sein un minuscule cèdre, symbole de Beyrouth. Sur l’autre, un trio de photographies, on aperçoit les traces du corps d’une femme faisant penser à une déesse qui nous rappelle le rôle important des femmes dans le maintien de la paix un peu comme sur l’œuvre citée précédemment.
Au fur et à mesure de la visite nous nous rendons compte que cette exposition véhicule un message d’espoir pour Beyrouth laissant le sentiment qu’une « rémission » de la ville est possible si chacun accepte de vivre avec les autres peu importe sa culture, sa religion ou ses différences. Mais cela doit être le fruit d’une prise de conscience qui pour l’instant n’a toujours pas vu le jour …
D’autres artistes tels que Myça El Khoury, Marit Fosse, Céline Hayek, Nayla Maalouf sont à découvrir au sein de l’exposition avec chacun leur vision personnelle de Beyrouth.
Lison Desgrées du Loû
Photos : Véronique Spahis
Exposition du 19 mai au 19 juin 2021
Vernissages samedi 22 mai de 15 h à 20 h et mercredi 26 mai de 18 h à 20 h
Galerie Terrain Vagh 24 Rue des Fossés Saint-Bernard, 75005 Paris
Ouvert du mardi au samedi de 14h à 19h