La fontaine des Innocents, un chef-d’œuvre rénové

Au Musée Carnavalet, une exposition de la période de la Renaissance jusqu’à nos jours a lieu sur un des monuments mythiques de Paris, La fontaine des Innocents, histoires d’un chef-d’œuvre parisien.

Cette exposition est majoritairement dédiée à un des plus grands sculpteurs de la Renaissance, qui est l’artiste qui a confectionné les façades de la fontaine des Innocents, Jean Goujon.

On ouvre ce parcours chronologique par des œuvres que le sculpteur a réalisées autres que la fontaine, on passe notamment par des cariatides de nymphes et des bas-reliefs de l’église de Saint-Germain-L’auxerrois. Il sculpte la Déploration sur le Christ Mort en 1544, avec un éventail de passions.

Bien que ce soit un des sculpteurs les plus prestigieux de son époque, la vie de Jean Goujon reste bien mystérieuse et est teintée de nombreuses zones d’ombres… On ignore véritablement sa date de naissance, de mort et ses circonstances. Ce sont des déductions grâce à des témoignages ou des lieux qui permettent de dresser des théories et d’en apprendre davantage sur cet artiste. Un mystère qui se ressent aussi dans son style puisqu’une plaque funéraire qu’il a réalisée a longtemps été attribuée à un autre artiste.

La fontaine des Innocents est présentée comme la première architecture pérenne à l’entrée royale d’Henri II en 1549.

C’est dans un univers de bleu aquatique que nous découvrons les cinq originales nymphes de Jean Goujon, puisque celles dans la fontaine sont des copies produites par moulage. On y retrouve des traces de l’âge, une pierre lessivée par le temps et les circonstances de la météo.

Les nymphes et les techniques de Jean Goujon sont sources d’inspiration pour de nombreux artistes, parmi eux on s’arrête sur Augustin Pajou (1730-1809). C’est en contemplant son travail sur l’hôtel de Voyer d’Argenson où il reprend l’arrondi des nymphes de Goujon qu’on est frappés par cette ressemblance.

Une telle ressemblance que c’est Pajou qui est sélectionné pour faire les deux nouvelles façades en 1788. Il remplace également les crachoirs d’eau par des têtes de méduse. La fontaine prend donc un caractère décoratif alors qu’elle était à l’origine principalement perçue comme utilitaire, car elle alimentait le quartier des Halles d’eau.

La fontaine des Innocents est soumise à de divers changements, notamment avec des rajouts de façades mais aussi avec les travaux qu’elle subit à travers le temps. En 1765,  des travaux sont organisés pour éradiquer le cimetière des Innocents puisque les inhumations ne sont plus acceptées dans les murs de Paris. Elle sera même déplacée, c’est pourquoi elle est par la même occasion transformée en édicule.

Ce monument est aussi le point d’orgue, le podium du quartier, du marché des Halles et de la rue Saint-Denis. Un monument immuable, qui traverse le temps, les joies, les tristesses, les révolutions de Paris. Le tableau Le Marché et la fontaine des Innocents de John James Chalon (1778-1854) est plus que parlant sur le rôle et la place de cette fontaine.

Par la suite les nymphes de Goujon, ont donné une grande inspiration aquatique aux artistes. Le chef-d’œuvre d’Alain Jacquet (1939-2008), La Source d’Ingres, reprend la position mythique des nymphes de Goujon pour réaliser sa Vénus. Même des publicités modernes reprennent cette pose, avec Vanessa Paradis photographiée par Jean-Paul Goude qui pose pour Chanel en 1992.

À la fin de l’exposition, on peut voir de nos propres yeux Bruno Perdu rénové une œuvre dans un laboratoire, qui nous explique que la majorité de leur rôle est de nettoyer, consolider et retoucher.

Après cette exposition on n’a qu’une envie, voir la fontaine des Innocents face à nous. Mais patience, les travaux de rénovation seront finis début juin…

Naïs Carst

Du 24 avril au 25 août 2024

Musée Carnavalet, 23 rue de Sévigné, 75001 Paris

https://www.carnavalet.paris.fr/