Le Rubik’s cube fête ses 50 ans

Le Rubik’s Cube, cet objet emblématique qui a tantôt frustré, tantôt ravi, une personne sur cinq dans le monde, y compris des célébrités, telles que Zsa Zsa Gabor, Will Smith ou Léon Marchand…. fête, cette année, ses 50 printemps.

Dédicaces le 14 octobre 2024, Gallérie Lafayette avenue des Champs-Elysées@ Spin Master

En effet, il y a déjà 50 ans de cela, Ernő Rubik, un jeune professeur hongrois, donnait vie à un cube « puzzle 3D » qui allait bouleverser le quotidien de milliards de personnes à travers le monde. Dès sa commercialisation, cet objet énigmatique, baptisé du patronyme de son créateur, le Rubik’s Cube, a su susciter l’engouement chez les adultes comme chez les enfants : il attire, intrigue et parfois rend dingue, aussi bien les joueurs que les mathématiciens. Et passionne autant les élèves que leurs professeurs. Il a cependant su aussi susciter la jalousie : on l’a ainsi rendu responsable de bien des maux, divorces, baisses des naissances, addictions… La presse l’a même qualifié « d’arme de destruction massive créée par des communistes hongrois pour déstabiliser l’ouest du bloc soviétique. » Rien que ça. Et pourtant, depuis son invention en 1974 et ses 500 millions d’exemplaires écoulés à travers le globe, le Rubik’s Cube n’a, hormis avoir quelque peu agacé la Chine, provoqué ni guerres ni conflits politiques. Bien au contraire, il fédère bien plus qu’il ne divise.

Pour célébrer son succès interplanétaire ainsi que son anniversaire, des festivités ont été organisées en octobre dernier en plein cœur de Paris. Et, pour le plus grand bonheur des nostalgiques, Cubeologists et Cubeaholics de l’objet cubique, son père, Ernő Rubik (l’Einstein de la géométrie tridimensionnelle), a pris part aux célébrations – l’occasion pour lui aussi de fêter ses 80 printemps et de partager avec ses fans sa fascinante épopée au côté de son casse-tête légendaire.


« Je m’intéressais à la géométrie, à la construction, au travail en trois dimensions et je cherchais un outil pour comprendre les transformations 3D »

Ernő Rubik et son Rubik

Ernő Rubik à la conférence organisé par Spin Master, l’entreprise canadienne qui possède la marque depuis 2020, au Théâtre 13E art 30, Place d’Italie, 75013 Paris @Virginia Ennor

Ernő Rubik, c’est un peu une combinaison unique entre Pablo Picasso, Tony Curtis et Albert Einstein. Picasso pour son esprit créatif, son goût des couleurs chatoyantes et des formes géométriques. Tony Curtis, pour son charme naturel et ses yeux bleu anthracite. Puis, Einstein, pour son amour des énigmes complexes et son allure de prof légèrement échevelé. Tibor Laczi, un représentant en informatique et passionné de mathématique qui jouera un rôle essentiel dans la commercialisation du Rubik’s Cube à l’international, dira de lui quand il le rencontrera pour la première fois en 1978 « Il avait les cheveux tout ébouriffés, était très mal habillé et avait une cigarette hongroise bon marché au coin de la bouche » et d’ajouter « Mais j’ai su immédiatement que j’avais un génie devant moi. »

« J’ai aussi réalisé que malgré les multitudes de combinaisons possibles, il n’existait qu’une méthode pour résoudre le cube sans dépendre du hasard. »

Ernő enseigne l’architecture et la géométrie descriptive à l’Université Polytechnique et économique de Budapest et vit encore chez ses parents, dans une modeste demeure, lorsqu’il commence à travailler sur la conception de son premier prototype : un cube en bois, appelé le 2X2X2, lequel est composé de huit blocs (petits cubes) reliés les uns aux autres par des trombones et des élastiques, capables de bouger par rotation individuellement. Le problème de son cube réside-comme celui conçu en 1972 par l’Américain Larry D. Nichols-dans l’absence d’un noyau central stable qui permettrait de contrôler, ensemble, les mouvements des pièces indépendantes. Par conséquent, les blocs se déplacent les uns autour des autres, mais leurs trajectoires restent relativement limitées. Beaucoup trop limité pour Ernő.

Prototype en bois de Ernő Rubik, présentée lors de l’exposition Beyond Rubik’s Cube, 2014, Liberty Science Center, Jersey City, New Jersey, États-Unis.


