« Dansons la carmagnole
Vive le son, vive le son
Dansons la carmagnole
Vive le son du canon ! »
Musique ! Canons ! Citoyens ! L’histoire mouvementée du début du XIXe siècle en France, entre Révolution, République et Terreur, ne sait, encore aujourd’hui, que trop bien se prêter à l’étude minutieuse des historiens tout en demeurant un sujet inépuisable pour les agents du monde de la culture. L’exposition qui se tient du 16 octobre 2024 au 16 février 2025 au Musée Carnavalet, intitulé Paris 1793-1794 : Une année révolutionnaire, s’inscrit pleinement dans cette curiosité intarissable pour la période, tout en se démarquant par l’approche muséographique inédite prise : une exposition micro-chronologique consacrée à une seule année : l’An II.
Déplier une histoire dissonante
Souhaitant dépasser la simple présentation des faits, l’exposition envisage l’espace comme un lieu en soi de production de savoir, de réflexion et de réinterprétation. Grâce à des collaborations scientifiques avec des laboratoires d’analyse, elle permet de faire avancer la recherche, notamment par le biais d’études conduites, entre autres, sur la mâchoire du célèbre martyr de la Révolution, Marat.
Affronter ce passé violent, souvent refoulé, est une tâche difficile, mais comme le rappelle Guillaume Mazeau, membre du comité scientifique, « nous n’avons pas le choix, c’est notre héritage ». Aussi, l’exposition a été conçue pour dissiper les fantasmes persistants autour de cette période. Grâce à la collaboration scientifique qui l’a soutenue, elle a notamment pu démentir le mythe sempiternel selon lequel des livres auraient été tannés avec la peau des victimes de la Révolution.
En adoptant, autant que possible, une approche neutre, l’exposition réussit à faire dialoguer les avancées et la liesse persistante de l’époque (notamment vis-à-vis des progrès au sein de l’éducation, les grandes fêtes populaires, ou la création de l’Institut national de musique), en n’ignorant cependant pas les sombres aspects, « l’ogre », le « monstre » qu’incarne cette période. Comme le rappelle Guillaume Mazeau, l’An II fut une période complexe, marquée par des contradictions et des oppositions permanentes, tant sur le plan social que politique. L’exposition cherche à éclairer cette complexité, offrant une vision globale d’une époque où la vie quotidienne, malgré sa dureté, connaissait aussi des moments d’élévation.
Déambuler au fil d’une sombre année
Plusieurs salles thématiques déroulent un parcours d’exposition complet et clair : de la Révolution, en passant par la vie quotidienne des Parisiens, pour finir fatalement aux procès et aux prisons. Ce cheminement logique permet une lecture à la fois agréable et rigoureuse d’une année marquée par la complexité. En présentant une large gamme de témoins historiques de cette période – costumes, œuvres peintes, arts décoratifs, livres et documents – l’exposition parvient à recréer avec soin un microcosme de l’An II. D’autant que la présentation de quelques pièces inédites, comme c’est le cas, entre autres, de l’horloge Bréguet, confère à l’exposition une singularité particulière et témoigne de son désir, si ce n’est de son besoin, de mettre en vitrine un passé dépoussiéré afin d’y poser un regard neuf.
Les contributions de l’illustrateur Florent Grouzael, créateur de la BD Révolution ont, par ailleurs représenté un choix scénographique crucial pour pallier certaines lacunes visuelles de l’époque, et ont donné au parcours une dimension vivante et romancée. C’est en privilégiant l’immersion, par l’ajout de dispositifs audio, notamment des musiques et chants révolutionnaires, que les commissaires ont réellement réussi à faire de l’exposition une petite bulle narrative complète et captivante.
N’attendez plus et venez découvrir cette fascinante exposition : en avant citoyens, et à vos baïonnettes!
Clara Tomašević
Du 16 octobre 2024 au 16 février 2025
Musée Carnavalet, 23 rue de Sévigné, 75003, Paris
Du mardi au dimanche, de 10h à 18h
Pour en savoir plus : https://www.carnavalet.paris.fr/expositions/paris-1793-1794