« Surprises au Rivau » : l’art contemporain s’invite au château et rêve en grand

Il est des lieux où le temps semble se lover dans les pierres, où l’histoire bruisse dans les feuillages, où les rêves trouvent, entre murailles et jardins, matière à s’incarner. Le Château du Rivau, perle nichée au cœur de la Touraine, est de ceux-là. Forteresse aux allures de conte médiéval, métamorphosée au fil des siècles en palais Renaissance puis en havre artistique, il accueille cette année encore une exposition d’art contemporain hors du commun.

Après la magnifique exposition de l’an passé (https://itartbag.com/effervescences-au-chateau-du-rivau/), depuis le 1er avril et jusqu’au 12 novembre 2025, les murs de ce château à l’âme ancienne se parent d’étrangetés et de merveilles : « Surprises au Rivau », tel est le nom donné à cette grande exposition qui fait dialoguer les œuvres les plus singulières de la collection privée du domaine. Une collection patiemment assemblée depuis quarante ans par les maîtres des lieux, Patricia et Éric Laigneau, et qui, comme les cabinets de curiosités d’autrefois, célèbre le rare, l’inattendu, le facétieux et le poétique.

Le château, théâtre d’étonnements

Lorsque l’on franchit les lourdes portes du château, on ne pénètre pas simplement dans un monument classé. On entre dans un récit, une fable que chaque salle raconte à sa manière, entre pierre, lumière, mémoire et fulgurance contemporaine. Ici, l’art ne vient pas orner les murs, il les interroge. Il ne se contente pas de plaire à l’œil, il bouscule, trouble, amuse, enchante.

C’est là toute la force de cette exposition qui, sous son titre presque espiègle, « Surprises », revendique une approche sensible et savante de l’art. Il ne s’agit pas d’une simple juxtaposition de styles ou d’époques, mais d’un dialogue intense, d’un échange fécond entre l’ancien et le présent, entre le mystère du passé et l’audace du contemporain.

L’humour en filigrane, le merveilleux en partage

Patricia Laigneau, cheffe d’orchestre de cette aventure esthétique, conçoit ses expositions comme des récits à plusieurs voix. Ici, l’humour est un langage : subtil, visuel, parfois grinçant, souvent tendre. L’art contemporain, trop souvent perçu comme hermétique ou provocateur, devient ici jeu de miroir, clin d’œil, invitation au sourire.

La scénographie, inspirée des cabinets de curiosités de la Renaissance, donne à chaque salle une atmosphère singulière. Les œuvres choisies s’y lovent comme des énigmes : certaines frappent par leur étrangeté, d’autres émerveillent par leur finesse ou leur drôlerie. Le visiteur, loin d’un parcours muséal classique, se trouve plongé dans une quête sensible, presque initiatique, où chaque salle est une surprise, un monde.

Une déambulation en six actes :

La Salle des Portraits

Dans cette première halte, les visages du passé se confrontent à ceux du présent. Portraits à l’huile des anciens seigneurs du Rivau croisent les regards figés et énigmatiques des photographies de Valérie Belin ou Delphine Balley. Qui sommes-nous, au fond, derrière les apparences ? Où s’arrête la mémoire, où commence la fiction ? Autant de questions que soulève cet entrelacs de regards.

Le Grand Logis, entre naturalia et artificialia

Plus loin, dans le Grand Logis, l’étrangeté gagne un souffle baroque. Taxidermies d’antan, trophées poussiéreux et créatures empaillées deviennent les partenaires d’un bestiaire rêvé : les chimères de Julie Legrand, les corps-sculptures de Julien Salaud, les êtres absurdes de Christian Gonzenbac viennent perturber la quiétude des vitrines. La vie, ici, est toujours sur le point de reprendre.

La Salle du Festin

C’est dans la Salle du Festin que l’ironie prend des accents gourmands. Une grande table se dresse, un banquet visuel où se croisent abeilles géantes, céramiques historiques, objets détournés, symboles religieux. Tout ici célèbre le partage, l’excès, la fête, mais aussi ses limites. Une manière drôle et douce d’interroger notre rapport à la consommation, à l’abondance, à la cérémonie.

La Salle des Dames

Les femmes y règnent sans partage. Non pas celles des tableaux classiques, mais des Vénus mutants, des Mona Lisa rebelles, des sorcières savantes. ORLAN, Julie des Monstiers, Jean-Luc Moerman et d’autres y livrent une réflexion tour à tour tendre et irrévérencieuse sur les figures féminines de l’Histoire. Les muses deviennent actrices, les objets du regard, sujets du discours.

