La cinquième édition du prix Paris 1 Panthéon – Sorbonne pour l’art contemporain

Les 18 et 19 mai 2021 avait lieu au Bastille Design Center une exposition d’art contemporain mettant en valeur douze jeunes artistes : Mathieu Sauvat, Assoukrou Aké, Sarah Montet, Loïs Szymczak, Justine Germond, Yunyi Guan, Mirae Shin, Pauline Pilard, Tessa Gomez Orcel, Ketty Julien, Lucas Leclercq, Victoire Inchauspé.

À l’issue de cet événement deux prix ont été décernés : le prix du public, remporté par Ketty Julien et le prix du jury, composé de plusieurs professionnels de l’art, remporté par Loïs Szymczak.

Tous plus talentueux les uns que les autres ces jeunes étudiants en art utilisent des techniques très variées, différents matériaux et différents médiums (photos, vidéos, peinture, sculpture…) et ont pour la plupart un message à faire passer à travers leurs œuvres. C’était donc une exposition très polyvalente et plaisante à aller voir, découvrons sans plus attendre quelques-uns de ces artistes.

En entrant dans ce splendide lieu fait principalement de bois qu’est le Bastille Design Center notre regard est directement attiré par la petite pièce sur la droite dans laquelle se trouve des sculptures en bois et en argile.  Ceci est l’œuvre de l’artiste coréenne Mirae Shin qui a voulu représenter les petits espaces dans lesquels vivent les habitants des grandes villes. Clin d’œil au confinement, les pierres en argile remplissent tout l’espace de la structure en bois faite de plusieurs petites cases, un peu comme une prison dans laquelle on a été enfermé pendant plusieurs mois. L’artiste représente d’ailleurs au préalable cet espace en peinture sur toile.

Dans la pièce principale, on peut apercevoir une fiche de compétition en plongeon dans une boite en plexiglas, complémentaire de deux grandes plaques de bois au fond de la pièce recouvertes de plusieurs de ces fiches de compétition disposées côte à côte. L’œuvre de Loïs Szymczak, De très très haut à très très bas, se lit comme une séquence, une BD par laquelle il a voulu montrer le lien entre la compétition et l’art, deux domaines en apparence si différents et qui pourtant demandent chacun de la rigueur, des essais et des répétitions. La logique, qui saute aux yeux après en avoir été informé, est de voir dans les carrés noirs au centre des plaques une piscine de très haut puis de très bas.

Toujours dans la pièce principale mais sur la droite, Assoukrou Aké nous présente une œuvre très actuelle constituée de collage, peinture et sculpture à travers laquelle il dénonce les maux de notre société tels que le racisme, la violence ou encore le colonialisme. Dans l’espoir de tuer la trace, il explore les notions de guérison (qu’est le récit de son travail), d’espoir (d’un monde meilleur), de savoir (ancestral, en train de se perdre) et de transmission (d’une identité africaine).

À l’étage, dans les deux couloirs principaux, nous avons d’abord l’œuvre de Tessa Gomez Orcel sur le mur gauche qui est une série de photographies, La lucha libre, mettant en scène des femmes déguisées en catcheuses faisant un contraste entre la lutte féministe et le côté très machiste du catch. Comme un clin d’œil aux messages collés à même les murs qui dénoncent les viols et féminicides dans plusieurs villes, elle a décidé de coller ses photos à même le mur du bâtiment.

Sur le mur opposé, Pauline Pilard nous présente un triptyque d’œuvres faites de matières organiques avec lesquelles elle travaille beaucoup, notamment le sucre et la cire mais ici elle a aussi utilisé les cendres d’un arbre de chez ses parents. Elle travaille toujours avec le blanc et le noir pour laisser le spectateur interpréter l’œuvre comme il le souhaite. Certains voient ce triptyque comme des blessures, des paysages lunaires ou autres. Elle a fini par le nommer Concert d’humeur – Cancer tumeur.

 Dans les petites pièces qui entourent la salle principale, d’autres artistes sont exposés comme Ketty Julien qui nous fait entrer dans son univers avec des photos qui sont volontairement floues. Quand nous observons son travail c’est comme si on était dans l’objectif de son appareil photo avant la mise au point. L’installation de deux grandes photos sur des espèces de paravents crée un couloir dans lequel le spectateur passe pour être vraiment en immersion totale dans son univers, elle aime créer des espaces dans des lieux.

Dans une autre pièce, Victoire Inchauspé nous présente une œuvre qui symbolise le cycle de la vie avec des graines de pavot pour la naissance, un arc posé sur un support pour la mort, des fleurs de pavot séchées peut-être pour la vieillesse et le support est en forme de cercueil. Il y a aussi une dimension olfactive car le support/ cercueil est recouvert de cire dont on sent l’odeur. Dans des tons gris, noirs, marrons et blancs l’œuvre est très douce et nous fait nous interroger sur notre propre existence.

Lucas Leclercq dans une autre petite pièce, nous présente Ego, une œuvre constituée uniquement d’un casque en verre de lunettes qui représente la limite que l’on s’impose face au regard critique des autres. Une sorte de zone de confort qui recouvre tout notre corps mais de façon plus ou moins importante selon les parties du corps. Ce casque représente aussi le génie dans lequel l’artiste « s’enferme », intouchable, et auquel lui seul a accès. L’œuvre se regarde aussi à travers sa projection sur le plafond comme une sorte de kaléidoscope qui rappelle l’aspect souvent très religieux des œuvres d’art.

Enfin, dans le sous-sol très sombre, nous découvrons trois films en noir et blanc, œuvre de Yunyi Guan. En un clin d’œil est une œuvre qu’elle a réalisée après avoir eu le flash d’un visage dans un rêve. Elle a voulu alors capter les moments éphémères de la vie, notamment pendant ses ballades du confinement. La bande son des films est l’enregistrement de sa voix récitant un poème qu’elle a elle-même écrit. En voici un extrait : « Dans la prochaine vie, à part être une nouvelle fois humain, / Ou vous réincarner en animaux, en plantes. / En fait, on peut aussi devenir l’orage. / Tout le monde aura peur de nous, / Et puis, on n’aura plus peur de quiconque nous fasse du mal. / Je ne veux pas simplement l’admirer, je veux être l’orage. »

Tous très inspirés par le confinement et les évènements actuels ces artistes à fort potentiel sont promis un bel avenir.

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Texte et photos : Lison Desgrées du Loû