Chroniquer un spectacle n’est jamais chose aisée. Pour conserver toute la fraîcheur du spectateur lambda, je me refuse le plus souvent à lire le dossier de presse, me laissant attirer par le pitch décrivant sommairement l’intrique, ou bien encore par la présence à l’affiche d’un comédien ou d’un metteur en scène m’ayant déjà tapé dans l’œil. « Amour amère » n’aura pas fait exception à la règle et bien m’en a pris. Car de cette pièce, il faut en dire un minimum. Tout l’intérêt réside en effet dans l’inconnu vers lequel nous conduit l’auteur. On le comprendra très vite, le personnage central est confronté à la douleur, à la perte de l’être aimé, à la difficulté indescriptible de poursuivre sa route, aussi courte soit-elle, sans verser dans la rage, la folie ou le désespoir.
Mais ce veuf-là semble tourner autour du pot. Il cache sa tristesse derrière une attitude qu’on pourrait qualifier d’arrogante, en voulant aux dieux et aux hommes l’ayant précédé dans la vie de la défunte, de ne pas avoir su apprécier l’être exceptionnel qu’elle incarnait, et de ne pas l’avoir rendue heureuse et folle d’amour comme lui seul aura été capable de le faire. Le deuil constitue le plus âpre des combats. Honorer la mémoire de celle qui nous a quittés, ne faire céder à la sensiblerie mais témoigner dignement de sa peine, ne pas verser dans la rancœur ou les règlements de comptes… autant de challenges ô combien difficiles à accomplir lorsqu’on porte en soi depuis des décennies le secret le plus inavouable.
Jean-Pierre Bouvier fut récompensé au Festival d’Avignon et ce n’est que justice tant son engagement physique frappe droit au cœur. Il lutte sur scène, tel un ours en cage. Mais contre quoi ? Contre qui ? En révéler davantage serait un crime que je me refuse de connaître. Alors pour vous inciter à plonger à votre tour dans l’abîme insondable de cette histoire d’amour hors du commun, Vents d’Orage s’est lancé dans une danse verbale avec le metteur en scène et comédien de génie, pour donner envie en évitant précautionneusement le pourquoi du comment :
David Fargier
Le pitch : Une histoire d’Amour hors du commun qui bouleversera tous vos préjugés.
À la veille de l’enterrement de sa femme, Edouard évoque leur amour peu banal dont le récit s’achève sur un coup de théâtre qui donnera un sens à sa vie et interrogera la nôtre.
Amour amère
Auteur : Neil Labute ; Mise en scène : Jean-Pierre Bouvier ; Avec : Jean-Pierre Bouvier
Jusqu’au 18 décembre 2021, du jeudi au samedi au théâtre La Bruyère
puis à partir du 3 janvier à la Comédie Bastille, 5 Rue Nicolas Appert, 75011 Paris
Théâtre La Bruyère, 5 rue La Bruyère, 75009 Paris