Présenté lors de la cérémonie d’ouverture du Festival de Cannes 2025, hors compétition, Partir un jour est le premier long-métrage de la réalisatrice et scénariste Amélie Bonnin. La lauréate du César du meilleur court-métrage 2023 confronte son public aux tensions intérieures, familiales et affectives d’une cheffe montante du paysage gastronomique parisien.

Alors qu’elle s’apprête à ouvrir un restaurant à Paris avec son compagnon, Cécile Béguin, interprétée par la chanteuse et actrice Juliette Armanet, est contrainte de retrouver son Loir-et-Cher natal à la suite d’un énième infarctus de son père. Rendue célèbre pour sa participation à l’émission Top Chef, où elle a pour habitude de critiquer ouvertement le restaurant routier familial, les retrouvailles sont tendues. La rencontre fortuite de son amour de jeunesse vient aussi bousculer son séjour, qui ne devait durer que quelques jours.
Sorti en salle le 14 mai 2025, soit le lendemain de sa présentation au Festival de Cannes, ce « film musical » tient son nom de la chanson du groupe de pop français 2Be3, incontournable à la fin des années 1990. Le titre est repris par Juliette Armanet, qui l’interprétait déjà dans le court-métrage homonyme d’Amélie Bonnin, sorti en 2021. Le choix du titre de ce film d’une heure et demie était donc tout trouvé, d’autant qu’il permet de donner « des indices sur le film auquel on a affaire », selon la cinéaste.
Le passage du dialogue au chant tout au long de l’œuvre cinématographique est pourtant source d’étonnement pour le spectateur. « Alors on danse » de Stromae, « Cécile ma fille » de Nougaro ou encore « Paroles, paroles » de Dalida : quelques grands classiques de la chanson populaire francophone ponctuent le rythme de la narration. L’occasion d’exprimer les non-dits de chacun des personnages. « La musique populaire parle bien mieux de nos émotions que nous-mêmes », précise Juliette Armanet lors de la conférence de presse donnée par l’équipe du film le lendemain de sa projection au Festival de Cannes.
Malgré les sujets souvent sensibles abordés dans ce drame, l’humour reste au cœur de l’intrigue. Les rires du public se mêlent souvent aux éclats du grand écran. Les ruptures de ton allègent une atmosphère que des thèmes comme une grossesse indésirée ou un amour impossible alourdissent. En sortant volontairement des codes traditionnels de la comédie musicale et des films romantiques, Amélie Bonnin retrouve la magie du réel, de ses maladresses et tente de renouveler deux genres cinématographiques bien établis. Mais ce ton léger est vu par certains comme une forme de naïveté ou d’optimisme illusoire. Un esprit « feel good » assumé par la quatrième réalisatrice dont la création ouvre le Festival de Cannes, et qui souhaite que ses personnages évoluent vers la guérison et l’apaisement, sans cacher leurs fêlures et la complexité de leur quotidien.
Entre gastronomie, chorégraphies, patinage et moto-cross, Partir un jour est une invitation à « penser à demain », en pansant les blessures d’hier.
Irène Gajac