Antoine Caron (1521-1589, Le théâtre de l’Histoire

Pour une escapade hors de Paris qui conjugue art, histoire et paysage le château d’Ecouen est une destination incontournable, tout comme son voisin, le château de Chantilly.

Le château d’Ecouen abrite le musée de la Renaissance depuis 1969, grâce à André Malraux alors ministre chargé des Affaires culturelles.

C’est donc dans ce lieu édifié entre 1538 et 1550 par Anne de Montmorency, connétable de France, qu’est exposée la prestigieuse collection d’arts décoratifs, de manière à évoquer un intérieur princier dans un parti muséographique où mobilier, orfèvrerie, céramique, verrerie, émaux, peinture, tapisseries et tentures répondent à l’architecture. Cette présentation permet ainsi une compréhension parfaite de la création artistique et de l’art de vivre à la Renaissance.

Pour sa nouvelle exposition autour du dialogue entre les arts, le musée de la Renaissance a choisi de replacer sur le devant de la scène l’artiste français Antoine Caron (1521-1589) qui a été l’un des plus influents de la seconde moitié du XVIe siècle.

Cet artiste à la carrière glorieuse n’a jamais fait l’objet d’une exposition à la hauteur de sa réputation, alors qu’il a été au service de cinq rois de France successifs, de François Ier à Henri IV et de la reine mère, Catherine de Médicis.

L’exposition Antoine Caron (1521-1589), Le théâtre de l’histoire, co-produite avec la RMN-GP, réunissant des œuvres d’Antoine Caron et de son cercle (peintures, manuscrits, dessins, gravures, tapisseries), témoigne des multiples facettes du génie et du rayonnement de cet artiste oublié, ainsi que de la polyvalence du métier de peintre à la Renaissance.

Certaines des œuvres de cette exposition n’ont jamais été présentées au public.

Mais c’est surtout la réunion et l’exposition dans la même pièce, pour la première fois en France depuis 1589, les huit tapisseries de la Tenture des Valois, commandée par Catherine de Médicis qui vaut particulièrement le déplacement.

A travers un parcours inédit et des prêts exceptionnels, notamment du Musée du Louvre, du Musée de Chantilly, et de la Galleria degli Uffizi, l’exposition interroge sur la place de cet artiste, figure centrale de la Renaissance française, comme à la fois inventeur, fournisseur de modèles dont l’influence se perpétue après sa mort.

Le début de l’exposition revient sur la formation d’Antoine Caron sur le chantier du château de Fontainebleau, notamment à travers ses liens profonds avec les peintres italiens Rosso Fiorentino, Primatice et Niccolo dell’Abate. En s’imprégnant de l’art sensuel et érudit de Niccolo dell’Abate, Antoine Caron s’affirme comme son digne successeur dans tous les grands genres artistiques : peinture d’histoire, scénographie, allégorie, décor et paysage.

Dans cette section plusieurs portraits de l’artiste sont exposés afin de témoigner de la popularité dont jouit Caron à cette époque.

Le parcours continu sur l’influence de Caron comme fournisseur de modèles. Même si l’on ignore s’il est à la tête d’un atelier, s’il forme des apprentis ou s’il est entouré d’assistants, son art est à tel point populaire que son style est repris aussi bien visuellement que techniquement par des peintres qui gravitent autour de lui.

Les modèles qu’il fournit sont destinés à être transcrit dans diverses techniques, peinture, dessin, sculpture et tapisserie.

La faveur dont il jouit auprès des Valois justifie aussi sans doute l’intérêt qu’il a pu susciter auprès de ses confrères, comme l’on peut le remarquer pour le traitement du sujet de La mort de la femme de Sesto présenté lors de l’exposition.

Dans les années 1570-1580, Antoine Caron réalise un dessin dont il tire le sujet d’un cours passage de l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien. La redécouverte de cette feuille inédite atteste que Caron a réfléchis murement à une iconographie érudite qui a ensuite inspiré ses contemporains. On peut ainsi admirer deux reprises de ce dessin par d’autres peintres de son époque.

La section suivante est la pièce maîtresse de cette exposition unique, puisqu’il s’agit de la Tenture des Valois.

Cette tenture commandée par Catherine de Médicis, se compose de huit tapisseries qui n’ont pas été revu ensemble depuis leur arrivée à Florence en 1589.

Leur présentation, côte à côte, dans un décor contemporain de leur création est donc tout à fait exceptionnelle.