Bon an mal an, en mai 1974, Ernő qui a hérité du sens de l’invention de son père et de la sensibilité artistique de sa mère — sa mère, Magdolna Szántó, était poétesse, tandis que son père, Ernő Rubik Sr., était ingénieur dans l’aéronautique (il est particulièrement reconnu pour ses recherches sur la conception de planeurs) — trouve enfin la solution et donne naissance au cube, que tout le monde connaît aujourd’hui, le 3X3X3. Ce dernier est composé de 26 blocs – bien qu’on puisse penser qu’il en ait 27 : le 27ᵉ étant ce fameux noyau central, lequel est doté d’un mécanisme interne qui permet de triturer à l’infini toutes les pièces de manière indépendante et sans que le cube ne s’effondre. Pour rendre les rotations plus visibles et compréhensibles, il choisit de déposer des autocollants de couleurs chatoyantes sur les faces de chaque bloc : « Les couleurs sont apparues pour pouvoir suivre plus facilement ces mouvements. C’était merveilleux de voir comment, après quelques mouvements, les couleurs se mélangeaient apparemment de manière aléatoire. » Cela fait, il réalise que, une fois mélangé, il est difficile de recréer l’objet initial : « C’est à ce moment-là que je me suis retrouvé confronté au grand défi : quel est le chemin retour ? » Ernő a mis plus d’un mois à rétablir l’uniformité des couleurs sur chacune des six faces, et d’ajouter « J’ai aussi réalisé que malgré les multitudes combinaisons possibles (aujourd’hui, nous savons qu’il en existe 43 quintillions) il n’existait qu’une méthode pour résoudre le cube sans dépendre du hasard. » L’actrice Hongro-Américaine, Zsa Zsa Gabor dira de Rubik en 1980 : « Seul un génie en mathématique peut créer quelque chose d’aussi complexe. »

Sur les cubes modernes, chaque pièce est moulée avec du plastique coloré (rouge, bleu, jaune, etc.), rendant les couleurs indécollables et durables. Ce changement est aussi une réponse aux tricheurs d’autrefois qui décollaient les autocollants pour « résoudre » le cube @Virginia Ennor

Zsa Zsa Gabor, est l’une des premières célébrités à avoir trituré et promu, dans les années quatre-vingt, le Rubik’s Cube aux États-Unis. Elle est également connue pour avoir interprété plus d’une centaine de rôles au cinéma dont celui de Jane Avril dans le film de John Huston « Moulin Rouge » en 1952. En 1991, elle donnera aussi la réplique à un futur adepte du Rubik’s Cube, Will Smith, dans l’épisode 10, de la seconde saison du Prince de Bel-Air.

Une addiction Hongroise

Bien que Ernő pressent que le potentiel de son casse-tête dépasse de loin le simple aspect pédagogique, il ne réalise pas encore qu’il détient, entre ses mains, un objet qui s’apprête à conquérir le monde. En 1975, Rubik se décide enfin à faire breveter sa création « Je n’apprécie pas le terme « inventé », parce que, vraiment, je n’ai fait que découvrir ce qui était déjà là, mais qui n’était pas visible ou concret pour les autres » souffle-t-il modestement. Il faudra attendre le 28 octobre 1976 pour que son cube – désormais fabriqué en plastique injecté – soit protégé et, 1977 pour qu’il soit manufacturé et commercialisé par la société hongroise Polithecnika, sous le nom de Buvos Kocka (Magic cube). Le succès est immédiat et, comme l’avait pressent Ernő, son cube attire aussi bien les universitaires que les joueurs lambdas. Il s’invite partout, dans les familles, les rues, les cours d’écoles, les cafés… La presse parle « d’addiction hongroise » et, dans le même temps, plus discrètement, de l’autre côté du « rideau de fer » le cube commence à rendre zinzin les mathématiciens.

