Fløtyll : les cabanes flottantes d’un songe sur le lac du Der

Au cœur de la Champagne humide, là où le vent froisse les roseaux et où les grues cendrées dessinent des calligraphies dans le ciel, un rêve s’est amarré aux rives paisibles du lac du Der. Son nom : Fløtyll. Sa promesse : habiter l’eau, non plus comme un passant, mais comme un hôte discret, à l’écoute du silence et du ciel.

Le 3 juin 2025, ce rêve a pris forme tangible. Trois lodges flottants, élégants et solaires, ont pris le large depuis le port de Nemours, tels de petits havres nomades, offerts à celles et ceux qui veulent dormir avec les étoiles pour toit et les reflets pour voisinage.

Pensés comme une alternative originale aux hôtels et campings traditionnels, ces lodges misent sur une mobilité douce et sans permis bateau, accessible à tous. Flottant sur l’eau, ces structures légères intègrent des technologies propres, favorisent une empreinte carbone minimale, et s’implantent de manière respectueuse au sein de leur environnement naturel.

L’élégance de la simplicité

À bord, tout est équilibre. Le bois blond des parois, les lignes sobres, la douceur des étoffes : tout ici parle la langue du repos, celle qu’on n’entend plus dans nos vies saturées de vitesse. On n’y vient pas pour briller, mais pour se retirer du tumulte, pour écouter l’eau, les ailes, le vent, et peut-être, se réécouter soi-même.

Les lodges ne s’ancrent pas, ils glissent, portés par des moteurs électriques silencieux, sans heurt, sans trace. Aucune écope dans la vase, aucun cri de moteur :  Fløtyll respecte le lac comme un hôte délicat respecte la maison qu’il visite. Ici, l’empreinte est légère, presque réversible. Le temps lui-même semble plus fluide, suspendu entre deux rives de lumière.

Vivre dans le paysage

Depuis la terrasse, on observe la brume du matin se lever comme un rideau sur un décor de carte postale. Les hérons y sont les figurants paisibles d’une scène lente, méditative. Le soir venu, les couleurs s’éteignent doucement, comme si la nature elle-même baissait la lumière pour mieux nous inviter à la contemplation.

À l’intérieur, les lodges sont de véritables petites maisons flottantes : deux chambres pour accueillir familles ou amis, un séjour (avec canapé convertible) ouvert sur une cuisine discrète mais fonctionnelle, deux salles d’eau. Tout est pensé pour le confort, mais sans ostentation. L’élégance du simple, la noblesse du juste.

6 couchages, 32 m2 de surface habitable, 32 m2 de rooftop, 2 panneaux solaires de 2m2, 50 cm de tirant d’eau, 2,5 m de tirant d’air, 10 tonnes à vide.

Un service de conciergerie est à disposition en partenariat avec des prestataires locaux : livraison de produits locaux, Balades guidées autour du lac (ornithologie, photographie, patrimoine), dégustations chez des producteurs de champagne ou de spécialités régionales, sorties à vélo ou à cheval, ateliers nature pour les enfants, stages de pêche, location de voiliers

Une idée née du silence

C’est Antoine Bresson, ancien ingénieur naval tombé amoureux du lac, qui a porté ce projet comme on couve une idée folle – tendre et persistante. Il voulait une cabane sur l’eau, mais pas une de plus. Une cabane qui change la manière d’habiter un territoire, de s’y inscrire sans l’abîmer.

 Fløtyll est né de ce paradoxe : être chez soi sans posséder, s’installer sans déranger, vivre sans prélever. Chaque lodge est un manifeste de sobriété technologique : matériaux durables, autonomie énergétique, zéro rejet, mobilité douce. Un pas de côté dans l’univers du tourisme, plus proche du poème que du produit.

Un territoire en écho

Le lac du Der n’est pas un décor choisi au hasard. Plus grand lac artificiel de France, il a été lui-même une invention de l’homme, mais il est devenu un sanctuaire pour des milliers d’oiseaux migrateurs (réputé notamment pour l’observation des grues cendrées) ainsi que d’innombrables espèces aquatiques et végétales. Une respiration pour les humains.

En s’y ancrant (ou plutôt en s’y laissant dériver), Fløtyll dialogue avec ce lieu hybride, entre eau douce et mémoire de terre, entre biodiversité fragile et paysages sans cesse changeants. Le tourisme y devient partie prenante, acteur modeste d’une grande symphonie naturelle.

Premiers pas, grands horizons

Pour l’heure, seuls trois lodges sillonnent les eaux tranquilles. Une base pilote, un laboratoire d’expériences. Les premiers visiteurs parlent de parenthèses enchantées, de nuits bercées comme en enfance, de réveils sans agenda, où seul le soleil commande le rythme.

Mais Fløtyll ne compte pas en rester là. Déjà se dessinent des perspectives de réplication douce : sur d’autres lacs français, peut-être européens. Un réseau de lodges flottants, comme autant de points de suspension sur la carte du tourisme lent.

Les ambitions sont vastes, mais l’ancrage reste modeste. Chaque extension se fera au rythme du territoire, en partenariat avec les acteurs locaux, les habitants, les saisons.

Une autre manière de voyager

À l’heure où le voyage est souvent devenu une course, Fløtyll propose un temps d’arrêt. Une respiration. Pas un séjour, mais une expérience poétique, une manière de se redonner au monde, l’espace de quelques jours.

Et si voyager, demain, c’était cela ? Ne plus accumuler des lieux, mais habiter des instants. Ne plus chercher l’ailleurs, mais l’ici autrement.

Fløtyll, ce n’est pas qu’un nom. C’est peut-être une boussole nouvelle, pour ceux qui veulent encore croire qu’on peut voyager sans laisser de trace, aimer un lieu sans le dominer, et bâtir l’avenir sur l’eau, dans le respect et la beauté.

A partir de 350 € / nuit, les lodges étant réservables de début mars à fin septembre, les dates exactes étant définies en fonction du niveau du lac du Der.

Véronique Spahis