Dialogue Wallon et Douzenel à la librairie/boutique du musée du Louvre

Le 24 mars dernier, les artistes Marine Wallon et Jennifer Douzenel se sont réunies dans le cadre d’un rendez-vous à l’initiative du musée du Louvre, dans le cadre de son programme « Regards du Louvre ». Elles nous ont partagé, respectivement, leur dernière création (Isola et À deux doigts).  Cet échange a pour but de nous plonger dans l’univers artistique (peinture et cinéma) des deux femmes artistes liées d’amitié depuis plusieurs années.

Marine Wallon, artiste nominée avec 5 autres artistes, en ce moment, à la foire de dessin contemporain Drawing now Art fair et Jennifer Douzenel dont le film A deux doigts a été diffusé sur la chaîne officiel du Louvre, se sont toujours alignés dans leur production. Depuis leur rencontre aux Beaux-Arts de Paris, Marine et Jennifer témoignent l’une pour l’autre d’une admiration mutuelle.

La peintre, Marine Wallon caractérise sa relation avec Jennifer Douzenel de “télépathique”. Tout commence lorsque Jennifer réalise, en 2015 une vidéo nommée “Mascaret” montrant une longue vague déferlante s’échouant sur la plage… Marine, quant à elle, produit la même année une toile nommée “Tidal bore” qui n’est autre que la traduction de “mascaret” en anglais. Simple hasard ? Quelques années suivant cette surprenante similarité, en 2020, elles sont toutes deux présentées à l’occasion d’une exposition au sein de la galerie Catherine ISSERT, à Saint Paul de Vence. A une semaine d’intervalle, en donnant leurs titres, elles se rendent compte que leurs œuvres non similaires visuellement parlant, portent, une fois de plus, un titre identique : Nordet (nom de vent du nord-est) et dont la symbolique se rapproche étrangement.

Marine Wallon, invité par le musée du Louvre à bénéficier de l’expertise technique des artisans de l’atelier de chalcographie de la Rmn (Réunion des musées nationaux), a proposé à la direction pour son projet Isola une inspiration de la jeune fille au cimetière d’Eugène Delacroix. Trois couleurs maximum devaient s’assembler puisque la multiplicité de couleur l’éloignerait techniquement du fer de la gravure selon Lucile Vanstaeval, choisie pour accompagner Marine tout au long de sa gravure. En revanche, Lucile précise que le travail de la matière serait le champ d’action pour Marine.

La chalcographie Isola est un “lieu de rêverie” découpé en trois espaces : le ciel, la montagne et l’eau. Grâce à l’atelier de chalcographie, Marine s’est armée d’une méticulosité relative aux graveurs, opposée à sa rage et son impatience de produire par impulsion en tant que peintre. Elle apprit de nombreuses techniques. Par exemple, la gravure au sucre ou encore à la lavande donnant du relief et des creux à ses peintures.

Jennifer Douzenel, de son côté, utilise une “stratégie d’échappée”, quelque chose qui joue de l’évocation d’un moment fugitif. Presque systématiquement silencieuses, ses vidéos sont fixes. Ainsi, pendant des mois, Jennifer a filmé les mains des visiteurs face à la pyramide, et en a rassemblé dans une œuvre, où chacune de ces mains signale parfois une œuvre d’art. Tous ses plans sont reliés à des peintures particulières, à des références provenant du musée du Louvre. A cet égard, les artistes ont tenu à se réunir au cœur des collections du Louvre, afin de se reconnecter à ce qui les rassemble : cette peinture, juste avant de nous rejoindre. Jennifer dont le médium est la vidéo ajoute que toute sa relation animée vient de la peinture, et au fond, son envie d’être de l’équipe de Marine.

A l’issue de l’échange, chaque artiste fut invité à donner ces remarques sur l’œuvre voisine. Jennifer a pointé l’inversion des plans dans l’œuvre Isola, ce fond faisant la forme et devenant principal, de même que les profondeurs se mêlant dans l’espace. Sans surprise, une réflexion similaire fut faite par Marine à propos du film “À deux doigts”, elle relève “ces espaces qui se contredisent, mais pourtant forment une harmonie”. Pour Marine, Jennifer a réussi à “cadrer l’incadrable”, à savoir, le ciel. Des échantillons chromatiques du ciel ont été superposés sur d’autres plans montrant le ciel sous une teinte tantôt plus foncée, tantôt plus claire.

En somme, l’une et l’autre, ont cherché des stratégies d’attention dédiées au spectateur, possibles par l’intermédiaire de ruptures visibles, entre grâce et perturbation… Ou bien entre permutations chromatiques et matérielles.

Eliette Belet

photos : Eliette et Belet et Rmn

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