L’ambassade de Serbie a prêté son splendide décor rococo aux créations de haute couture de Stefan Djokovich lors de la Fashion Week de juillet 2023. Intitulé Oiseau de feu, ce défilé faisait de la femme un oiseau mythique.
Le silence tombe et le bruit de tambours se fait entendre, instaurant une ambiance tendue, presque menaçante. Le runaway commence par du noir avec des touches d’or et de sequins brillants, telles les cendres mourantes dont le phœnix doit renaître. Les ajouts dorés font penser aux pièces de Schiaparelli et mettent en valeur les paupières ombrées et les cheveux laminés des mannequins. Certains d’entre elles portent des coiffes faites de plumes qui semblent tournoyer avant d’être réduites en cendres. L’illusion de Terre brûlée est continuée dans le bruit des sequins, qui crépitent pendant que la mannequin se meut et brillent de manière incandescente sous les chandeliers de cristal. Ici, la femme est mystique, puissante et séductrice. Rien ne peut l’arrêter.
Les éléments récurrents dans cette collection sont le haut des robes corsetées et les sequins, qui, si l’on regarde de plus près ont la forme de fleurs. Ces derniers soutiennent le parallèle créé entre cycle de renaissance du phœnix (ainsi que de sa résistance face aux changements destructeurs qu’il doit traverser) avec la femme et les fleurs. Une fleur ne cessera de renaître et de se réinventer malgré toutes les difficultés auxquelles elle doit faire face, tout comme la femme et le phœnix. On retrouve aussi de nombreuses robes « A-line » ou sirènes.
Le noir cède sa place à un rouge carmin qui témoigne d’une vitalité certaine. Une de ces robes rappelle les flappers des années folles qui renforce l’aspect de puissance et de rébellion de ces créations. C’est après cela que l’une des pièces maîtresses de la collection arrive : un corset précieux se laisse entrevoir sous un bustier à balcon, qui en dessous, laisse s’épanouir la robe en une jupe bouffante à traîne. Le tissu moiré, d’une teinte orange vif reflète l’or tout autour de lui. Le mannequin scintille telles les premières flammes d’un feu naissant. Ces dernières sont littéralement symbolisées par des flammèches en tissus léchant les robes qui suivent.
La musique s’adoucit et on assiste à la renaissance de l’oiseau de feu. Les tons virent à un fuchsia digne de Dior. On peut d’ailleurs voir cette élégance intemporelle dans la robe à bustier asymétrique à coiffe rose et décorée de sequins de fleurs. Succède alors une robe moderne aux touches Mugler qui confère une présence imposante, presque de toréador à son modèle. Les touches de cuir noires sous le jaune électrique font penser à une peau endurcie face aux transformations. Mousseline, taffetas et organza prennent le pas avant de nous présenter une création étonnante qui résonne avec les robes dorées d’Yves Saint Laurent. L’une d’entre elles est réhaussée d’une corolle dorée (semblable à la collerette d’un oiseau) qui donne une vie propre à la robe. On a l’impression qu’elle respire à chaque pas.
La dernière pièce remplit à la fois son rôle en tant que robe de mariée et de forme finale. D’un blanc épuré et scintillant, elle fait allusion à la purification qui a eu lieu grâce aux flammes. Stefan Djokovich a réussi à travers son art à faire de ses créations une ode à la force et à la résilience des femmes qui n’ont besoin que d’elles pour renaître et prospérer.
Clara Alle