Du rêve en mosaïque au musée national Marc Chagall et au musée de Vence

Du 24 mai au 22 septembre 2025, sous le commissariat général de Anne Dopffer et de 3 ans de préparation, le musée national Marc Chagall à Nice révèle une facette peu explorée du génie visionnaire. De verre et de pierre, Chagall en mosaïque retrace pour la première fois l’intégralité de ses créations monumentales composées entre 1958 et 1986. Quatorze œuvres, réparties entre les collines azuréennes, les rivages du lac Léman et les gratte-ciels de Chicago, s’assemblent ici comme un puzzle d’images lentement recomposées de plus d’un million quatre cents milles tesselles.

À rebours d’un simple hommage, l’exposition orchestre une traversée sensible et érudite dans le monde fragmenté d’un artiste qui, revenu de l’exil et des ruines de l’histoire, trouva dans la mosaïque un nouvel alphabet pour réenchanter le réel. En partenariat avec les musées nationaux du XXe siècle des Alpes-Maritimes, du 14 juin au 2 novembre 2025, le musée de Vence – fondation Émile Hughes, magnifie cette approche inédite en proposant dans son superbe écrin tout juste rénové l’exposition Chagall, les années vençoises, une renaissance méditerranéenne.

Ici le bleu siffle comme le bleu céruléen… dans le rose, il faut être musical !

À Vence, où il s’installe en 1949 après la guerre et l’ombre portée de l’exode américain, Chagall choisit de parler à la pierre, à la lumière et à la couleur avec des outils d’artisan et une approche prophétique. La mosaïque, au même titre que la tapisserie, la céramique ou le vitrail, devient pour lui non pas une diversion technique mais une langue sacrée. Cette matière ancienne, patiente, rugueuse, lui permet de faire vibrer ses visions dans l’espace public, de poser ses songes sur les murs, d’ancrer les métaphores dans la matière brute. Rien d’ornemental, tout est nécessité. Les compositions se parent de pierres taillées, de tesselles de verre, de mortier, un alphabet archaïque et flamboyant, fait pour durer, pour résister aux effacements du temps. Ce langage minéral, Chagall l’apprivoise en dialogue étroit avec les mosaïstes, Lino et Heidi Melano, Michel Tharin, dans une alliance féconde entre tradition artisanale et élans contemporains.

Conçue avec le Grand Palais RMN et le museo d’arte de Ravenna, ce parcours explore cette alchimie créative à travers vingt-cinq études préparatoires, dessins, esquisses et maquettes, parmi lesquelles celle, inédite, du Char d’Élie, acquise récemment et présentée pour la première fois aux côtés de l’œuvre définitive installée en 1970 dans le musée même. Ce vis-à-vis rare constitue l’un des sommets du parcours, offrant un regard intime sur la genèse d’une œuvre spirituelle, où l’élan mystique se traduit par des juxtapositions de textures, de rythmes, de vibrations chromatiques.

Quelques pièces originales de mosaïque, déplacées exceptionnellement, témoignent de la puissance physique de ces œuvres nées pour l’architecture, pour l’espace, pour la lumière. Car la mosaïque n’est pas chez Chagall une surface. Elle est volume, souffle, écho et naît de chatoyants textiles. On pénètre dans ses créations comme dans une nef. Le regard y flotte, suspendu, porté par l’éclat des matières, par la densité du sens. La scénographie, immersive et généreuse, prolonge ce sentiment d’habiter un monde recomposé. De grandes photographies des œuvres in situ viennent rappeler leur insertion dans des lieux vivants, réels, traversés.

Le parcours se double de dispositifs tactiles permettant d’approcher concrètement cette technique millénaire : toucher les matières, percevoir la rugosité des surfaces, comprendre les gestes du mosaïste. Ce sont là des passerelles sensibles vers l’œuvre, offertes notamment aux enfants, aux familles, aux personnes déficientes visuelles.

En octobre 2025, l’exposition se déploiera à Ravenne, ville palimpseste où les mosaïques byzantines racontent depuis des siècles l’irruption du sacré dans la pierre. Un dialogue s’instaurera alors entre les ors de San Vitale et les bleus éthérés de Chagall, entre deux spiritualités, deux écritures, deux visions du monde.

Incluant la faculté de droit et de sciences politiques de Nice, l’école de la Fontette à Saint-Paul de Vence, la cathédrale Notre-Dame-de-la-nativité à Vence, la chapelle sainte Roseline à Les-Arcs-Sur-Argens, ce fabuleux parcours d’expositions n’aurait pu voir le jour sans une équipe de passionnés travaillant main dans la main dont Anne Dopffer, commissariat général et directrice des musées nationaux du XXe siècle des Alpes-Maritimes, Gilles Vernus, adjoint à la culture et aux arts de la très dynamique ville de Vence ainsi que Jean Iborra, directeur du musée de Vence.

Ne repartez pas sans les catalogues d’exposition !

Valmigot

Du 24 mai au 22 septembre 2025 : De verre et de pierre, Chagall en mosaïque

Musée National Marc Chagall, Avenue Dr Ménard, 06000 Nice

Ouvert tous les jours sauf le mardi de 10h à 18h du 2 mai au 31 octobre – Gratuit pour les moins de 26 ans -Le billet d’entrée inclut l’accès à la collection permanente et un audioguide

www.musee-chagall.fr

du 14 juin au 2 novembre 2025 : Chagall, Les années vençoises, Une renaissance méditerranéenne

Musée de Vence – Fondation Émile Hughes, 2, place du Frêne, 06140 Vence

Ouvert tous les jours sauf le lundi de 11h à 18h – Entrée libre –

www.museedevence.fr