« A ce moment-là, j’ai su qu’on tenait un Winner »

Nous sommes en août 1978, au Congrès International des Mathématiciens qui se tient à Helsinki, en Finlande. Parmi les 4 000 participants, trois mathématiciens britanniques de renom, David Singmaster, Roger Penrose, et John Horton Conway, se distinguent. Animés par une détermination sans faille, ils sont prêts à tout pour percer les mystères du Magic Cube d’Ernő Rubik et ainsi concevoir leur propre méthode. Dans un interview donné, en mars 2014, à G4G» Singmaster (auteur du livre « Notes on Rubik’s Cube », paru en 1980), raconte comment lors d’un dîner avec Penrose et Conway le cube s’est retrouvé, presque par magie, entre ses mains : « Ils avaient obtenu les cubes via des scientifiques hongrois. Penrose, armé de notes et de graphismes, était convaincu qu’une méthode était indispensable pour le résoudre. Conway, lui, l’a résolu en trois minutes. Moi, il m’a fallu deux semaines. »
Obnubilé par l’objet, mais incapable de s’en procurer davantage en Angleterre, Singmaster contacte même l’ambassade de Hongrie, en vain. Tout change lorsqu’un cousin du fabricant l’appelle : « Il m’a demandé si j’en voulais. Bien sûr que oui ! » Une centaine de cubes lui sont livrés, mais ils s’arrachent en un rien de temps. Il commande alors des centaines d’unités chaque semaine jusqu’en septembre, où on lui annonce que le cube est exclusivement réservé au marché hongrois. « C’était frustrant, mais à ce moment-là, j’ai su qu’on tenait un Winner », conclut-il.

« En le manipulant, j’ai immédiatement perçu le potentiel du Cube »

Nul doute, que Ernő est, à sa manière et dans sa matière, un génie. Néanmoins, il n’est pas très doué pour les affaires. De nature taciturne, il préfère rester à l’écart des projecteurs. Alors, tandis que son cube continue de se vendre en Hongrie et d’impatienter les scientifiques d’outre-manche, le jeune professeur modeste et débonnaire poursuit, sans fard, d’enseigner l’architecture et la géométrie tridimensionnelle pour un salaire modeste de 5 100 forints hongrois par mois (soit environ 150 euros aujourd’hui), tout en nourrissant, patiemment, l’espoir que son casse-tête finisse par être commercialisé bien au-delà de ses frontières.
Jusqu’à ce jour d’automne 1978 où, Tibor Laczi, entre en scène : « J’étais en déplacement à Budapest et je me suis arrêté dans un café, le serveur avait un cube dans ses mains, mais il ne savait pas trop comment l’utiliser. En le manipulant, j’ai immédiatement perçu le potentiel du cube. Le serveur me l’a vendu pour l’équivalent de 1 dollar et je suis reparti avec », confiait-il en 1986 au journaliste John Tierney. Le jour suivant, Laczi prend contact avec « Konsumex », une société hongroise spécialisée dans l’exportation de produits manufacturés et destinés à être distribués à l’international « Quand je leur ai demandé s’ils étaient intéressés de commercialiser le cube en Europe de l’Ouest. Ils m’ont ri au nez, et m’ont dit qu’ils avaient essayé, mais que plus personne ne s’y intéressait. Le cube, pour eux, c’était presque une affaire déjà terminée » se souvient Laczi. Pourtant, en moins d’un an, les ventes avaient connu une forte progression, atteignant déjà trois cent mille unités en Hongrie. Laczi, loin de se laisser décourager, s’arrange pour caler un rendez-vous avec Ernő Rubik, qu’il rencontre en novembre 1978 : « Lorsque Rubik est entré dans la pièce, j’ai eu envie de lui donner un peu d’argent, il avait l’air d’un mendiant. Puis, je lui ai dit que nous pourrions vendre son cube à des millions d’exemplaires. » Ernő accepte, in fine, que Laczi se charge de promouvoir sa création et ce dernier s’envole, en février 1979, pour la plus grande foire de jouet d’Europe, la Spielwarenmesse, qui se déroule chaque année depuis 1949 à Nuremberg en Allemagne.

« Nous tenons entre nos mains une merveille du monde. »

