Créées spécifiquement pour cette exposition, Twice Twilight et Tracing Fallen Sky sont les toutes dernières sculptures de la série des Timekeeper, amorcée en 2015. Ces deux œuvres interrogent à la fois le statut de l’image et notre appréhension des mondes virtuel et matériel, qui vont en se confondant.
Sarah Sze utilise des objets et des images glanés de mondes à la fois physiques et numériques, qu’elle assemble dans des œuvres multimédias complexes jouant avec les échelles, invitant à la fois à une observation microscopique et à une perspective macroscopique de l’infini. Associant de nombreux médias – de la sculpture à la peinture en passant par le dessin, la gravure, la vidéo et l’installation –, son œuvre interroge les notions d’entropie et de temporalité, et s’intéresse à la nature précaire de la matérialité.
En pénétrant dans la première salle d’exposition, le visiteur est attiré par une installation monumentale aux allures de planétarium semblant flotter dans l’espace, une structure sphérique suspendue faite d’acier inoxydable et de bambou. Cette sculpture se compose d’objets, de lumières, de sons, de photographies imprimées et de vidéos projetées sur de petits morceaux de papier déchirés. Grâce à des vidéoprojecteurs rotatifs, des images animées jaillissent sur les parois de verre de la Fondation, transformant le bâtiment en une lanterne magique au gré de leurs collisions, de leurs changements d’échelle, de leur disparition et de leur réapparition. Nombre de ces vidéos, prises par l’artiste au moyen de son iPhone ou collectées sur internet, représentent des éléments intemporels de la nature – la terre, le feu, l’eau – et portent notre attention sur des phénomènes naturels tels que le mouvement des nuages, l’éruption d’un geyser ou encore la croissance d’une plante. D’autres vidéos montrent la transformation de matériaux – par exemple une craie ou de la mousse coupées en morceaux – proposant une expérience visuelle qui éveille notre sens du tactile dans nos vies saturées d’images. Ces contenus disparates sont juxtaposés afin que le spectateur, à travers la vision et la lecture des images, participe activement à l’interprétation de l’œuvre.
S’étirant sur toute la circonférence du bâtiment, ces images mènent le visiteur vers un second espace où ils découvrent une sculpture de forme concave réfléchissante dont on ne saurait dire si elle émerge du sol ou si elle est au contraire tombée du ciel. Sa surface fragmentée en d’acier reflète des fragments d’images et d’objets, et donne le sentiment d’un paysage fracturé. Un pendule oscillant au-dessus d’elle vient frôler cette surface dans un mouvement irrégulier. Inspirées du planétarium et du pendule – des modèles scientifiques conçus dans notre quête de connaissance du cosmos –, les sculptures de Sarah Sze tentent de représenter les insondables concepts de temps et de mémoire. Les images diaphanes et fragmentaires de l’installation apparaissent et disparaissent, se désintègrent et s’évaporent, à l’instar des images floues et décousues qui peuvent surgir de notre mémoire.
Commissaire : Leanne Sacramone, assistée de Maëlle Coatleven
Du 24 octobre 2020 au 30 mai 2021
Fondation Cartier pour l’art contemporain, 261 boulevard Raspail, 75014 Paris
Photos : Véronique Spahis