L’exposition « Stephen Shore, Véhiculaire et Vernaculaire » à la Fondation Henri Cartier-Bresson, rassemble plus d’une centaine de photographies prises entre 1969 et 2021 sur le sol nord-américain. Pendant plus de cinquante ans, Stephen Shore a développé une forme de photographie axée sur le déplacement. Tout au long de son histoire, la photographie nord-américaine s’est beaucoup intéressée au vernaculaire, cette culture de l’utile, du local et du populaire si caractéristique des États-Unis Les différents moyens de transport qu’il utilise lui permettent de multiplier les perspectives et les confrontations avec l’américanité.
Depuis les années 1960, la mobilité est un thème central dans l’œuvre de Stephen Shore. En 1969, lors d’un voyage à Los Angeles, il commence à capturer des images depuis la fenêtre d’une voiture. Dans les années 70 et 80, il entreprend plusieurs road trips à travers les États-Unis, donnant naissance à ses deux séries les plus célèbres : « American Surfaces » et « Uncommon Places« . À l’aube du nouveau millénaire, il renouvelle son exploration en photographiant depuis la voiture, le train et l’avion. Son projet le plus récent, entamé en 2020, documente les mutations du paysage américain à l’aide d’un drone équipé d’une caméra. C’est la première fois que cette partie de son travail est exposée en Europe.
Greating from Amarillo, « Tall in Texas”, 1971 :
« American Surfaces » est une série de photographies en couleur réalisées en 1972 et 1973. Ce projet s’inscrit dans la tradition américaine de la documentation du vernaculaire. Stephen Shore capture tout ce qu’il rencontre sur son chemin et qui, selon lui, symbolise une culture populaire typiquement américaine. L’esthétique est celle du « snapshot » faisant écho à une prise rapide et spontané. À la fois carnet de route et journal intime, « American Surfaces » est une série déterminée par la mobilité.
Second Street, Ashland, Wisconsin, July 9, 1973 :
À partir de 1973, la série « Uncommon Places » se distingue d' »American Surfaces » par l’utilisation d’une chambre photographique grand format au lieu d’un petit appareil 35 mm. Bien que l’artiste reste attiré par l’esthétique du « snapshot », ces nouvelles images, prises avec un dispositif plus contraignant, sont plus statiques et souvent frontales. Les sujets, cependant, restent les mêmes : une station-service, un parking ou un drive-in, tous liés aux déplacements en voiture. Il s’agit toujours de représenter ce paysage transitoire si particulier : le bord de route.
L’exposition se termine par la série « Topographies », réalisée entre 2020 et 2021. À 76 ans, Stephen Shore continue de s’intéresser aux nouvelles technologies photographiques. Depuis 2020, il expérimente avec des appareils montés sur drone. La dimension documentaire de ces images demeure primordiale pour lui. Il veille à ne pas photographier totalement à la verticale pour éviter une trop grande abstraction, tout en étant attentif à la position de l’horizon et à la hauteur de l’appareil, différente de celle d’un avion de loisirs ou de ligne. Comme il l’avait fait avec la voiture, il explore le paysage américain dans ce qu’il a de plus typique. Le véhiculaire devient pour lui une méthode d’exploration du vernaculaire.
L’exposition « Stephen Shore, Véhiculaire et Vernaculaire » à la Fondation Henri Cartier-Bresson offre une immersion captivante dans l’univers d’un artiste qui a su élever les scènes les plus ordinaires au rang de moments de contemplation, révélant ainsi la richesse esthétique et culturelle du quotidien américain.
Mathilde Rocchietta
Du 1er juin au 15 septembre 2024
Fondation Henri Cartier-Bresson, 79 rue des Archives, 75003 Paris.
Du mardi au dimanche de 11h à 19h.