Gaspard Thomas, pianiste

On a pu l’entendre récemment dans un 2e Concerto de Rachmaninov de très haute tenue, en compagnie de l’orchestre Elektra ; c’était un jeu tout en finesse, sans effets, d’un naturel confondant. Gaspard Thomas est de ces musiciens complets dont on ne peut qu’admirer la riche personnalité ; figure montante de la jeune génération des pianistes français actuels, il se produit aussi bien en soliste d’orchestre qu’en tant que chambriste ou pianiste de récital, sans compter les pratiques d’accompagnateur et de compositeur auxquelles il consacre aussi de son temps.


Originaire de Poitiers, il grandit entre un père pianiste et une mère altiste, tous deux grands amateurs, et baigne très tôt dans un environnement musical qui, loin de ne le cantonner qu’à la musique classique, lui découvre également des esthétiques autres ; le jazz notamment. C’est dans la même ville qu’il débute le piano à l’âge de 6 ans avant de poursuivre son cursus à Bordeaux, Saint-Maur-des-Fossés puis au Conservatoire National Supérieur de Paris (CNSMDP), se sentant très vite une vocation de musicien classique. Il passe dix ans dans le prestigieux établissement parisien ; autant d’années qui sont pour lui l’occasion de perfectionner sa pratique pianistique, d’enrichir sa personnalité musicale par l’étude de l’écriture, de l’accompagnement ou encore de la pédagogie, et de faire de belles rencontres, tant amis que professeurs. Ses études sont marquées notamment par des figures telles que celles de Catherine Collard ou Marc-André Dalbavie, compositeur et professeur d’orchestration dont il retient un enseignement « lumineux ». De nombreux concours ponctuent son parcours, et de manière notable le Concours Szymanowski à Katowice en Pologne, auquel il remporte le troisième prix et deux prix spéciaux ; un concours consacré à un compositeur relativement peu connu qui tient dans sa vie de pianiste une place de premier ordre et qui a, selon ses mots, pénétré « l’essence chopinienne ».

Outre Szymanowski et Chopin, Gaspard Thomas affectionne tout particulièrement Brahms et Schumann, ce dernier étant pour lui un véritable « amour de jeunesse ». Côté interprètes, ce sont des pianistes tels que Nicholas Angelich ou Arkadi Volodos qui l’ont inspiré ; il admire chez celui-ci une limpidité de jeu et une simplicité extraordinaires, une évidence du chant et de la forme unique.

Il poursuit aujourd’hui sa formation pianistique à l’Académie Santa Cecilia à Rome auprès de Benedetto Lupo, un lieu nouveau dans lequel il peut recevoir un enseignement « rafraîchissant », après de nombreuses années au sein du même conservatoire. Son emploi du temps se partage entre les nombreux projets pianistiques auxquels il travaille, sa pratique de pianiste accompagnateur au CNSMDP et le master de pédagogie qu’il y termine actuellement ; un rythme de travail qui lui laisse finalement très peu de temps pour ses intérêts autres, qui ne manquent pourtant pas. Il regrette de ne pouvoir lire autant qu’il voudrait, porté qu’il est vers la poésie et la philosophie – vers Nietzsche notamment, dont on connaît les très riches théories esthétiques portant sur la musique.

Enfin, on retient de Gaspard Thomas sa grande prédilection pour la musique de chambre, formation privilégiée dans laquelle l’effectif réduit permet à une véritable « magie » d’opérer entre les musiciens, selon son mot ; c’est ainsi qu’il se produit très régulièrement en concert avec Elise Bertrand, brillante violoniste et compositrice, et avec laquelle ils ont à cœur de faire découvrir au public le répertoire contemporain. Bref, un nom dont on entendra parler dans le monde de la musique !

Eloi Hostein