La déambulation dans la galerie permet de comprendre la genèse complexe de la tenture, probablement issue des ateliers Bruxellois Willem de Pannemaker, dont le tissage se situe autour de 1575.

Les compositions sont associées à plusieurs dessins de Caron réalisés vers 1573 et 1574, où il a réalisé des portraits gravés, dessinés ou peints des Valois, afin de montrer que les lissiers bénéficiaient d’une documentation variée pour réaliser les tentures.

Dans le contexte tourmenté des Guerres de religion, la tenture des Valois répond à un programme dynastique et diplomatique certain, afin de monter une image fantasmée d’éclat et d’unité faisant oublier la discorde familiale.

L’exposition s’achève sur deux sections révélant l’étendue de la maîtrise de Caron pour divers sujets, tel que l’Antiquité ou les Evangiles.

Comme ses contemporains, Caron s’est intéressé à l’Antiquité, mais n’ayant jamais quitté la France, ses inspirations sont souvent livresques.

Chez Caron, l’Antiquité sert de prétexte à la figuration de riches triomphes, servant aussi à l’exaltation des Valois dans des allégories érudites de l’âge d’or et de l’éternelle abondance, comme dans Les Saisons, où le peintre réunit les divinités de l’Olympe sur de somptueux chars conduits par des nymphes.

La présentation de l’ultime chef-d’œuvre du peintre, La résurrection du fils de Naïm, permet de comprendre l’apport de Caron pour les générations suivantes. La représentation des figures dans un ballet chorégraphié, aussi d’une nature majestueuse, appelle les développements ultérieurs de la grande peinture d’histoire française, qui se souviendra de cette leçon de classicisme et d’idéal.

Les visites conférences de l’exposition ont lieu à 15h30 les samedi et dimanche et pendant les vacances scolaires de la zone C (7 euros en sus du droit d’entrée).

Des visites-atelier, les 26 avril, 5 juin et 2 juillet 2023 de 14h à 17h propose aux familles de découvrir le château et la vie de cour à la Renaissance, puis en écho à La Tenture des Valois, Philippe Lemoine, danseur spécialisé dans la danse ancienne invitera les participants à une initiation à la danse de la Renaissance.


Durant l’exposition, le musée national de la Renaissance – château d’Écouen propose également une programmation culturelle spécifique mêlant musique, poésie et danse.

Pour la Nuit des musées, le 13 mai 2023, les élèves d’Ecouen sous la direction de Philippe Lemoine, nous invitent à les rejoindre pour un florilège sur les danses de la Renaissance dans la grande salle de la Reine.

Le spectacle Catherine de Medicis, le pouvoir et la musique est une création autour de l’exposition par l’ensemble Comet Musicke. Ce spectacle gratuit, le 10 juin 2023 (sur réservation au 01 34 38 38 50) fera dialoguer la musique avec les œuvres présentées illustrant les somptueuses fêtes organisées à la cour de Valois.

Enfin, le 1er juillet, l’ensemble Il Ballo propose de revivre certains ballets issus de deux traités de danse : Il Ballarino de Fabrito Caroso et Le Gratie d’Amore de Cesare Negri. Ce concert sera suivi d’un bal Renaissance. L’ensemble Il Ballo invitera le public à danser et à partager un agréable moment de convivialité.

Le catalogue de l’exposition, publié par les éditions de la RMN-GP, sous la direction de Matteo Gianeselli, commissaire de l’exposition, présente une monographie consacrée au dialogue étroit entretenu entre les arts, où le dessin répond à la tapisserie et à la sculpture, la peinture au vitrail et à la gravure.

Cette exposition s’inscrit dans une démarche partagée avec le musée de l’Armée et le musée de Condé à Chantilly pour l’organisation d’une saison faste et tragédie à la Renaissance. Le public est ainsi invité à se rendre également dans ces deux autres musées présentant des expositions faisant écho à celle d’Antoine Caron (1521-1589) Le théâtre de l’histoire.

Commissariat : Matteo Gianeselli, Conservateur du patrimoine au musée national de la Renaissance

Olivia Bellin-Zéboulon

Crédit photo : Art Digital Studio

Du 5 avril au 3 juillet 2023

Musée national de la Renaissance – château d’Ecouen, 95440 Ecouen

Musée ouvert tous les jours sauf le mardi – de 9h30 à 12h45 et 14h à 17h45

www.musee-renaissance.fr