C’est à Nuremberg que Tibor Laczi rencontre Tom Kremer, un businessman, concepteur de jeu et très respecté dans le monde du jouet. Étant lui-même d’origine hongroise, ce dernier ne tarde pas à repérer Laczi dans les allées du salon, le Magic Cube à la main, en pleine négociation avec de potentiels acheteurs : « J’ai entendu quelqu’un parler avec un accent hongrois très prononcé, cela m’a interpellé alors, je suis resté pour écouter leur conversation , et heureusement pour moi Laczi essayait de vendre son cube à une personne complètement désintéressée et qui pensait que ce genre d’objet n’intéressait plus qu’une minorité de joueur », confiait Kremer en 1989 au Newcastle journal, et Tibor d’ajouter : « Kremer a pris le cube et m’a dit « Nous tenons entre nos mains une merveille du monde. » Kremer est perspicace puisqu’en à peine quelques mois, il parvient à convaincre l’entreprise Ideal Toy – réputée notamment pour avoir lancé le célèbre ourson « Teddy Bear » en 1903 – de passer une commande d’un million de Magic Cube. Mais le nom est déjà protégé par des droits d’auteur, dès lors, ils ne peuvent l’utiliser. Il est alors décidé que le cube serait rebaptisé du patronyme de son créateur, Rubik. Ainsi, Kremer va jouer un rôle majeur et décisif dans la commercialisation du cube d’Ernő, dorénavant connu sous le nom de Rubik’s Cube, à l’échelle internationale. « Je suis très heureux de cela, parce que j’ai gagné beaucoup d’argent », conclut-il avec humour.

« Reste l’avenir du Rubik’s cube. En a-t-il seulement ? »

Bien plus qu’un succès, c’est un véritable raz de marée qui dépasse toutes les attentes. Le Rubik’s Cube ne se contente pas de conquérir les esprits : il se transforme en un phénomène mondial qui traverse toutes les frontières et s’impose comme une icône de la pop-culture. Tout le monde en veut un, et beaucoup aspirent même à rencontrer son créateur. Ce succès retentissant oblige le professeur à traverser, pour la première fois, les frontières de l’ouest du bloc soviétique, marquant ainsi une étape cruciale tant dans sa vie que dans l’histoire du Rubik’s Cube.
Tibor Laczi se souvient avec amusement : « Nous étions à Vienne pour présenter le cube. Juste après la conférence de presse, il ne m’a même pas demandé de lui faire visiter la ville. » Et d’ajouter : « La plupart des Hongrois qui voyagent à l’Ouest veulent profiter de l’occasion pour faire du shopping, acheter des bijoux, ou visiter des bars. Pas Rubik. Il est retourné directement à son hôtel. Même après être devenu riche, il est resté fidèle à lui-même. La seule chose qu’il ait changée, c’est qu’il s’est mis à fumer des cigarettes de meilleure qualité. »

En France, le Rubik’s Cube rencontre aussi un grand succès. Mais il faut attendre le 3 août 1980 pour que les « Cubaholiques » – terme né pour désigner les addicts du cube – découvrent enfin le visage de l’homme derrière ce casse-tête révolutionnaire. Ernő fait sa première apparition sur la télévision française dans l’émission « A2 pas de chez nous : La Hongrie, c’est nous, » animée par Martine Charbon et tournée dans son pays natal. Visiblement, notre génie modeste et débonnaire avait, depuis ses dernières rencontres avec Tibor Laczi, fait de grands efforts pour soigner son apparence et sa tenue vestimentaire. Il est apparu à l’écran, parfaitement coiffé, svelte, discrètement hâlé en affichant une sobre élégance.
Quand l’animatrice lui demande : « En France, nous appelons votre invention « le cube qui rend fou », était-ce votre intention ? » Ernő lui répond, légèrement surpris : « Bien sûr que non. » Pour conclure, l’animatrice lui pose une dernière question : « Avez-vous l’intention de créer d’autres cubes encore plus diaboliques ? » Avec un sourire énigmatique, l’inventeur acquiesce, laissant présager que ce n’était que le début de son incroyable aventure.

