Metamorphosis

Le 6 octobre dernier, nous partagions un premier article (http://itartbag.com/morpho-par-quai-36/)  dans lequel nous présentions les fabuleux projets portés par Quai 36, dans l’objectif de réhabiliter l’art contemporain dans des lieux historiques, parfois communs, parfois inattendus mais toujours avec l’intime conviction d’être vu et vécu. A l’ancien musée Pierre Cardin à Saint-Ouen d’abord, le morpho qui séjournait les lieux continue son voyage. Nous voici désormais à Romainville, dans l’Est parisien où il a élu domicile dans les lieux gigantesques et chargé d’histoire de la Chaufferie, site culturel créé par la Fondation Fiminco.

Dans une exposition carte blanche, plongez dans l’univers enchanté de Metamorphosis.

La métamorphose ou la crise de l’apparence, les 8 artistes conviés sur cette proposition ont approché l’espace pour accoucher de quelques travaux monumentaux. De prime abord, ce lieu est étonnant : ces escaliers de fer en colimaçon qui surplombent de gigantesques chaudières, ou ce plafond, haut et étourdissant, qui révèle ces fenêtres aux petits carreaux mais dont la lumière pénètre et rétorque son image sur ce sol gris, presque brillant. Une question fait des allers-retours constants, on se demande comment.

Ces fils orange qui traversent la pièce d’un bout à l’autre, en diagonale, de haut en bas et dont cette rigidité se mêle à la souplesse, comment cela est-il réalisable ?

Il y a une forme de passage, peut-être que ces centaines de fils sont l’allégorie de l’humanité. Une direction commune, d’un point originel (la naissance) à un point plus incertain, culminant (la mort), entre les deux, l’existence.

Plus loin, cet orange filé est assemblé. Des rideaux tombants, qui sortent du plafond afin de se balancer dans le vide ; ils rencontrent la nuance du bleu et du rouge et donnent vie à un spectacle de mouvements. Quelque chose de naturel s’y dégage, comme si ces rideaux étaient le reflet caché d’une réalité familière, on pense à ces champs de blé qui font de la balançoire au gré des vents ou à ces arbres qui couvrent les parcs, leurs branches couvertes de feuilles. On se souvient de leurs chaleurs et de leurs énergies protectrices, à l’abri de la pluie, des regards, lors d’un jeu ou d’une promenade.

Ces souvenirs nous amènent à tourner la tête vers cette fresque sensationnelle, tant par sa taille que son contenu. Quatre chevaux galopants, ils impressionnent. Au centre, un personnage  inspiré des sculptures antiques, il se tient droit et son regard déconcerte. Cette scène est presque Homérique, mais pourtant, les références artistiques fusent : c’est le fameux duo de graffeurs PichiAvo. En mêlant, le graffitis au mythe, ils créent un monde parallèle, un mélange de références astucieuses qu’il est agréable de regarder.

Mais ce n’est pas tout, ce jeu de métamorphose mural prend une place particulière au sein de cette exposition. Ces fresques investissent les murs, envahissent les pensées comme Méduse qui cherche à tout prix le regard. Ces performances sont uniques, et les artistes, bien que différents, partagent une vision du monde et une conscience : le vivant et sa projection. Metamorphosis est un récit, avant tout une empreinte imaginaire qu’il est possible de déformer et de s’approprier. Les artistes engagés dans ce projet invitent le spectateur à pénétrer la matière plastique et même à jouer avec les oeuvres. Elles deviennent mentales ; il s’agit avant tout de les capter. S’autoriser à transformer,  feindre la convention dans une lecture personnelle et intime.

Artistes exposés : Alex Chinneck, Mathieu Merlet Briand, Fikos, L’Outsider, Quintessenz, PichiAvo, Sébastien Preschoux, Waone.

Irina Bengouirah

Du 8 octobre au 27 novembre 2021

La Chaufferie – 43, rue de la commune de Paris, 93230 Romainville

Du mardi au samedi de 14 heures à 18 heures. Entrée libre et gratuite.