Kaléidoscopes — Cuba : Regards Contemporains

La Galleria Continua accueil sur son site des Moulins en Seine-et-Marne une exposition poignante dédiée à l’art moderne cubain. Kaléidoscopes – Cuba : Regards Contemporains donne à vingt-cinq artistes l’opportunité de s’exprimer à travers la singularité de leur médium. Le message est fort, politique, pacifique et poétique.

L’exposition s’étend au sein du Moulin de Boissy, immense espace de plus sept mille mètres carrés, anciennement usine de papeterie qui fait office aujourd’hui de galerie d’art moderne. L’architecture industrielle du bâtiment est un terrain de jeu communiquant formidablement bien avec les œuvres et la nature environnante.

La visite est libre, conçue comme une promenade à laquelle il faut se laisser surprendre par les œuvres. Derrière une porte, au milieu de l’espace, accrochées au mur ou bien sur le sol, elles font parfois corps avec le lieu. Ce sont elles qui nous trouvent et résonnent selon la lecture que l’on en fait.

Ce sont dix artistes natifs de Cuba et quinze autres attachés à l’île des Caraïbes qui délivrent chacun à leur manière leurs visions et leurs préoccupations, souvent liées à l’histoire de ce pays malmené. La mixité des générations des artistes, allant de 30 à 93 ans, et de l’ancienneté des œuvres, de 1970 à nos jours, construisent un panorama pluriel capable de dépasser toutes les frontières.

Parmi les artistes, Yoan Capote expose un drapeau cubain et un drapeau américain côte à côte. Les couleurs de ces drapeaux ont disparu et laissent la place à un triangle et à un rectangle de béton surmontés d’armatures en fer, telles des barreaux. Cette œuvre fait référence à l’embargo mené par les États-Unis qui a enfermé l’île dans une sorte de prison.

Faute d’avoir les moyens d’acheter du matériel artistique à ses débuts, Osvaldo González s’empare d’adhésif marron, l’exploite à sa manière et invente son art. Grâce à cet outil, il fait des installations monumentales ou bien, il réalise des tableaux en superposant les couches de scotch afin de créer les ombres et les lumières. Cela prodigue l’illusion incroyable d’une photographie d’architecture.

Les peintures abstraites de Joaquín Ferrer, présentées dans un écrin au milieu de l’espace, sont une respiration poétique. Les formes et les lignes s’entremêlent et laissent libre cours à l’imagination et aux sensations.

Puis, place à la colossale tornade de José Yaque, faite de déchets récoltés çà et là. Formation météorologique courante à Cuba, elle décime les habitations et démunit ses habitants qui doivent recommencer à zéro tout ce qu’ils avaient jusque-là construit.

Tant d’autres artistes sont à découvrir comme Yoan Capote et son tableau représentant la mer au large où l’espoir de s’évader est permis. Mais les milliers d’hameçons apposés sur la toile nous en rappellent tous les dangers. Ou alors, juste à côté, une des œuvres majeures de Michelangelo Pistoletto, artiste italien profondément attaché à Cuba, Spazio Libero, une grande cage invite à la réflexion sur la notion de liberté. Carlos Martiel, lui, délivre une performance marquante, immortalisée en photo, il perfore sa chair pour démontrer sa révolte envers les pays responsables de la situation politico-économique actuelle.

Parce qu’il y a aussi de la couleur, de la joie, Waldo Balart, artiste de 93 ans, avec ses tons très vifs peints géométriquement, rappellent ceux à la manière de Mondrian. 

Cette exposition collective révèle notamment comment l’histoire individuelle de chaque artiste est profondément ancrée dans l’histoire de Cuba, commune à tous. Transformer l’injustice, la révolte, la misère, la survivance en joie, en poésie, en espoir, en une recherche d’utopie et atteindre la délivrance.

Les artistes présentés : Juan Carlos Alom, Waldo Balart, Alejandro Campins, Ivan Capote, Yoan Capote, Laura Carralero, Yaima Carrazana, Elizabet Cervino, Ariamna Contino & Alex Hernandez, Raul Cordero, Jenny Feal, Joaquin Ferrer, Diana Fonseca, Carlos Garaicoa, Rocio Garcia, Flavio Garcianda, Osvaldo Gonzalez, Luis Lopez-Chavez, Carlos Martiel, Enrique Martinez Celaya, José Mesias, Yanelis Mora, Michel Perez Pollo, Susana Pilar, MIichelangelo Pistoletto, José Yaque.

Mathilde Seng – texte et photos

Du 23 juin au 20 octobre 2024

Galleria Continua / Les Moulins, 46 rue de la Ferté Gaucher, 77169 Boissy-le-Châtel

Du mercredi au dimanche de 12 h à 18 h – Entrée libre

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