Zola photographe à l’espace Richaud de Versailles

L’exposition Zola photographe est une coproduction de la Ville de Versailles et de la Médiathèque du patrimoine et de la photographie (MPP) qui conserve le fond photographique d’Émile Zola.

Émile Zola, pour la plupart d’entre nous, c’est avant tout l’auteur du cycle romanesque des Rougon-Macquart. C’est aussi la plume courageuse de « J’accuse… » durant l’affaire Dreyfus. Mais Zola est également un photographe amateur important. Il ne commence la photographie que tardivement, à l’âge de 48 ans. À cette époque, la photographie est indissociable de compétences en chimie, c’est pourquoi, passionné de science, Zola fait installer un laboratoire dans chacune de ses résidences. Enthousiasmé par ce nouveau médium, Zola réalise immédiatement le potentiel de la photographie en tant que témoignage : il prend de nombreuses images de scènes de la vie urbaine, dont certaines sont si immédiates qu’il est difficile de ne pas les considérer comme de véritables instantanés capturant un moment insaisissable. En effet, on a envie de transposer une phrase comme la suivante sur un plan de recherche photographique : « Le romancier est fait d’un observateur et d’un expérimentateur.  » Le Roman expérimental, 1880.
Les photographies n’ont été rendues publiques qu’en 1979, avec la publication du livre « Zola photographe », puis après la mort de son petit-fils en 1989, ses dix appareils photographiques, tous ses albums, les plaques et les tirages ont été vendus aux enchères.

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, loin des sujets sociaux abordés dans ces romans, Zola pratique avant tout une photographie intime constituée de ses proches, amis et famille. De nombreuses photographies ont pour cadre sa célèbre maison de Médan qu’il a acquise grâce au succès de ses livres. Il photographie ses animaux, avec lesquels il entretient par ailleurs un lien très étroit, dont son chien Pinpin, baptisé entre d’autres occasions « le chevalier Hector Pinpin du coq-Hardi. » Les Zola reçoivent de nombreux amis dans leur villa : Paul Alexis, le musicien Alfred Bruneau et son éditeur Georges Charpentier. Des clichés attestent de cette ambiance conviviale qui règne à la villa Médan. Zola partage sa vie entre Verneuil-sur-Seine où vivent son épouse Alexandrine ainsi que ses enfants Denise et Jacques, et Paris, où il fréquente Jeanne, une lingère de 27 ans sa cadette. De cette vie familiale, Zola tire de nombreux portraits dont se dégage une grande tendresse. Il privilégie les scènes en extérieur à une époque où les portraits sont généralement pris en studio.

Les commissaires d’exposition ont fait le choix de proposer des rapprochements entre les photographies exposées et les peintres du mouvement impressionniste que Zola célébrait lorsqu’il était jeune en tant que critique d’art. Cézanne est d’ailleurs un ami d’enfance de Zola et lui a fait rencontrer les artistes de l’époque. Sa manière de photographier a sans doute été influencée par certains tableaux de Monet ou Manet qu’il a aimés et commentés. Les ressemblances formelles entre ses photographies et certains tableaux impressionnistes sont frappantes. Par exemple, la graphie de Jeanne allongée sur le divan rappelle sans ambiguïtés La Dame aux camélias de Manet.

Zola maîtrise parfaitement l’utilisation de son appareil photo, n’hésitant pas à varier les angles de prise de vue et cherchant toujours à capter avec précision ce qu’il perçoit. Zola a appris seul ou en groupe, avec ses amis, en expérimentant, en commettant quelques manquements, mais surtout en tirant des leçons de ses erreurs. Il perfectionne ses propres techniques et, avec la rigueur et la méticulosité qui le caractérisent en tant qu’écrivain « expérimental », effectue de nombreuses recherches techniques qu’il ne manque jamais de noter minutieusement dans ses célèbres Cahiers. Temps de pose, qualité des plaques de verre utilisées, etc. : aucun détail n’échappe à l’œil avisé de Zola, qui écrit : « À mon avis, vous ne pouvez pas dire que vous avez vu quelque chose à fond si vous n’en avez pas pris une photographie. ».

Perrine Decker

Du 19 février au 20 avril 2025

Espace Richaud, 78 boulevard de la Reine, Versailles
du mercredi au vendredi 12h-19h – Week-end 10h-19h
https://www.versailles.fr/188/culture/espace-richaud.htm