Ernő Rubik@DPKom LM & Spin Master

Le ton est donné, le cube qui a été, jusqu’à lors, adulé par les scientifiques et mathématiciens, devient aux regards des novices et impatients un objet démoniaque qui rend les gens « neuneus ». D’un autre côté, tandis que la presse et les rumeurs s’emballent, les « Cubeologists » (un néologisme désignant les experts, comme les scientifiques et les professeurs, impliqués dans l’étude, la résolution et la compréhension du Rubik’s Cube et de ses variantes), se creusent les méninges et se défient pour trouver la meilleure méthode. La solution révolutionnaire.
Parmi ces « Sherlock Holmes » de la « Cubing méthode », figure Kathleen Ollerenshaw, mathématicienne britannique et ancienne présidente de l’Institute of Mathematics and its Applications. Atteinte d’otosclérose dès son enfance, Kathleen perd presque totalement l’ouïe à l’âge de huit ans – elle ne retrouvera son audition que 30 ans plus tard grâce à un appareil auditif. Face à cette épreuve, elle découvre dans les mathématiques et le Rubik’s Cube une manière de penser et de surmonter les défis. Kathleen définissait les mathématiques comme une approche intemporelle et simple, dénuée de gadgets ou de technologies complexes — à l’exception du cube, bien sûr. En effet, elle a été l’une des premières victimes recensées du « cubist’s thumb » (le pouce des cubistes), une tendinite causée par l’usage excessif du Rubik’s Cube. La journaliste Evelyn Lamb, dans un article publié en 2012, à l’occasion du centième anniversaire de la mathématicienne, raconte comment en 1980, Kathleen s’est abimé le tendon “ Elle a été l’une des premières à publier une méthode dans le Bulletin de l’IMA (aujourd’hui Mathematics Today) : Pour élaborer sa solution, elle a tellement sollicité son pouce gauche à force de manipuler le cube qu’elle a fini par se blesser, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale.”


Et tandis que les « Cubeologists » s’abiment les pouces à élaborer leurs méthodes, d’autres s’abiment les poignets en appliquant ces dernières dans l’objectif de résoudre le Rubik’s cube dans le plus court laps de temps possible : on les appelle les speedcubers. Ces passionnés passent parfois 2 à 3 heures par jour à manipuler leurs cubes, voire plus, ce qui les expose souvent au « Rubik’s wrist », une douleur au poignet causée par des mouvements répétitifs. Pour remédier à ce problème et optimiser leurs performances, les plus assidus lubrifient régulièrement leur cube, permettant aux pièces de glisser plus facilement, de réduire la résistance mécanique, et ainsi de limiter les efforts tout en améliorant leur vitesse.

Dans les années 1980, la communauté des speedcubers donne naissance à la MIT Cube Lovers, un groupe de passionnés qui, à travers un forum de discussion numérique (précurseur des e-mails, avec des archives remontant à juillet 1980), partagent leurs idées, collaborent sur des méthodes de résolution du Rubik’s Cube et jettent les bases des premières compétitions. Ces tournois, qui émergent progressivement, permettent aux participants de démontrer leurs compétences en résolution rapide. Bien que tous les compétiteurs maîtrisent déjà le cube, les compétitions se concentrent davantage sur la rapidité d’exécution que sur la recherche de nouvelles méthodologies. C’est ainsi qu’est né le phénomène du « Speedcubing », mettant l’accent sur la performance plus que sur l’innovation.

À 28 ans, Abdelhak Kaddour, développeur informatique, est devenu champion de France 2024 avec une performance éclatante sur le 5x5x5, l’un des cubes les plus complexes, qu’il a résolu en seulement 54 secondes. Passionné depuis ses 14 ans, il avait déjà fait sensation en 2010 avec un temps de 28.58 secondes au 3x3x3. Aujourd’hui, maître incontesté du cube, il le résout même à l’aveugle en moins de 30 secondes et affiche un palmarès impressionnant de 180 médailles d’or, 92 d’argent et 65 de bronze. @Virginia Ennor

Si la France est réputée pour avoir, souvent, un train de retard sur les innovations, de toute évidence cela ne s’applique pas au Rubik’s Cube. Le 28 octobre 1981, se tenait, en présence de son inventeur, le premier championnat de France de Speedcubing au Palais de la Découverte à Paris. Pour promouvoir l’événement, Ernő Rubik était invité, aux côtés d’André Warusfel, professeur, historien des mathématiques et auteur de « Réussir le Rubik’s Cube », sur le plateau du journal de 13h sur TF1, présenté par Yves Mourousi.

Caricature, Canard Enchaîné 23 septembre 1981dévoilé par Yves Mourousi lors de l’émission du 27 septembre 1981@Cyril Bosc, Centre des Arts Satiriques.

Fidèle à lui-même, Ernő a du mal à sortir de sa réserve cependant lorsque le journaliste lui demande s’il est heureux que son cube se vende par million, le professeur lui répond : « Oui d’un point d’un point de vue économique, c’est un bon résultat, mais en ce qui me concerne, le plus important est qu’il y ait autant de personne qui apprécie d’y jouer et surtout que les enfants arrivent, en résolvant le cube, à prouver qu’ils sont plus intelligents que nous », et d’ajouter « Je suis moins rapide qu’avant, mais je peux le résoudre en un peu moins d’une minute.” Ernő n’est pas quelqu’un de très compétitif, il s’attache plus à l’idée d’avoir un objectif et de l’atteindre cependant il croit que « ça fait partie de la nature humaine, d’avoir envie d’aller toujours plus vite, d’impressionner les autres » conclut-il. En France, cette quête de performance a trouvé son écho dans le résultat du champion national, Jérôme Jean-Charles. Ce jeune homme de 25 ans s’est imposé en tête avec un temps record de moins de 26 secondes.

