L’effervescence d’une nuit
Après, une première Trilogie autobiographique dont fait partie Little Gay Boy (2013), Antony Hickling nous dévoile un film plus narratif et traditionnel mais tout autant créatif. Floutant toujours les frontières entre réalité et surréalisme, le réalisateur qui tient également le premier rôle, nous emmène dans son monde.
Tout commence sur un plateau de tournage ou Richard (Antony Hickling) perd patience, mais surtout l’inspiration. Richard n’est pas bien dans sa vie, il est célibataire depuis quelques mois, triste, sont travail ne semble plus lui plaire, rien ne va… S’en suis alors des rencontres, drôles et moins drôles, tristes ou encore charnelles qui aideront notre protagoniste à aller de l’avant. Ce film, sorte de « Cléo de 5 à 7 » à la Hickling nous fait passer par toutes les émotions : de sa rencontre avec une jeune femme anglaise qui ne peut s’empêcher de parler (Nina Bakhshayesh), aux retrouvailles à coups de poings avec son ex (Raphaël Bouvet), en passant par un moment confession dans un taxi et sa visite chez une tireuse de tarot (Dominique Frot). Ou encore sa rencontre mystique dans l’Eglise avec un inconnu (Claudius Pan) et avec un vieil homme raciste et complètement barré (Jean-Christophe Bouvet) dans un fast food ; pour finir avec sa réconciliation avec son meilleur ami (Manuel Blanc) … Chacune de ces rencontres donnent lieu à une sorte d’introspection de la part de Richard, ce Richard auquel on s’attache, auquel on s’identifie rapidement. On se rend compte qu’un mal être profond le ronge et qu’il n’a jamais osé en parler.
En suivant l’errance de Richard jusqu’au petit matin, nous sommes pris en haleine, la noirceur, l’angoisse mais aussi la joie nous emporte. Tête hors de l’eau, Richard prend du recul, s’interroge, se remet en question jusqu’à repenser à lui enfant, rêvant au bord du Canal Saint Martin de « raconter ses histoires quand il sera grand ». Ainsi, dans cette ambiance parisienne tardive, Richard retrouve ce qu’il avait perdu, son inspiration mais surtout son goût de la vie, comme quoi, le dicton dit vrai : la nuit porte conseil.
On pourrait croire ce film simpliste, l’histoire d’un homme gay qui se cherche, passe une nuit folle, agrémentée de clichés. Mais non, c’est loin d’être simple, l’esthétique travaillé, la beauté et la bienveillance des dialogues entre cet homme et ces femmes qui l’entourent l’histoire d’un soir, comme une mère veillerait sur son enfant, permettent une proximité avec le spectateur. Non, Antony Hickling n’a pas simplement fait un film LGBT+, le réalisateur à fait un film drôle, beau, touchant mais surtout empreint d’une réalité que nous connaissons tous, comme l’amour et la haine ou encore le doute et la peur.
Manon Quantin
Down in Paris réalisé par Antony Hickling (2021)
Sortie en salle le 2 mars 2022