Boilly, Chroniques parisiennes

Pour Diderot « c’est la présence de l’homme qui rend l’existence des êtres intéressante ».

Il en est de même pour Louis-Léopold Boilly, artiste inclassable, qui applique cette pensée à la peinture. Il s’est attaché à illustrer parfaitement la vie quotidienne des Parisiens pendant soixante ans, d’une révolution à l’aube d’une autre (1789 et 1848).

En effet, dans un contexte postrévolutionnaire, Boilly avait inauguré, dès 1787, un courant familier de peinture soignée à la hollandaise très « porcelainée », puis des silhouettes amusantes des fantaisies de la mode. Ainsi lorsqu’en 1794, Robespierre semble recommander la scène de genre, le tableau de vie quotidienne, pour les Salons, Boilly est déjà dans le thème.

Cette exposition monographique explore la carrière foisonnante de Boilly au travers de 130 œuvres qui invitent à découvrir la singularité de l’artiste, son humour et son inventivité.

Organisée à l’occasion de la publication du catalogue raisonné de l’artiste rédigé par Etienne Bréton et Pascal Zuber (édition Arthena, 2019), cette exposition sera l’occasion de découvrir plusieurs chefs-d’œuvre présentés pour la première fois en France et provenant de prestigieuses collections particulières.

Le parcours de l’exposition se déploie dans huit salles du musée abordant ainsi tous les aspects du talent de Boilly.

La visite commence par les différents visages de l’artiste. En effet, il s’est plu à se représenter dans une quinzaine d’autoportraits. Il se représente ainsi de manière singulière, en bon bourgeois parisien, dans Après le souper, à l’inverse des représentations classiques des autres artistes accomplis.

Il aime se dissimuler dans la foule de ses grandes compositions, en véritable témoin au regard original et souvent décalé des Parisiens. D’une œuvre à l’autre, le spectateur est invité à rechercher le visage de l’artiste dont la présence s’apparente à une signature.

Puis l’exposition se concentre sur ses peintures d’un Paris insolite.

A la grande Histoire, il préfère les petits spectacles de la vie quotidienne. On y voit des scènes animées de Paris et les mœurs de ses concitoyens. En peintre de scène de genre, attentif à l’anecdote, il s’attarde sur la traversée d’une rue sous la pluie avec Le passage de la planche.

Puis, l’exposition dévoile un Boilly caricaturiste et portraitiste de succès. Issu d’une collection privée, on peut y admirer 40 portraits réalisés par l’artiste sur les 5000 produits. Sa signature est caractérisée par la position du sujet, le format réduit inédit et l’encadrement toujours identiques.

Son goût pour la provocation comme pour la virtuosité technique se retrouve dans ses Trompe-l’œil, à l’extraordinaire qualité illusionniste.

En présentant un Trompe-l’œilau Salon de 1800, Boilly fait scandale. Il se joue des caractéristiques matérielles de son propre art en prenant pour sujet même du tableau l’estampe, la peinture ou le dessin.

Une salle est dédiée à une des passions de Boilly ; les innovations techniques et les instruments d’optiques qu’il collectionne, chambres noires, télescopes, lorgnettes, ou zograscopes.

Toutes les ressources de ces objets scientifiques lui permettent d’atteindre la perfection illusionniste dans ses fameux trompe-l’œil.

Enfin la dernière section est consacrée aux intérieurs parisiens et aux scènes libertines, en regard des trois œuvres de Boilly que comprend la collection Cognacq-Jay.

Ces scènes galantes, aux mœurs légères, interprétées dans un langage proche du théâtre de Beaumarchais, jouent sur la pluralité des plaisirs féminins et masculins.

Les œuvres de Boilly dévoilent l’intimité des boudoirs et les activités grivoises dans le goût du XVIIIe siècle, perpétuant une tradition libertine pour une clientèle connaisseuse des sous-entendus équivoques.

Les œuvres de Boilly, pleine d’humour et de détails à relever sont particulièrement attrayantes pour une visite d’exposition en famille.

Des cartels spécifiques pour les plus jeunes s’adressent aux enfants à partir de 7 ans et les invitent de manière ludique à suivre le parcours de l’exposition.

Pendant toute la durée de l’exposition, le musée propose également un programme d’activités à destination du public, famille et enfants, tel que la création de masque de Carnaval, les portraits, caricatures et grimaces, ou encore une énigme au musée à la recherche du chat farceur.

Une visite thématique pour la journée internationale des droits des femmes est proposée le 8 mars 2022, ainsi qu’un cycle de conférences et d’ateliers pour adultes (portrait au lavis, portrait à la sanguine ou portrait à la peinture à l’huile).

Commissariat général :

Annick Lemoine, directrice du musée Cognacq-Jay ; Sixtine de Saint-Léger, attachée de conservation du musée Cognacq-Jay

Commissariat scientifique :

Étienne Bréton, historien de l’art, directeur d’un cabinet de conseil et d’expertise en art ; Pascal Zuber, historien de l’art, directeur d’un cabinet de conseil et d’expertise en art.

Olivia Bellin-Zéboulon

Crédit photo :

Guillaume Benoît ; RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Philippe Fuzeau

Du 16 février au 26 juin 2022

Musée Cognac-Jay, 8 rue Elzevir, 75003 Paris

Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h

https://museecognacjay.paris.fr