Bien que l’événement soit un succès et que le Rubik’s Cube soit largement plébiscité par le public, certains journalistes restent sceptiques quant à la pérennité du cube sur le long terme : « Reste l’avenir du Rubik’s cube. En a-t-il seulement ? Pour certain ce n’est qu’un casse-tête dicté par la mode. Pour les autres, à commencer par les chercheurs, c’est un jeu déjà classique. Bref, la Rubikomanie pourrait bien se transformer en Rubikophilie », déclarait le journaliste, Gérald Dalmaz , le 29 octobre de la même année, sur la chaîne de télévision française Antenne 2.

« Le Casse-tête pour masochistes. »

Phénomène de mode, ou pas, toujours est-il qu’en ce début d’année 1982, le Rubik’s Cube a rendu, avec ses 30 millions d’exemplaires vendus dans le monde, dont 3,5 millions en France, son créateur millionnaire et l’homme le plus riche de Hongrie. Et c’est sans compter les millions de contrefaçons provenant principalement d’Asie, avec une forte concentration en Chine, Taïwan et Hong Kong qui ont envahi le marché : quand les journalistes interrogent le professeur sur son ressenti concernant les copies qui circulent celui-ci répond simplement :« Je suis convaincu que toutes les bonnes choses sont imitées. »
Cette période a marqué une montée en puissance de l’intérêt pour le Rubik’s Cube, amplifié par une forte médiatisation : livres de méthodes, bulletins d’information, et émissions télévisées. Le point culminant fut sans doute le premier championnat du monde de Rubik’s Cube, organisé le 5 juin 1982 à Budapest sous la supervision d’Ernő Rubik. Cet événement historique, qui rassemblait des compétiteurs venus de 19 pays, dont la France, a attiré près de 5 000 spectateurs et a été retransmis sur la chaîne Magyar Televízió 1. Minh Thai (États-Unis), a remporté la compétition avec un temps record de 22,95 secondes, devenant ainsi le premier champion du monde officiel : Minh Thai utilisait une méthode de résolution couche par couche (cette méthode consiste à résoudre le cube une couche à la fois, en commençant par celle du bas, puis en progressant vers le haut ) et a ensuite publié un livre intitulé « The Winning Solution », inspirant ainsi de nombreux adeptes du Rubik’s Cube. En seconde position, Guus Razoux Schultz (Pays-Bas) termine avec un temps de 24.32 secondes, en troisième position, Zoltán Lábas (Hongrie) avec un temps de 24.49 secondes puis, notre frenchy, Jérôme Jean-Charles est, quant à lui, arrivé en sixième position avec un temps de 25.06 secondes.

Ce championnat a aussi constitué un tournant décisif dans l’histoire du Speedcubing. Grâce à cet événement, le Rubik’s Cube a acquis une renommée mondiale durable et a continué de séduire de nouveaux adeptes, chez les jeunes générations, comme chez les moins jeunes qui lui reconnaissent certaines vertus : « Ce puzzle est frustrant, mais même si vous ne pouvez pas le résoudre, le cube est tellement agréable à manipuler qu’il peut remplacer les « chapelets anti-stress » », déclarait encore Zsa Zsa Gabor.
Plus qu’un jeu, le Rubik’s Cube symbolise également la cohésion sociale : bien qu’il se manipule individuellement, il invite au partage et à l’interaction, transformant ainsi un défi personnel en une expérience collective.

