L’abbé Pierre photographe : un regard sur le monde
La passion de l’abbé Pierre pour la photographie est beaucoup moins connue que ses engagements sociaux et politiques. L’homme qui se voulait « frère des pauvres et provocateurs de paix » y a pourtant consacré une partie non négligeable de sa vie. Ses archives en contiennent plusieurs milliers, propriété d’Emmaüs international.
« L’abbé Pierre photographe : un regard sur le monde » est une exposition temporaire de photographies inédites prises par l’abbé Pierre lui-même dans de nombreux pays. 70 photos ont été extraites du fonds abbé Pierre situé aux Archives nationales du monde du travail à Roubaix pour être imprimées en grand format et mises en espace dans le lieu de mémoire de l’abbé Pierre d’Esteville, situé près de Rouen en Normandie.
Ces photos sont présentées accompagnées d’appareils photos, de lampes, d’objectifs, de planches-contact, de diapositives et de nombreux accessoires ayant appartenu à l’abbé Pierre et qui sont rangés habituellement dans son atelier à côté de sa chambre (intacte depuis son décès) à Esteville.
L’abbé Pierre était un bricoleur atypique, astucieux et un peu farfelu. Il s’appliquait à modifier son matériel photographique, en le démontant et en le détournant de l’usage prévu par le fabriquant, afin d’en optimiser les capacités. Parfois son ingéniosité provoquait la mise hors d’usage de l’objet en question… Mais dans le cas de la photographie, cette manie du bricolage permet aujourd’hui d’identifier avec certitude les photographies dans les archives qui ont été prises par l’abbé Pierre lui-même. En effet, à partir d’une pellicule destinée à 5 prendre six photos, l’abbé Pierre pouvait en prendre douze grâce à un ingénieux système de son invention ! Les photographies qui ont été sélectionnées pour cette exposition ont été identifiées grâce à ces pellicules aux prises de vues démultipliées.
Pour l’abbé Pierre, la photographie n’est pas seulement un loisir créatif. Elle permet de rendre compte de ce qu’il a vu. Témoin de son temps, investi dans la plupart des grandes causes de son époque, l’abbé Pierre rassemblait des éléments de preuves dans le but de renforcer ses combats. Il se voulait « la voix des sans voix » et souhaitait conserver et révéler les injustices du monde ainsi que les solutions mises en œuvre par ceux qui luttent aux côtés des plus exclus.
L’abbé Pierre a pris des photographies dans de nombreux pays (Cambodge, Rwanda, Pérou, Australie…). On désigne souvent le fondateur du Mouvement Emmaüs comme un « voyageur », tellement il a parcouru le monde et rencontré de personnes différentes, toute sa vie et sur tous les continents. Pourtant, les motifs de ses voyages ne sont ni ethnologiques, ni touristiques. Il se déplaçait pour des raisons concrètes liées à des actions de solidarité. Grâce à ses voyages, il a pu encourager la création de groupes Emmaüs, soutenir des communautés en difficulté, venir en aide à des militants aux prises avec des problèmes politiques ou financiers, donner de nombreuses conférences à l’appel d’institutions internationales, d’universités, d’églises, d’associations… Ses voyages et les photographies prises lors de ceux-ci retracent l’itinéraire d’un militant épris de justice et de paix dans le monde. « Nous en avons assez d’être les partisans de causes plus petites que celles de l’univers. » écrivait-il dans « Combat », le journal d’Albert Camus.
Cette exposition donne une impression générale de vitalité. Elle offre l’occasion de recevoir ce que l’abbé Pierre a vu et comment il le voyait. Homme hors du commun, capable d’aimer sans mesure, dont le bilan est extraordinaire.
du 15 septembre au 15 décembre 2018
Inauguration : Vendredi 14 septembre 2018 à 18h
Centre abbé Pierre – Emmaüs (lieu de mémoire)
Route d’Emmaüs
76690 Esteville (30 km au nord de Rouen)
tous les jours de 10h à 18h