Les Anciennes Odeurs

Les Anciennes Odeurs

Dans cette pièce, le talentueux romancier, scénariste, dramaturge, Michel Tremblay, auteur Québécois populaire, traite de l’amour, la vie, la mort au travers de la rencontre de deux anciens amants. Qu’ils soient homosexuels, importent peu, ce qui prime, c’est la passion passée, la tendresse, les reproches, la complicité.

 

Jean-Marc, professeur de français et écrivain méconnu, est joué par Yannick Debain. À l’aube de ses 40 ans, il a un regard impitoyable sur son statut d’enseignant et son rêve de reconnaissance. Luc, son ancien amant, interprété par Samuel Charle  expérimente la célébrité cathodique grâce un rôle de benêt zozotant. Mais cette popularité ne compte pas, ce qu’il voudrait, c’est être applaudi pour un rôle de composition.

 

En utilisant son ancienne clé, Luc arrive à l’improviste et surprend Jean-Marc corrigeant des copies et pestant comme à son habitude, contre l’ignorance de ses étudiants. Les répliques acerbes et tendres alternent, puis on aborde le vif du sujet : comment va l’autre ? Les dialogues sont superbes, juste et sans pathos, même lorsque Luc évoque la maladie de son père dont il espère la mort, car ce dernier n’en finit pas d’agoniser, de lutter et de masquer ses souffrances pour conserver sa dignité face à son fils.

 

Prétextant les odeurs, les souvenirs, c’est le bilan, sans concessions, avec beaucoup de tendresse et de lucidité de ces deux anciens amants sur leur vie passée et actuelle. Il y a beaucoup de sentiments, de justesse, dans ce duo qui aborde le couple, la sexualité, les traîtrises, l’homosexualité, la drague, les rêves de gloire et la mort. Tous ces sujets sont traités avec authenticité et émotion. Quelle que soit la gravité du thème, Michel Tremblay l’évoque avec humour, ironie. Ainsi lorsque Luc annonce que depuis sa séparation, il cumule les aventures, cela donne : « Quand un type qui me plaît répond pas à mes feulements ou à mes rugissements j’ai une grosse peine d’amour de 30 secondes ». Puis quand il explique ses relations éphémères à Jean Marc, il lance cette excellente tirade « Je me défends comme je peux parce que je fais partie de ceux qui prennent leur douche tout de suite après. Y’a rien de plus chiant que de te forcer à converser avant et après avoir baisé avec un type à qui tu n’as rien à dire et que tu es sûr de ne jamais revoir. La douche c’est un refuge, un alibi. Jamais je croirais que tu ne t’en étais pas rendu compte. »

 

Dans la même veine, Jean-Marc, explique que pour lever toute ambiguïté en tant que professeur, tous les ans il annonce son homosexualité à ses étudiants. Mais le temps œuvrant, ceux-ci répondent maintenant : « mais monsieur on sait déjà que vous êtes une tapette ». L’écriture de Michel Tremblay est piquante, drôle, décapante : « Je me suis senti comme un boy scout qui découvre grâce à ses petits camarades que son pénis lui sert pas uniquement à faire pipi. »

Dans cette dissection des amours perdues, du temps qui passe, Michel Tremblay nous dépeint avec tendresse, la connaissance de l’autre dans son intimité, ses habitudes, ses désirs, ses fêlures, ses odeurs. C’est pourquoi cette histoire demeure universelle, c’est celle de tous les couples qui se sont aimés, puis quittés.

Barbara Ates Villaudy

Les anciennes odeurs
Auteur : Michel Tremblay
Adaptation : Christian Bordeleau
Mise en scène : Richard Guedj
Scénographie : Kévin Carron
Avec : Samuel Charle, Yannick Debain et la voix de Zahariya

Calendrier des représentations :
Les samedis à 21h30 et dimanches à 15h

Théâtre du Marais
37, rue Volta
75003 Paris
http://www.theatredumarais.fr/