21 rue La Boétie, entre hommage artistique émouvant et rappel historique glaçant

21 rue La Boétie,
entre hommage artistique émouvant et rappel historique glaçant

Le Musée Maillol accueille jusqu’au 23 juillet prochain une exposition consacrée au célèbre galeriste Paul Rosenberg et à son écrin de beautés du 21 rue La Boétie.

Née du livre de sa petite fille Anne Sinclair, cette exposition rend un hommage tendre et pudique à un grand-père amoureux des arts, en offrant au regard du visiteur des œuvres rares, savant mélange de l’avant-garde artistique des débuts du XXe siècle et des grands maîtres classiques qui ont, des années durant, orné les murs de la célèbre galerie du VIIIe arrondissement, dans « des expositions d’ensemble d’Art décoratif. »

Ce parcours d’une soixantaine d’œuvres choisies et présentées dans une scénographie raffinée, souligne l’œil avisé du collectionneur exigeant qu’était Paul Rosenberg. Cet esprit ouvert et rigoureux était avant tout un grand témoin artistique, un passeur d’art et de beauté ; capable de faire le lien entre la peinture figurative classique et les compositions contemporaines les plus audacieuses.

Aussi, dès les années 1910, tisse-t-il des liens personnels avec des artistes qui se révéleront être les chefs de fil des principaux courants artistiques du XXe siècle, comme Marie Laurencin, Picasso, Georges Braque, Fernand Léger ou Matisse, qu’il exposera dans sa galerie jusqu’en 1940, année lugubre où il dut quitter la France et abandonner son musée imaginaire à l’occupant nazi, avant de rejoindre les États-Unis et s’engager, avec son fils Alexandre, dans les Forces françaises libres du Général de Gaulle.

Le 21 rue La Boétie qui, des années durant avait été l’un des symboles des l’ouverture et de l’effervescence intellectuelle et culturelle parisienne, s’est retrouvé en quelques semaines, après un pillage et une saisie froidement organisés par le régime de Vichy, l’Institut d’études des questions juives, officine nazie dirigée par la Gestapo jusqu’à la Libération …

Au travers de l’admiration esthétique de la réunion d’œuvres exceptionnelles, cette exposition nous invite à réfléchir sur une période sombre de notre Histoire et au-delà, de l’histoire de l’Humanité qui, si nous n’y prenons pas garde, court aujourd’hui encore, le risque de se retrouver à nouveau dans les tourments de l’intolérance.

A l’heure des individualismes et de la montée des populismes dans le monde, cette rétrospective artistique exceptionnelle constitue une bouffée d’humanisme universel à conseiller aux plus jeunes et aux moins jeunes…

Nicolas Callegari

Jusqu’au 23 juillet 2017

Musée Maillol
59/61, rue de Grenelle – 75007 Paris
de 10h30 à 18h30, tous les jours en période d’exposition temporaire. Nocturne le vendredi jusqu’à 21h30