Jeanne d’Arc revisitée

Symbole de foi, de courage, de pureté… Jeanne d’Arc, héroïne nationale, devient ici matière à art. Mais un art coloré, hybride, incarné. Pierre et Gilles, Charles Fréger, Julien Salaud réinventent sa légende, la peuplent de couleurs pop, de matières inattendues. Dans ce panthéon renouvelé, Jeanne devient femme, image, icône, parfois même parodie.

Le Cabinet du Seigneur

Enfin, au sommet du parcours, s’ouvre une alcôve du mystère. Le Cabinet du Seigneur, rempli d’objets symboliques, évoque la quête alchimique, le pouvoir de l’image, la fascination du rare. Ici, les vanités se mêlent aux blasons détournés, les os à l’émeraude, la fragilité humaine à la beauté minérale. Une salle suspendue hors du temps.

L’art à ciel ouvert : jardins enchantés

Mais le Rivau, ce n’est pas qu’un château. C’est aussi un jardin de légendes, une promenade de six hectares où la sculpture dialogue avec les saisons.

Ici, les œuvres s’installent dans l’herbe, sous les arbres, entre les massifs de roses. Une grenouille géante, moulée dans des déchets de Loire par Bryan Crockett, trône comme une sentinelle écologique. La « rose sans pourquoi » de Lionel Estève, installation fragile et colorée, semble pousser entre les allées. Plus loin, une cabane étrange signée Julien des Monstiers invite au rêve et à la réflexion.

Chaque sculpture devient présence vivante, chaque détour un nouveau monde. Le jardin devient théâtre, la nature, complice de l’art.

Avec près de 5000 espèces de plantes et fleurs, les jardins changent au fil des saisons offrant mille couleurs, comme ces roses (Les jardins du Château du Rivau sont d’ailleurs classés Conservatoire de la Rose Parfumée par le CCVSConservatoire des Collections Végétales Spécialisées – avec 505 variétés !)

Ne soyez pas surpris si vous y croisez des paons majestueux (Jules et Jim, les blancs, Pierre et Paul, les gris)

Un conte d’aujourd’hui

À l’heure où l’art contemporain cherche trop souvent à choquer, à exclure ou à théoriser à l’excès, « Surprises au Rivau » trace un chemin à contre-courant. Elle fait confiance à l’étonnement, à l’intelligence du regard, à la joie simple du “tiens, je ne m’y attendais pas”. Elle démontre que l’on peut allier exigence et humour, beauté et réflexion, savoir et fantaisie. Loin des musées intimidants, le Château du Rivau offre un parcours ouvert, joyeux, accessible. L’enfant s’y émerveille, l’amateur d’art y médite, le promeneur s’y perd avec bonheur.

Plus qu’une exposition, c’est un conte, une fête, une expérience sensible où chacun, quel que soit son âge ou son bagage culturel, trouve une place.

Un lieu de vi(e)llégiature :

Dans le Logis Renaissance, sept chambres doubles de grand luxe ont également retrouvé tout leur cachet et permettent aux visiteurs de séjourner et d’expérimenter à la fois la vie de château et l’ambiance d’une collection privée d’art contemporain. Le Site du Rivau bénéficie de la marque Qualité Tourisme TM depuis décembre 2010, attribuée par le Ministère du Tourisme.

Ses deux restaurants vous accueillent chaque jour avec des plats de saison et des produits sourcés :

La Table des Fées, située face au donjon, est ouvert tous les midis.

Le Jardin Secret, restaurant gastronomique au cœur de la cour d’honneur, propose une cuisine raffinée pour le dîner.

(https://itartbag.com/la-vie-de-chateau-au-chateau-du-rivau/ )

Des évènements thématiques sont proposés tout au long de l’année : soirées Apé Rivau, concerts et théâtre, chasse aux œufs (Pâques), joutes médiévales, fête de la rose (en juin), fête de la citrouille et de l’automne, Halloween, … à découvrir dans l’agenda : https://www.chateaudurivau.com/fr/agenda.php

Le Château du Rivau est un lieu enchanteur qui, depuis deux ans, a envoûté It Art Bag

Véronique Spahis

du 1er avril au 12 novembre 2025

Château et Jardins du Rivau, 9 rue du Château, 37120 Lémeré

Ouvert tous les jours du 29 mars au 11 novembre 2025 (Du 29 mars au 30 avril de 10h à 18h, De mai à fin septembre de 10h à 19h, du1er octobre au 11 novembre de 10h à 18h)

www.chateaudurivau.com