Chéri Samba dans la collection Jean Pigozzi

Artiste à la fois global et profondément ancré dans sa culture congolaise et kinoise, Chéri Samba, dessinateur devenu « peintre-journaliste », est sans conteste l’un des peintres les plus célèbres. Figure essentielle du mouvement de la « peinture populaire » congolaise, un art urbain qui a émergé dans les années 70, Samba découvre très tôt une vocation pour le dessin, quitte l’école à 16 ans et rejoint la bouillonnante capitale Kinshasa où il devient peintre d’enseignes publicitaires tout en publiant des bandes-dessinées qui lui valent une certaine notoriété.

Il ouvre son propre atelier en 1975, réalise tout d’abord des travaux de commande puis impose son style avec une peinture figurative et narrative très colorée où il se met en scène et incorpore des textes en lingala, en kikongo et en français, pour mieux faire passer ses messages et retenir l’attention du spectateur. Il appellera ce procédé la « griffe sambaïenne » et ses tableaux, des « peintures à bulles ». Chroniques du quotidien, des mœurs, conflits sociaux, moraux et politiques, Samba se nourrit de l’actualité, il interpelle, dénonce, caricature et provoque, le plus souvent avec humour.

Signant d’abord ses toiles : « Dessinateur Samba », il prend en 1979 le nom d’artiste « Chéri Samba », revendiquant sa stratégie artistique de « starification » : Samba veut devenir un peintre aimé et reconnu de tous. Il remportera très vite du succès, participant à des expositions à Kinshasa, au Congo, puis dès 1982 en France – où il fait un premier séjour à Paris à l’invitation du magazine prescripteur Actuel.

Exposé depuis dans le monde entier, Chéri Samba est fier à raison de son rayonnement international, qui vient contredire les anciens préjugés sur un art africain ghettoïsé. « Je suis devenu universel » aime-t-il déclarer.

Chéri Samba dans la collection Jean Pigozzi

Cette exposition au Musée Maillol est la première grande exposition monographique de l’œuvre du peintre couvrant quarante ans de création. Avec plus de 50 tableaux, des années 70 à nos jours, elle présente un parcours à travers cinq thématiques majeures de son œuvre :

L’autoportrait comme usage du monde : Afin d’esquiver les contestations éventuelles des individus pouvant se reconnaître dans ses tableaux, Chéri Samba « performeur-sapeur » dans l’âme et dans l’imagination, décide très tôt de recourir à l’autoportrait, qu’il décline dans un grand nombre d’œuvres, procédé qui lui permettra aussi d’augmenter sa notoriété.

La femme multiple : Mère, épouse, maîtresse, femme d’affaires ou prostituée, la femme kinoise moderne traverse la vie et l’œuvre de Samba.

Kinshasa, le Congo et l’Afrique : Kinshasa, ville de tous les possibles, ville d’ambiance que tout Congolais qui se respecte doit avoir fréquenté au moins une fois dans sa vie, métropole tentaculaire et première ville francophone au monde est la patrie d’adoption de Chéri Samba qui y vit et y travaille depuis 50 ans.

Géopolitique : Chéri Samba s’intéresse au monde et à l’actualité qui l’interpelle et l’inspire sans relâche, élargissant le champ de ses dénonciations et questionnements à des thématiques et évènements mondiaux : la traite négrière, à qui a-t-elle réellement profité ?

Histoire de l’art revue et corrigée : Chéri Samba, parce qu’il compte parmi les premiers artistes africains reconnus en Occident, intègre dans sa peinture une vision subjective et critique d’une histoire de l’art occidentale qu’il considère ethnocentrée et faussée.

Commissariat : Jérôme Neutres et Elisabeth Whitelaw

Du 17 octobre 2023 au 7 avril 2024

Musée Maillol, 61 Rue de Grenelle, 75007 Paris

Ouvert tous les jours de 10h30 à 18h30 – Mercredi : jusqu’à 22h


www.museemaillol.com

photos : Véronique Spahis