L’équipe des champions de speedcubing français réunis le 16 octobre 2024 au Théâtre 13E art, pour rendre hommage à leur mentor@ Virginia Ennor


Cependant, les boomers de l’époque perçoivent d’un mauvais œil l’engouement de leurs enfants, adolescents ou même de leurs conjoints pour l’objet aux mille vertus, qu’ils jugent source de divers maux :
Le quotidien le Monde, en 1982, le qualifie de « Casse-tête pour masochistes. »
En Chine, selon Pékin (UPI): « Le Rubik’s Cube provoque des changements de personnalité, de l’insomnie, de l’hypertension artérielle et même de la folie. »
Aux USA, dans un article du Courier-post Camden New Jersey daté du 4 janvier 1982 on nous explique comment : « Ramener un Cubaholique sur le droit chemin. » Ou encore dans le Longview News Journal, toujours en 1982, on l’accuse d’être responsable de divorce et l’on élabore même des stratégies pour le détruire. David Singmaster se souvient d’ailleurs : « Je connais au moins deux cas de divorce directement causés par le fait que des partenaires étaient trop occupés à jouer avec le Cube. Les femmes disaient des choses comme : « Il est toujours trop fatigué ces jours-ci, il passe des nuits entières, obsédé par son cube. »
Et pour couronner le tout, on l’accuse aussi d’être une arme redoutable : lors d’une conférence organisée en l’honneur du Rubik’s Cube et de son inventeur au Musée des Arts Appliqués (MAK) de Vienne, la conservatrice Rita Mária Halasi expliquait, comment la presse avait affabulé sur le cube à l’époque de sa sortie « Ils ont même osé qualifier le Rubik’s Cube d’arme de destruction massive créée par des communistes hongrois pour déstabiliser l’Ouest du bloc soviétique », a-t-elle raconté avec humour.


Il faudra attendre l’avènement des smartphones et des réseaux sociaux, comme TikTok, pour que ces réfractaires prennent conscience que ce casse-tête est finalement bien moins préoccupant, pour la santé mentale de leurs proches, que certaines de nos technologies modernes. Mais en attendant cette prise de conscience, le Rubik’s Cube va pour un temps être jeté aux oubliettes.
Le 30 octobre 1982, le New York Times signait carrément son arrêt de mort et titrait “RUBIK’S CUBE : FIN DE L’ENGOUEMENT” : “ Presque tout le monde, y compris Ideal Toy, attribue le déclin du cube aux aléas du public acheteur de jouets. Les magasins disent que les jeux vidéo électroniques et les dérivés des jeux d’arcade sont les articles les plus populaires maintenant, suivis de près par les poupées et autres marchandises dérivées du film « E.T. – L’extra-terrestre ». Rubik et ses nombreux puzzles, parmi lesquels Rubik’s Race et Rubik’s Revenge, ont perdu l’intérêt du public. »

« N’essayez pas de devenir un homme qui a du succès. Essayez de devenir un homme qui a de la valeur. » Albert Einstein

Déclin ou pas, Ernő Rubik n’en a cure : le succès n’a pas altéré ses valeurs. Lui qui est né et a grandi dans une Hongrie meurtrie par le nazisme, les déchirures de l’après-guerre et sous le joug soviétique, les paillettes du capitalisme le laisse de marbre. Bien qu’il ait eu les moyens de s’offrir un palace, il a choisi de mener une vie simple. Sans téléphone, d’ailleurs, confiait-il au Huddersfield Daily Examiner : « Il ne doit pas y avoir beaucoup de millionnaires dans le monde sans téléphone », et d’ajouter « Mais j’en fais partie, cela-dit les téléphones sont très difficiles à obtenir en Hongrie, » et de conclure, « Je n’ai pas breveté le cube au-delà des frontières de la Hongrie, mais grâce à un accord de fabrication et de promotion, je recevais une redevance sur chaque exemplaire vendu. J’aurais pu gagner davantage, mais ce que j’ai reçu suffisait largement à mes besoins. »
Pour lui, ces besoins se résument au bonheur de sa famille, à la tranquillité et à la création de nouveaux défis. « J’avais pris une année sabbatique pour voyager à travers le monde et présenter le Cube. Maintenant, je suis rentré chez moi, et je pense rester ici jusqu’à ce que j’invente autre chose », expliquait-il.


C’est ainsi qu’après le mythique Rubik’s Cube, sont nées d’autres créations. Parmi elles, le Rubik’s Magic, un puzzle composé de panneaux reliés par des fils, permettant de créer des formes variées par pliage et manipulation. Il a également conçu les versions 2x2x2, 4x4x4 et 5x5x5 du Cube. « C’est comme une grande famille : les enfants se ressemblent, mais chacun est unique », résume-t-il avec tendresse. Cependant, même si ces créations sont toutes aussi captivantes les unes que les autres, aucune n’a détrôné l’éternel Rubik’s Cube, 3x3x3. Ce casse-tête emblématique reste la pièce maîtresse de son héritage.


