Plus de 1 100 sources internationales ont été analysées pour la création de La Liste 2026, qui dévoilait le 24 novembre dernier son classement des 1000 meilleurs restaurants du Monde – en plus de célébrer son 10ème anniversaire.

La Liste est une entreprise privée indépendante, financée exclusivement par des partenaires privés, qui ne vend pas de données d’utilisateurs et défend une approche objective, transparente et mondiale de la gastronomie.
Son classement devient au fil des éditions bien davantage qu’une énumération de grandes tables. Il est élaboré par agrégation grâce à un algorithme de plus d’un millier de guides, article, blogs et avis en ligne et suivant 38 000 établissements sur 200 pays, près de 8000 hôtels et entre 5 et 6000 pâtisseries. Il bénéficie du soutien du Quai d’Orsay, où le diner de gala était programmé le soir-même.
L’auditorium de la Société de Géographie, à Paris, où les journalistes étaient conviés à entendre les résultats était fort animé. La plupart des chefs invités avaient déjà pris place dans les gradins, échangeant des poignées de mains chaleureuses et sans doute quelques confidences sur leurs appréhensions. Parce que même si ce classement est sans nul doute moins arbitraire que d’autres on devine l’importance des enjeux à se maintenir parmi les premiers, ou à gagner en reconnaissance pour ceux qui n’étaient pas encore dans le podium de tête l’année précédente.

L’annonce a été faite à par Philippe Faure, Fondateur et CEO, Hélène Pietrini, Directrice Générale, Jörg Zipprick, Co-fondateur et Rédacteur en chef et Stéphanie Kim, Directrice Internationale.
Un seul chef français figure parmi les dix meilleurs mondiaux, tous ex-aequo à la première place. C’est Guy Savoy qui, avec une note de 99,5/100, grimpe pour la neuvième fois sur la première marche du podium.
Il est aussi le seul cuisinier à siéger à l’académie des Beaux-arts. En élisant Guy Savoy, l’Académie des beaux-arts a non seulement salué l’un des plus éminents représentants de la gastronomie française mais aussi un humaniste et passionné d’art contemporain qui contribue au rayonnement international de notre pays, ainsi que l’a démontré son engagement pour l’inscription du repas gastronomique au patrimoine immatériel de l’Unesco, avait déclaré Laurent Petitgirard, secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts le jour de son élection en novembre 2024, au fauteuil V de la section des membres libres.
Il occupe la première place de La Liste avec Le Bernardin (New York), Schwarzwaldstube (Baiersbronn, Allemagne), Lung King Heen (Hong Kong), Cheval Blanc by Peter Knogl (Bâle), Matsukawa(Tokyo) et SingleThread (Healdsburg, USA), Da Vittorio (Brusaporto, Italie), Martin Berasategui (Lasarte-Oria, Espagne) et Robuchon au Dôme (Macau, Chine).
Mais on notera la présence de 13 tables françaises sur les deuxième et troisième marches du podium.
Sur la seconde marche on trouve La Vague d’Or à Cheval Blanc (Saint-Tropez), premier l’an dernier, qui perd 0,5 point, tout comme Plénitude (Paris 1er). Les deux restaurants d’Arnaud Donckele partagent le podium avec 16 autres restaurants, dont les Français Kei (Paris 1er), L’Assiette Champenoise (Tinqueux), Régis et Jacques Marcon (Saint-Bonnet-le-Froid), ainsi que le Louis XV Alain Ducasse à Monaco.
En troisième position, à 98,5/100, six autres chefs français : La Marine (Noirmoutier-en-l’Île), Le Pré Catelan (Paris 16e), L’Oustau de Baumanière (Les-Baux-de-Provence), Maison Pic (Valence), le Pavillon Ledoyen Yannick Alléno (Paris 8e) et Le Bois sans feuilles – Troisgros (Ouches).

