“Mais quand s’arrête-t-on d’écrire ?” telle est la grande question qui taraudait Colette, et constitue la source de chacun de ses écrits. Comme si l’écriture était une pulsion pour elle, la raison de sa vie et sa raison de vivre.
L’écrivaine née en 1873 et morte en 1954 s’est distinguée de ses contemporains par son style épuré, toutefois caractérisé par la finesse des mots choisis. Aussi par la force de ses romans, souvent en faveur des femmes, plus particulièrement de leur droit à une sexualité pleinement libérée.
C’est ainsi que la pièce Colette, l’incorrigible besoin d’écrire, nous invite à comprendre les processus d’écriture de la célèbre écrivaine française, comment traduisait-elle en mots ses pensées, et surtout quelles ont été ses plus grandes inspirations ?
Colette écrivait des autofictions, ses romans étaient inspirés de sa vie, de son enfance et de son entourage.
En ignorant volontairement la vie sulfureuse et libérée de Colette, la comédienne et metteuse en scène Nathalie Prokhoris nous mène à la rencontre de la personnalité originale de la romancière, de sa vocation pour l’écriture à l’influence de son enfance sur cette dernière.
Si la comédienne a tenu à rendre hommage aux écrits de l’écrivaine c’est parce qu’elle évoque cette dernière ainsi : « Colette est et reste étonnamment contemporaine, et c’est cette parole-là, prise dans le mouvement même de la vie, avec ce qu’elle contient d’insaisissable, que j’ai souhaité donner à entendre. »
Le spectateur est alors guidé par cette douce voix jusqu’à entrer dans l’antre de Colette, assise seule par terre, dans une pièce pauvre en meuble mais dont la chaleur et l’inspiration sont symbolisées par une unique lampe. Des papiers jonchent le sol, Colette les relis puis les déchire devant ses spectateurs. Un désordre se dessine, tant dans l’esprit de l’écrivaine qui peine à trouver le meilleur mot, que sur ce tapis où elle se tient en tailleur, où les pages sont des brouillons apparemment chaotiques.
On assiste alors, dans la justesse du jeu de Nathalie Prokhoris et grâce aux lignes des écrits de Colette, à l’émulsion créative de cette dernière ou la naissance de ses romans. La metteuse en scène qui est aussi l’unique comédienne a réuni pour cette pièce plusieurs textes de Colette comme la Maison de Claudine, le Képi ou encore l’Entrave.
Ainsi, l’écrivaine se livre, se remémore et se perd dans les souvenirs de son enfance. On croit la voir dans la maison familiale de sa Bourgogne natale, perdue entre la tendresse d’une mère « Sido », femme féministe et indépendante, et la présence mélancolique d’un père militaire, amoureux des mots. Ces deux tempéraments marqueront durablement Colette, qui n’est alors qu’une enfant. Période durant laquelle, son caractère contestataire la prive d’un intérêt pour l’écriture, jusqu’à ce que sa famille devienne la raison mais aussi l’inspiration première de son goût pour les mots.
Si Colette n’a cessé de prôner son incorrigible liberté, elle demeurera toute sa vie astreinte à la dictature du mot juste, celle que son esprit perfectionniste lui imposera, faisant de ses romans des déclarations d’amour à la langue française.
C’est une pièce délicate, sensible, sincère et intimiste. Si la comédienne parvient à éclairer l’enfance de la célèbre écrivaine, il s’agit plus encore d’un profond hommage à cette période insouciante, aux empreintes qu’elle laisse sur les adultes que nous sommes, et plus simplement une ode à l’amour de l’écriture qui éclot sous nos yeux.
Lou Brunet
Photos du théâtre
Jusqu’au 2 mars 2024, les vendredi et samedis à 19h30
À la Folie Théâtre, 6 rue de la Folie Méricourt, 75011 Paris.
• Tarifs : Plein 22€ Réduit 16€
• Adapté par Nathalie Prokhoris. Mise en scène Nathalie Prokhoris, en collaboration avec Marie-Paule Ramo. Avec Nathalie Prokhoris. Direction d’actrice Christine Culerier