Tracy de Sa, une étoile rebelle

Tracy de Sa, une étoile rebelle

Depuis 33 ans, le Printemps de Bourges programme de jeunes artistes sélectionnés par les partenaires de son festival. Au total, ce sont 3 500 musiciens qui s’inscrivent dans les diverses catégories rock, chanson, hip hop et électro. Seul une trentaine seront programmés les après-midi du printemps. Les gagnants participeront à la tournée des iNOUÏS en septembre et au festival MaMA qui se déroulera durant 3 jours devant un public parisien mais aussi un parterre de tourneurs, professionnels… De nombreux artistes ont pris leur envol grâce aux iNOUÏS comme Eddy de Pretto lauréat en 2017. Même s’ils ne gagnent pas le premier prix, cela leur de tremplin comme Gauvain Sers qui nous avait séduit lors de l’édition de 2017. Cette année, nous avons repéré une artiste fort prometteuse : Tracy de Sa, dans la catégorie Hip Hop.

Cette jeune rappeuse, dispose d’un flow ultrarapide, percutant et parfaitement cadencé. Elle est accompagnée par Comix DelBiagio, son beatmaker. Son titre phare « Bring Back Hip Hop » en est un parfait exemple. Polyglotte, elle rappe en anglais, mais utilise aussi pour certains titres, la langue de son deuxième pays, l’Espagne. Dans le milieu du rap particulièrement testostéroné, ces textes revendiquent un féminisme comme avec «Alpha Female » et s’il y avait un quelconque doute, entre deux morceaux, elle s’adresse au public et clame « mon corps m’appartient » ou avec les badges qu’elle distribue, « When women rhythm the world… ». Issue de la danse, elle a le rythme, une forte présence sur scène. Le public de bourges lui a fait un très bel accueil. Le concert était court comme toujours aux iNOUÏS, car il y a d’autres groupes qui attendent de faire leurs preuves. Mais au vu de sa prestation, nous sommes persuadés que cette jeune artiste va gagner en puissance et va rapidement faire parler d’elle. Intriguée, je suis allée à sa rencontre pour en savoir plus. Elle s’est gentiment prêtée au jeux des questions et réponses.

Verdict : c’est définitivement une belle personne !

Rencontre avec Tracy de Sa

Etre sélectionnée pour les iNOUÏS, cela fait quel effet ?
– Nous sommes une jeune formation, nous avons encore plein de choses à apprendre, alors on a déposé notre dossier sans trop y croire. D’avoir eu la chance d’être sélectionné pour ce grand festival, c’est la sensation d’avoir gravi un autre échelon.

Quels sont les artistes qui t’ont influencée ?
– Il y en a plein. J’ai passé mon enfance à Malaga en Espagne, j’ai donc écouté du Flamenco, j’adore leur danse, ils sont puissants en totale connexion ; puis aussi des musiques latines et du reggaeton. A cette époque, les artistes de reggaeton racontaient des vraies histoires, celles de la rue, de leurs galères, c’est une musique qui m’a toute de suite engagée.  J’ai aussi été attirée par le RnB, le dancehall, le rap avec des artistes comme Salt-N-Pepa, Missy Elliot et Lauryn Hill qui parlait des libérations du système et qui m’a beaucoup influencée. Son parcours migratoire ressemblait beaucoup au mien. Je l’ai vu sur scène, [Lauryn] a une telle énergie sur scène que tu as carrément envie d’arrêter de respirer.

Tu te revendiques féministe, ça veut dire quoi ?
– Dans le monde du hip hop on n’est pas du tout mises en avant, comme d’ailleurs dans les autres styles de musique. Il faut se battre pour imposer son point de vue, avec des producteurs, des tourneurs qui voudraient que nos vêtements soient plus échancrés, plus sexy. Musicalement, ils pensent que les femmes devraient faire plus de lyrics, ou au moins en ajouter au lieu de seulement rapper. Dans ce milieu il y a encore beaucoup de choses à changer. Mais quand le rappeur Vin’S a sorti son titre #MeToo, c’était bouleversant de savoir qu’il y avait aussi des hommes qui nous soutenaient dans notre démarche.

Le futur ?
– On a signé chez un label parisien Ovastand pour un album qui sortira l’année prochaine. Ils nous laissent libres, ils aiment notre démarche artistique. Nous profitons de leurs expériences, de leur recul car parfois entre les titres cela peut manquer de cohérence et pour un album c’est embêtant. C’est mieux d’avoir une ligne directrice. Quand on part dans tous les sens, ils nous aident à recadrer le projet mais ils restent très ouverts à nos propositions.

Un rêve ?
– Le rêve que l’on puisse tous être égaux au niveau du genre, de nos droits, de nos cultures que l’on soit tous tolérants, que l’on arrête de mettre les gens dans les cases. Que je puisse partager ma musique, mes idées, créer des débats, échanger.

Barbara Ates Villaudy

Le clip de Bring Back Hip Hop de Tracy
https://www.youtube.com/watch?v=5H2oxha3RRc

Prochaines dates
6 octobre 2018 – Femcees Fest – St Etienne
18 juillet 2018 – Les Off de Festival Sur les Champs – Valence
1 juillet 2018 – Festival « Paroles et Musiques » – St Etienne
10 juin 2018 – Festival « Ça va bien S’passer » – Gemens
4 mai 2018 – Showcase « Tendances Urbaines » – Lyon

Photos crédit Gianni Villa