Une quinzaine de prix spéciaux, avec parfois une double sélection, France et international, ont également été remis à des chefs dont les visages sont apparus brièvement sur le grand écran de l’auditorium.
Parmi eux, celui de talent de l’année à Bertrand Noeureuil (L’Observatoire du Gabriel, Bordeaux), de pâtissier à Léandre Vivier (Le Baudelaire) et de salle et sommellerie à Denis Courtiade (Plaza Athénée). Le Pays basque est la destination France à suivre – représentée par la Table des frères Ibarboure à Bidart. Cybèle Idelot de La Ruche – domaine Les Bruyères (Gambais) reçoit le prix de la responsabilité éthique et environnementale, Casa Amor (Saint-Tropez et Dubaï), celui du restaurant festif et Clément Bouvier, celui de l’authenticité et l’artisanat pour le Panoramic (Tignes).
Parmi les nouvelles tables françaises primées, Prévelle de Romain Meder (Paris 7e) et l’Arrêt by the Grey de Mashama Bailey et Johno Morisano (Paris 7e).
Le prix des Tables à Explorer 2026 décerné par La Liste honore les restaurants qui méritent d’être découverts pour la singularité de leur expérience gastronomique et l’interprétation inspirée de leur terroir ou culture.
On remarque 5 tables françaises parmi les dix lauréats : Benjamin Schmitt (Paris 9e), Le Valucien (Vault-de-Lugny), La Table de la Butte de Nicolas Conraux (Plouider), Ombellule du couple Mey (Lyon), et Laurent Chabert(en photo ci-dessus), le chef de L’Art de Vivre, le restaurant gastronomique du Château L’Hospitalet, route de Narbonne-Plage, à Narbonne précédemment distingué par une étoile verte Michelin, et très heureux de la reconnaissance ainsi accordée au travail qu’il y effectue depuis 11 ans avec son équipe.
John Williams du MBE The Ritz London, Royaume-Uni reçoit le Prix de l’excellence classique. Le Bayview de Michel Roth et Danny Khezzar à Genève (note de 88) est doublement distingué puisque son chef, Danny Khezzar, qui y est chef depuis mai 2023 a été élu Talent de l’Année 2026. L’établissement brille d’une étoile Michelin, et d’une note de 18/20 au Gault & Millau.
Malgré cette distinction le jeune chef reste modeste, heureux de pouvoir exercer un « métier de passion », estimant qu’il n’a pas encore mis au point son plat-signature, qu’il aimerait voir s’approcher du gratin dauphinois transparent de son arrière-grand-père, chef chez Lucas Carton.
Le prix de la « rayonnance gastronomique » revient cette année au chef Daniel Boulud, installé à New York depuis plus de quarante ans, notamment à la tête du restaurant étoilé Daniel. Manifestement ému et heureux le plus américain des chefs français, qui est aussi le plus français des new-yorkais, n’a pas caché sa joie : « Je n’avais jamais eu un prix qui me félicite sur le travail que j’ai fait pour la cuisine française à l’étranger ».
La Liste a aussi distingué des chefs étrangers, comme Santiago Muñoz (ci-dessus de passage à Paris) qui a fondé Maizajo en 2016 dans le quartier de la Condesa, à Mexico. Sa spécificité tient à sa volonté de mettre en valeur les variétés indigènes de maïs et la fabrication artisanale de tortillas à partir de nixtamal.
Sa carte met à l’honneur la cuisine mexicaine traditionnelle, revisitée avec des ingrédients locaux et des techniques modernes et démontre que la cuisine de rue peut aussi avoir sa place dans un cadre plus raffiné. Il prépare dans son restaurant des tacos de qualité, avec des viandes telles que le rib-eye, la longaniza ou le brisket, ainsi que par ses spécialités comme les volcanes et les gorditas.
Cet article ne serait pas complet sans la célébration d’un plat gastronomique, en l’occurence le plat signature de Guy Savoy, la soupe d’artichaut à la truffe noire, et parmesan, brioche feuilletée aux champignons que certains privilégiés ont pu déguster avant la proclamation des résultats.

La Liste a également dévoilé les dynamiques structurantes pour 2026 parmi lesquelles on note l’influence déterminante des pays nordiques en matière de haute cuisine contemporaine, s’appuyant sur un écosystème solide : innovation, design, excellence technique et une vision long-terme largement soutenue par les acteurs publics et privés.
La Suisse, l’Allemagne, l’Autriche, le Royaume-Uni et l’Italie du Nord enregistrent une progression constante et s’affirment comme les forces tranquilles de l’Europe.
La Liste identifie une conséquence directe de la « Gastrocalypse » : la haute gastronomie a survécu, mais au prix d’une fatigue structurelle. La notion traditionnelle de « grand restaurant » se transforme profondément, marquée par la casualisation du luxe et un retour à la nostalgie de la simplicité.
Les données collectées confirment aussi la montée en puissance asiatique. le temps de l’exotisme bon marché est révolu et des groupes hôteliers tels que Shangri-La et Mandarin Oriental investissent massivement dans la haute gastronomie chinoise.
Les États-Unis continuent d’imposer un modèle fondé sur l’hybridation entre gastronomie et créativité entrepreneuriale, tandis que le Moyen-Orient (Dubaï, Riyad, Doha) façonne un marché où hospitalité internationale, architecture spectaculaire et budgets ambitieux redéfinissent la notion de destination gastronomique.
L’un des phénomènes marquants du classement 2026 est la progression des restaurants intégrés à de grands hôtels indépendants ou internationaux. Portés par des budgets solides et une vision globale de l’expérience client, ils transforment la table en destination et redéfinissent le rapport entre hospitalité, culture et haute cuisine : si auparavant on allait chez un chef, c’est aujourd’hui l’expérience qui est recherchée.
On peut dire en conclusion que La Liste 2026 révèle une réalité en pleine mutation : la gastronomie mondiale n’a jamais été aussi fragmentée, mobile et créative. Entre héritages réinterprétés, affirmation asiatique, mutation économique et rigueur technique européenne, le centre de gravité du goût se déplace et se recompose.





La Liste est décidément le guide le plus sélectif au monde pour les gourmets et les voyageurs exigeants. Retrouvez l’intégralité de son classement sur www.laliste.com/fr
Marie-Claire Poirier
Photos ©Marie-Claire Poirier
