A Paris, à la 110 Galerie, le collectif Lusted Men et la 110 Galerie s’interrogent sur la représentation érotique des hommes avec l’exposition temporaire « Désirés ». Huit artistes de la scène artistique contemporaine française posent leurs regards érotiques sur des corps d’hommes et proposent d’autres chemins de désir. Comme présence d’une absence ou absence d’une présence dans un rendez-vous d’amour au masculin.
Au moyen de différents médiums et de sensibilités singulières, les artistes exposés débrident et élargissent – chacun à leur manière – le champ du désirable… entre possible et réel. À rebours de l’iconographie traditionnelle qui, de l’Histoire de l’Art à l’industrie publicitaire, a fait du corps féminin un objet de convoitise et de fantasme à répétition, leurs travaux investissent, élargissent et parfois détournent au masculin le domaine des représentations érotiques. Au nom d’un Eros rauque qui ne confond pas frime et frivolité. Car, en dernier recours, nous semble-t-il, c’est dans le corps à corps qu’appartient la minute de vérité suprême.
De formes fantasmées (Sarah Kalvar, Arthur Gillet) à la documentation du quotidien (Karla Hialdo Voleau, KIM), le parcours aborde plusieurs thématiques touchant au désir et aux masculinités. Il questionne la place de la distance et celle du langage dans nos vies érotiques (KIM), les codes genrés et les rapports de forces qui agissent dans la séduction et la sexualité́ (Karla Hiraldo Voleau, Rebekka Deubner), le regard désirant à l’épreuve du temps ou au sein du couple (Mila Nijinsky, Solène Ballesta) – et nous engage à porter notre curiosité hors des sentiers battus de la norme hétérosexuelle (Rebekka Deubner, Alireza Shojaian ). Il faut ici et là avoir l’œil qui vole bas comme de sublimes maraudeurs et n’avoir pour seul regret que de ne pas s’y être vu exposer.
Enrichir le champ des représentations érotiques d’hommes, c’est se donner collectivement des images et des récits qui constituent le liant existentiel de nos expériences, et influencent les possibles formes de nos vies érotiques. Il s’agit ici, non seulement de renverser ses yeux, d’avoir une « attention inhabituelle », mais aussi de placer l’appareil photo, le pinceau, la graphite ou la plume dans d’autres mains que celles qui les ont longtemps tenus. Trop sans doute pour le commun des « Désirés ».
Christian Duteil
jusqu’au 4 février 2023
110 Galerie, 110 rue Saint-Honoré, 75001 Paris
du mardi au samedi de 11h à 19h