Une héroïne contemporaine sous la monarchie du XVIIIe siècle
Marie-Antoinette est de nos jours l’un des personnages historiques les plus connus au monde. Dans des contextes très différents allant du roman, au cinéma ou à la mode, la figure de la reine est partout, et multiple. Les façons d’aborder le personnage sont tellement diverses que l’on peut facilement s’y perdre ; l’exposition à la Conciergerie se propose de reconstituer au mieux l’histoire d’une icône, qui ne cesse de se réinventer de nos jours.
Le choix de la Conciergerie n’est pas anodin, puisque c’est là que Marie-Antoinette passe les dix dernières semaines de sa vie, tandis que se tient son procès au Tribunal révolutionnaire. Critiquée de son vivant et malmenée par son peuple, son image post-mortem évolue, à travers divers récits et biographies. L’exposition s’ouvre sur la commémoration de la mort de la reine, présentant divers portraits, gravures relatives à son procès, mais sont également exposés des documents d’archives uniques autour du procès et de l’exécution de Marie-Antoinette. La mémoire politique de la reine décapitée est notamment représentée par les espaces commémoratifs de Marie-Antoinette, telle que la Chapelle expiatoire construite à l’emplacement où avaient été inhumés les corps de Louis XVI et la reine défunte.
À la fin du XVIIIe siècle se développe la nouvelle conception de la « célébrité », et Marie-Antoinette est un « personnage public » qui illustre bien cette tendance. Cette reine unique, tout en faisant parler d’elle, conservait un mystère, un espace privé et autonome, qui choque à l’époque de la monarchie française. Cette personnalité atypique a beaucoup fasciné, puisque depuis, de nombreux ouvrages et films, tels que l’adaptation de Sofia Coppola, ont cherché à comprendre ce qu’était le portrait psychologique de cette reine curieuse.
Les images de la reine qui se sont diffusées de son vivant et largement après sa mort, sont l’objet d’une forte prolifération de nos jours. À commencer par les images officielles de la reine, notamment les portraits réalisés par Élisabeth Vigée le Brun, avec l’image la plus connue de Marie-Antoinette à la rose (1783), largement diffusés par le biais de gravures.
L’imaginaire et le fantasme, la passion et le conflit, sont autant de termes décrivant les rapports entretenus de tout temps avec la figure de Marie-Antoinette. On va jusqu’à évoquer un véritable « fétichisme » envers sa figure, qui traduit les différents sentiments à son égard, qui se matérialise autour de trois éléments : la chevelure, le corps et la tête coupée. L’exposition illustre ce phénomène qui s’étend des caricatures diffusées à l’époque, aux photographies contemporaines kitsch voire morbides présentant des têtes coupées, ou encore par le motif de la perruque « à la belle poule », signature majeure de la coquetterie excessive associée à la reine.
Le personnage de Marie-Antoinette se voit aujourd’hui modernisé dans des domaines divers : de l’héroïne de manga japonais à succès, à l’icône de mode sans cesse réinventée par les créateurs, aux produits dérivés en tous genres présentant l’image de l’icône historique… La figure de Marie-Antoinette est en perpétuelle réinterprétation et cultive un certain mystère qui nous attire. Son image, rapprochée par analogie à celle de la Princesse Diana, telle une femme moderne, emprisonnée dans sa condition sociale, tout en cultivant une grande part de mystère et de liberté, nous permet de nous identifier au personnage, de se sentir proche de cette reine martyre, et c’est une nouvelle approche qui nous fait du bien. À ne pas manquer !
Julie Goy
Du 16 octobre 2019 au 26 janvier 2020
Ouvert tous les jours de 9h30 à 18h, nocturnes le mercredi soir jusqu’à 20h30
Conciergerie
2 Boulevard du Palais 75001 Paris
Tarif : 9 € ; gratuit pour les -26 ans UE, chômeurs, handicapés
Présenté par le Centre des monuments nationaux
Une scénographie de Véronique Dollfus
Sous le commissariat scientifique d’Antoine de Baecque