Découvrir la vie au travers d’une charogne
Alors que le bicentenaire de Charles Baudelaire était célébré en avril dernier, L’Iconoclaste nous propose de découvrir l’étonnant roman en vers libres de Clémentine Beauvais, intitulé Décomposée, dont l’intrigue trouve racine au sein de l’œuvre du célèbre poète.
Peut-être connaissez-vous le texte Une charogne de Charles Baudelaire au cœur duquel le poète s’émerveille du spectacle morbide auquel il a assisté, alors qu’il se promenait avec sa muse Jeanne Duval : celui d’un cadavre en décomposition.
C’est à partir de ce texte que l’autrice de Décomposée nous invite à nous interroger sur la vie de cette femme, Grâce, devenue charogne sur son lit de verdure. Clémentine Beauvais dresse en dresse le portrait, celui d’une femme aux multiples visages, couturière, prostituée et tueuse en série, tout autant qu’amie, sœur et amante. C’est surtout le portrait d’une vie, celle d’une femme forte, avant d’être devenue charogne.
Fruit d’une réflexion autour du regard porté sur la déchéance féminine, ce roman s’inscrit dans volonté de réhabilitation de l’image de ces nombreuses femmes mises au ban de la société durant l’Histoire. Par un verbe moderne et singulier, l’autrice parvient à nous émerveiller tout en nous horrifiant par la même occasion, simultanément. Par un regard neuf, nous redécouvrons cette délectation morbide que fut celle de Baudelaire deux siècles auparavant, plaçant cette fois-ci la femme au premier plan. Laissez-vous charmer par la douceur de ces mots :
« Je pourrais difficilement mieux l’aimer,
Ma tombe sous le ciel,
Cette dernière amante,
Si c’est de notre amour à nous que je la hante… »
Comme l’illustre bien le propos de l’autrice inscrit dans son roman, nous partons dans cette œuvre à la rencontre des « petites voix coincées dans les interstices d’autres textes ». Cette œuvre littéraire n’est pas la première de Clémentine Beauvais, autrice à succès de romans pour enfants et jeunes adultes, dont le travail a été récompensé par de nombreux prix.
Julie Goy
Décomposée de Clémentine Beauvais
Collection L’Iconopop – Éditions L’Iconoclaste
2021 – 246 pages – 13€