« Le Phare Rembrandt » au Musée des Beaux-Arts de Draguignan : une plongée dans l’univers du maître hollandais

Entrer dans l’exposition Le Phare Rembrandt, c’est comme franchir une porte vers le XVIIᵉ siècle hollandais, puis se laisser entraîner dans le XVIIIᵉ français où le génie de Rembrandt a continué de briller. Du 15 novembre 2025 au 15 mars 2026, le Musée des Beaux-Arts de Draguignan propose une exposition exceptionnelle intitulée Le Phare Rembrandt. Plus qu’un simple hommage au peintre hollandais, cette manifestation explore l’influence durable de son œuvre en France, particulièrement au XVIIIᵉ siècle, où son style et sa technique ont marqué profondément les artistes et les amateurs d’art.

Cette exposition originale, labellisée d’intérêt national par le ministère de la Culture, se concentre sur la réputation de Rembrandt et sa gestuelle picturale. En réunissant une sélection d’œuvres visibles en France au XVIIIe siècle qui lui étaient alors attribuées et celles de peintres l’ayant regardé, voire collectionné, elle vise à rendre sensible la question de l’imitation et de l’appropriation d’une matière qui fascinait à la fois les artistes et les collectionneurs, bien avant que le romantisme ne fige l’image d’un génie malheureux et isolé.

Les “Rembrandt” de Draguignan

Le musée des Beaux-Arts de Draguignan conserve dans son fonds ancien deux figures de fantaisie, entrées toutes deux dans les collections dès 1793 du fait des saisies révolutionnaires, sous le nom de Rembrandt. De même format, elles représentent chacune un jeune homme coiffé d’une toque portant une chaîne en or, dans une palette réduite, avec de forts effets de clair-obscur. Les deux tableaux proviennent de la même collection dans laquelle ils formaient sans doute, au XVIIIe siècle, une fausse paire permettant d’apprécier, à partir d’une idée commune de la peinture de Rembrandt, deux interprétations stylistiquement très différentes.

Il s’avère qu’ils n’ont pas été peints par Rembrandt lui-même. Le premier est attribué à un habile pasticheur français du XVIIIe siècle et le second à un artiste, sans doute hollandais, du XVIIe siècle.

Comme le montrent les œuvres du musée de Draguignan, les modèles de Rembrandt (ou considérés alors comme peints par lui) fascinèrent les amateurs mais également les artistes, troublés par l’audace technique du maître et sa merveilleuse intelligence de la lumière.

Le Phare Rembrandt

L’exposition réunit une soixantaine d’œuvres, dont plusieurs tableaux attribués directement à Rembrandt, ainsi que des œuvres de son atelier et de nombreux artistes français influencés par lui : Jean-Baptiste-Siméon Chardin : ses natures mortes et portraits reprennent l’attention au détail et la sensibilité au rendu des textures ;  Jean-Honoré Fragonard : influencé par la vivacité et la luminosité des scènes de Rembrandt ;  Jean-Baptiste Greuze : pour ses portraits expressifs et son approche dramatique de l’émotion ;  Louis-Michel van Loo : notamment dans ses compositions qui témoignent de la recherche d’intensité dans la lumière ;   Nicolas-Bernard Lépicié et Claude-Joseph Vernet : qui reprennent certaines techniques de composition et de lumière ;  Élisabeth Vigée Le Brun (par son intérêt pour la vivacité et la vérité des portraits) ;  Santerre, Grimou et Aved : dont les œuvres révèlent l’imitation et la réinterprétation de Rembrandt dans différents registres.

Des portraits, des figures éclairées par un clair-obscur saisissant et des compositions inspirées de sa palette permettent de découvrir ou redécouvrir la richesse de son univers artistique. Mais ce sont également les réinterprétations et les créations d’artistes français, de Chardin à Fragonard, qui révèlent comment l’art de Rembrandt a circulé et nourri le goût des Lumières en France.

Le parcours de l’exposition, sous le commissariat de Yohan Rimaud, se structure autour de trois grands thèmes : la puissance expressive de ses portraits, les différentes manières dont son style a été repris et adapté, et les techniques picturales, notamment le travail subtil de la lumière et de la texture. Les visiteurs peuvent ainsi comprendre non seulement la force émotionnelle des œuvres originales, mais aussi l’impact qu’elles ont eu sur des générations d’artistes et sur le marché de l’art de l’époque.

Pensée pour tous les publics, l’exposition propose de nombreux dispositifs interactifs et pédagogiques. Les visiteurs peuvent expérimenter le clair-obscur, composer leur propre autoportrait à la manière de Rembrandt ou découvrir des installations immersives qui rendent l’expérience sensible et ludique. Des visites guidées adaptées à différents publics, dont des sessions en langue des signes et pour personnes malvoyantes, permettent à chacun de profiter pleinement de l’exposition.

Le Phare Rembrandt offre ainsi une approche à la fois historique et sensorielle. Il met en lumière la manière dont un maître du XVIIᵉ siècle a continué d’influencer l’art au siècle suivant, tout en rendant cette histoire accessible et vivante pour le public contemporain. Cette exposition est autant une exploration du génie de Rembrandt qu’un hommage à son rôle de phare artistique, capable d’éclairer les pratiques et les imaginaires des siècles suivants.

Pour ceux qui souhaitent découvrir cette richesse, le musée de Draguignan devient, le temps de quelques mois, un véritable lieu de rencontre entre le passé et le présent de l’art européen. L’expérience promet d’être captivante, à la fois instructive et poétique, pour les amateurs d’art comme pour les curieux de passage.

Une belle découverte !

Véronique Spahis

du 15 novembre 2025 au 15 mars 2026

Musée des Beaux‑Arts de Draguignan, 9 rue de la République, 83300 Draguignan

Ouvert tous les jours de 10h à 18h sauf le mardi