La vie est aussi simple et belle qu’une petite fleur mouillée par la rosée ; tel est le message que nous offre Dzinka Matiyash dans ses Histoires sur les Roses, la Pluie et le Sel.
Rassemblant de multiples nouvelles, le recueil nous présente des personnages aussi divers qu’inattendus, allant d’un moine bègue à un dictateur en mal d’amour. Plusieurs histoires nous plongent dans l’univers de la petite Marta, qui sait découper des morceaux de vie dans du papier blanc. Mais l’auteure se penche également sur des figures aux noms déjà bien connus. Elle imagine ainsi les sentiments d’Iseult en Cornouaille, ou encore ceux de Marie-Madeleine assistant dans le désespoir à la passion du Christ. Personnages légendaires ou silhouettes du quotidien, tous ne sont que des hommes et des femmes aux sentiments bien ordinaires dans lesquels chacun peut se retrouver. Ils traversent les grandes épreuves de l’existence humaines, le handicap, la maladie ou le deuil. Ils vivent aussi la joie, ils vivent l’amour, les espoirs de jeunesse et la sérénité de la vieillesse.
Pour quelles raisons ces histoires ont-elles été rassemblées en un même ouvrage ? Pas seulement parce qu’elles ont un rapport avec les roses, la pluie ou le sel, ces trois éléments n’étant la plupart du temps évoqués que de manière très accessoire. En réalité, tous ces récits illustrent une même vision du monde et de la vie ; ils rappellent que l’existence humaine est d’abord sensible. Tous les personnages ont une âme d’enfant ; ils découvrent le monde à travers leurs sensations corporelles. Ils le caressent, comme on caresse un pétale de rose. Ils l’écoutent, comme on écoute la pluie rebondir sur les pavés. Ils le savourent, comme on savoure le goût du sel sur ses lèvres après un bain de mer.
Dzinka Matiyash adopte un style humble et presque enfantin, empreint d’une poésie rafraîchissante. Matiyash convoque des images toujours plus surprenantes ; certains récits s’articulent par exemple autour d’un “ange salé” ou d’une “pluie de fourmis”. Mais l’originalité n’est pas recherchée à tout prix, et jamais on ne perd ce goût de la simplicité.
Remarquons que la couverture du livre est un peu trompeuse. Un œil au centre d’une fleur bleu ciel sur fond rose bonbon : on s’attendrait presque à un manuel de développement personnel invitant son lecteur à méditer l’harmonie du cosmos. Mais cet œil mystérieux est avant tout un symbole divin – de nombreux passages évoquent effectivement l’existence de Dieu. Les personnages de Dzinka Matiyash sont profondément croyants, ils trouvent la paix dans leur foi catholique et rayonnent de cette paix. Mais ils restent humbles, tellement humbles qu’ils en deviennent presque invisibles et qu’il faut la plume d’un écrivain pour nous les faire admirer. Les Histoires sur les roses, la pluie et le sel sont un hommage à ces saints du quotidien : ils sont les roses qui embaument nos vies, le sel qui en révèle la saveur et la pluie qui les rafraîchit.
Savéria Costantini
Histoires sur les Roses, la Pluie et le Sel, de Dzinka Matiyash, traduit par Justine Donche-Horetska
Les Editions Bleu et Jaune Paru le 11 mars 2020
228 pages – 22 €