Marion Bierry réveille Le Menteur avec éclat

Il y a des textes qui traversent les siècles sans perdre leur éclat. Le Menteur de Corneille fait partie de ceux-là. Mais il faut saluer l’audace et l’intelligence de Marion Bierry, qui signe au Théâtre de Poche-Montparnasse une mise en scène brillante, musicale et follement vivante, redonnant à cette comédie du XVIIᵉ siècle toute sa fraîcheur.

Relue pendant le confinement, la pièce s’est enrichie de plages musicales savoureuses, parfois proches de la comédie musicale, sans jamais trahir l’esprit du texte original. Au contraire, ces ajouts rendent la pièce plus agile, plus légère, et soulignent l’intemporalité de cette histoire de mensonges, de duperies et de jeux amoureux. On a le sentiment de redécouvrir Corneille sous un jour inattendu, plus joueur, presque malicieux.

Au centre de l’intrigue : Dorante, jeune homme à peine revenu de ses études, déterminé à profiter des plaisirs de Paris. Pour briller auprès de deux coquettes croisées aux Tuileries, il s’invente un passé glorieux de héros militaire. Un mensonge en appelant un autre, Dorante s’enfonce dans un engrenage jubilatoire de quiproquos et de faux-semblants. L’interprète – Alexandre Bierry – est absolument excellent : agile, manipulateur, charmeur, il retombe toujours sur ses pieds avec une aisance désarmante.

Autour de Dorante se déploie une galerie de personnages savoureux qui nourrissent l’humour de la pièce. Alcippe, avec ses emportements jaloux et tragi-comiques, offre parmi les moments les plus drôles. S’ajoutent des pères prompts à s’indigner, des jeunes femmes plus stratèges qu’il n’y paraît, et un valet dont la clairvoyance contraste délicieusement avec les extravagances de son maître. De quiproquos en faux-semblants, chacun participe à cette mécanique comique irrésistible. Cette précision dans le comique, toujours sur le fil, donne au spectacle un rythme vif qui ne faiblit jamais.

On sort de la salle avec le sourire, emporté par un spectacle joyeux, pétillant, savoureux, où la grâce de Corneille rencontre l’impertinence douce de Marion Bierry. Un Menteur qui fait du bien, et qui rappelle que le théâtre peut encore être une fête.

Carla Boyer

Le Poche-Montparnasse, 75 boulevard du Montparnasse 75006 Paris

Du mardi au samedi à 21h, Dimanche à 17h

Jusqu’au 23 novembre 2025

https://www.theatredepoche-montparnasse.com/