Country Life – Chefs-d’œuvre de la collection Paul Mellon
Ne vous étonnez pas d’entendre dès l’entrée du musée, des hennissements…. Il suffit de les suivre et – oui – nous arrivons bien dans des écuries ! ou plutôt, une reconstitution. Le musée a fait appel au directeur de la Décoration de la maison Hermès, Antoine Platteau, qui a imaginé une scénographie inspirée de l’écurie du milliardaire dans son domaine d’Oak Spring afin de faire honneur au goût de ce dernier pour les loisirs équestres. Quoi de mieux pour abriter la sélection des 41 œuvres présentées qui retrace la passion des Mellon pour les chevaux, les sports équestres, les divertissements et l’art de vivre en plein air ?
Incroyables collectionneurs, issus d’une famille de philanthropes et héritiers d’une immense fortune, ils consacrent une part importante de leur vie à l’art et aux musées. Du British art au post-impressionnisme, de Géricault à Delacroix, de Stubbs à Degas, en passant par les paysages de Monet, Caillebotte ou Seurat, l’exposition révèle l’intérêt de ces remarquables collectionneurs pour l’anglomanie et la peinture impressionniste. Au total, ce sont 41 œuvres du Virginia Museum of Fine Arts dédiées au Sporting Art (courses de chevaux, chasse à courre), aux scènes de loisirs et de vie en plein air qui seront présentées.
L’accrochage insiste sur l’œuvre d’un peintre anglais majeur, George Stubbs (1724-1806). C’est ce dernier qui donna ses lettres de noblesse au sporting art. Ses portraits de chevaux constituent l’un des points d’orgue de cette présentation.
L’exposition s’organise de manière thématique. Elle consacre ses différentes sections à la représentation du paysage et aux scènes de loisirs de plein air, aux portraits de chevaux et de leurs lads, à la représentation de scènes de chasse ou encore à celle des courses : − Les paysages de Monet, Dufy, Morisot, van Dongen et Caillebotte − Les portraits de chevaux avec les tableaux de Wootton, Stubbs, Delacroix − La chasse avec les œuvres de René Princeteau et Benjamin Marshall − Les courses sont évoquées par les tableaux d’Edgar Degas, Bonnard, Munnings et Géricault
En Angleterre, dès la fin du xviiie siècle, les sports équestres connaissent un remarquable développement (courses, chasses à courre). Paradoxalement, cela coïncide avec le moment où l’industrie naissante tend à imposer la victoire des chevaux-vapeur sur leurs compétiteurs animaux. Un genre artistique, particulièrement bien représenté dans l’école anglaise, la sporting painting reflète cet engouement du groupe social dominant. Celui-ci va essaimer son modèle culturel vers les autres nations occidentales au gré du courant d’anglophilie qui caractérise le xixe siècle. De ce côté-ci de la Manche, les peintres français, impressionnistes notamment, témoignent d’un autre aspect de la vie à la campagne. Ils révèlent comment, à proximité des villes, l’espace rural est investi par la petite bourgeoisie qui s’y adonne aux loisirs de plein air prônés par les théories hygiénistes.
Poursuivant la tradition familiale, le milliardaire et amateur d’art Paul Mellon (1907-1999) a collectionné avec passion. De manière symptomatique, les œuvres qu’il a rassemblées traduisent son attachement à un mode de vie en voie d’extinction. Certes, Mellon est lié à la tradition anglaise par sa mère, mais son héritage paternel l’assimile au monde de l’industrie et de la finance américain. Doté d’immenses moyens et voué à une vie sociale dans le milieu des affaires, il fait le choix d’une certaine ruralité. Avec Bunny, son épouse, ils vont s’appliquer à transposer au cœur de la campagne de Virginie le mode de vie des gentlemen farmers. Dans leur domaine d’Oak Spring, Bunny donne libre cours à son goût pour le jardinage tandis que Paul élève des chevaux de course. Saturant les murs du cottage, leur collection de peintures illustre cette relation rêvée à la nature, aux antipodes de l’agriculture industrielle qui, au même moment, transforme radicalement le paysage rural
Jusqu’au 2 décembre 2018
Musée de la chasse et de la nature
62, rue des Archives
75003 Paris
du mardi au dimanche de 11h à 18h. Nocturnes les mercredis jusqu’à 21h30. Fermé le lundi et les jours fériés
photos in situ : Véronique Grange-Spahis