L’importance d’être constant

Cette pièce fut la dernière écrite par Oscar Wilde avant d’être incarcéré à cause de son homosexualité. Condamné pour grave immoralité, le dramaturge irlandais dérangeait pour le moins la société britannique, lui qui n’eut de cesse de moquer l’univers guindé et snob dans lequel il se plaisait pourtant d’évoluer. Dandy cynique et plein d’esprit, il prit dans son œuvre un malin plaisir à inverser les propositions, se vautrant tout à la fois dans un esthétisme revendiqué –son style en témoigne- et comme dans une forme d’apologie de la décadence. Moins connu que son plus grand succès, « Le portrait de Dorian Gray », « L’importance d’être constant » n’en est pas moins un texte majeur, truculent et drôlissime, où la haute bourgeoisie se complait dans l’oisiveté et le futile.

Comédie théâtrale irrésistible qui a probablement beaucoup inspiré un Sacha Guitry et bien d’autres auteurs du vaudevilles, l’intrigue se déroulait alors dans l’Angleterre victorienne, le titre comportant un jeu de mot symptomatique de Wilde, entre le prénom Constant et l’adjectif désignant la fidélité à ses principes. Il va sans dire que lesdits principes ne manqueront pas d’être bafoués d’un bout à l’autre des trois actes qui structurent la pièce. Le metteur en scène Arnaud Denis redonne tout son lustre à cette joute verbale, où les conventions morales se heurtent au romantisme, qualifiant à juste titre l’auteur de digne héritier de Molière et de Marivaux.

Et quel plaisir de découvrir une création aussi flamboyante, des somptueux costumes aux décors chatoyants que n’aurait pas renié un Donald Cardwell aux plus belles heures d’Au théâtre ce soir. S’il en était encore besoin, le casting emmené par une Evelyne Buyle tout simplement parfaite dans son rôle emporte ce chef d’œuvre de malignité et l’élégance subversive. Les comédiens jouent le jeu et jouent à se moquer d’eux-mêmes prenant ici et là des pauses affectées, créant ainsi un double effet égratignant la bourgeoise bienpensante et une forme de théâtre suranné qui se prendrait un peu trop au sérieux. Cette transposition dans les Années Folles ne fait que décupler le plaisir d’un spectacle pétaradant mais jamais vulgaire, sans le moindre temps mort. Les bravos hurlés par le public au terme de la représentation traduisent indéniablement la réussite de se montrer tout à la fois léger, profond et fin. Un incontournable pour les amoureux du théâtre, intellos ou juste bien/bons vivants.

David Fargier

Le pitch : Deux dandys de la haute société Londonienne découvrent qu’ils ont recours au même stratagème pour mener une double vie : ils s’inventent chacun un faux frère malade qui leur sert d’alibi, afin de satisfaire leurs escapades libertines.

Mais l’amour vient à s’en mêler, et il leur faudra faire un choix. Jack et Algernon pourront- ils continuer à mentir ainsi à leur entourage ? Pourront-ils éviter que la vérité éclate auprès de leurs fiancées respectives ? C’est sans compter que la vénérable Tante Augusta veille à ce que la morale soit respectée en toute chose… croit-on.

Bande annonce

L’importance d’être constant

Auteur : Oscar Wilde

Mise en scène : Arnaud Denis

Avec : Evelyne Buyle, Olivier Sitruk, Delphine Depardieu, Arnaud Denis, Nicole Dubois, Marie Coutance, Jean-Pierre Couturier, Gaston Richard et Fabrice Talon

Théâtre Hébertôt, 78 bis boulevard des Batignolles, 75017 Paris

Réservations