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@Spinmaster

Bien que beaucoup aient signé l’arrêt de mort du Rubik’s Cube dans le courant des années 80, son absence fut de courte durée, et cet arrêt n’a pas marqué la fin de sa légende. Bien au contraire, le cube a connu un retour en force dans les années 90, séduisant une nouvelle génération de passionnés. Il est apparu dans de nombreux films, des documentaires pointus aux productions hollywoodiennes, et a été exposé au MoMA de New York. Le casse-tête légendaire a aussi inspiré une foule d’artistes, tels que Will Smith, qui a résolu un Rubik’s Cube en 55 secondes sur le plateau du Petit Journal People de Yann Barthès en 2011. Ce moment iconique a captivé l’imaginaire collectif, mais peu savent que le « Cube Master» qui a enseigné Will Smith n’est autre que Tyson Mao, un Californien devenu une légende du Rubik’s Cube. Tyson, co-fondateur en 2003, de la WCA (World Cube Association), a aussi été champion du monde du Rubik’s Cube à l’aveugle (les yeux bandés) en 2006. C’est lui qui a popularisé une méthode simplifiée pour résoudre le cube, qui a ensuite été utilisée par Will Smith, en 2006, dans le film The Pursuit of Happyness.


Exposition aux Galeries Lafayette 16 octobre 2024@SpinMaster

Le Rubik’s Cube a également trouvé sa place dans la sphère artistique contemporaine grâce à des artistes comme Invader, l’un des pionniers du Street Art, qui a su métamorphoser le Rubik’s Cube en une forme d’art à part entière, l’intégrant dans ses mosaïques géométriques. Dès 2005, il a inventé le terme « Rubikcubisme » pour décrire cette fusion entre l’univers du puzzle et celui de l’art urbain. Ses œuvres, souvent composées de cubes manipulés ou réarrangés, offrent une nouvelle lecture de l’iconique casse-tête, qu’il transforme en symboles d’une culture visuelle à la fois rétro et avant-gardiste. En 2021, à Bruxelles, il a présenté sa première exposition solo entièrement consacrée au Rubikcubisme. Intitulée « Invader Rubikcubist », cette exposition rend hommage à la simplicité du Rubik’s Cube tout en l’élevant au rang d’art contemporain, où chaque face colorée devient un pixel dans une mosaïque géante de sens et de forme.

Pixel, petite chienne de 5 ans, était conviée à la soirée d’anniversaire du Rubik’s Cube, mais elle a préféré rester tranquille avec son cube plutôt que de se mélanger à la foule. Du coup, c’est son papa, Olivier, grand fan d’Invader, qui a pris le relais et a représenté fièrement la famille à la soirée ! @Olivier&pixel_isthenewblack

Cependant l’impact du cube ne se limite pas aux écrans de télévision et aux expositions. En dehors du monde du divertissement, il a aussi inspiré de nombreux athlètes, à l’instar de Léon Marchand, prodige de la natation. Lors d’une émission sur Canal+, Léon a révélé avec sourire qu’il possédait une vingtaine de Rubik’s Cube sur son étagère. « Mon papa, l’ancien nageur Xavier Marchand, m’en a acheté un quand j’étais gamin », raconte-t-il. Ces cubes sont devenus une sorte de tradition familiale, un jeu de patience et de logique qui, pour Léon, allait bien au-delà du simple passe-temps. « Je me souviens que lorsque je n’arrivais pas à dormir, je venais le réveiller et on allait jouer aux échecs. On parlait de Rubik’s Cube, il m’a appris 2-3 trucs. Il ne savait pas le faire, mais il voulait que j’apprenne. »


Le Rubik’s Cube a également eu un impact bien au-delà des records de vitesse, et des compétitions, notamment dans le domaine de l’autisme, où il est utilisé comme outil thérapeutique. Grâce à ses propriétés de stimulation cognitive, il aide à améliorer la concentration et les compétences de résolution de problèmes. Cette dimension éducative est particulièrement bénéfique pour les personnes autistes, comme le montre l’exemple de Max Park. Diagnostiqué autiste dès son plus jeune âge, Max a utilisé le cube comme un moyen d’améliorer ses compétences motrices et sociales. En 2023, à 20 ans, il a remporté le championnat du monde à Long Beach, en Californie, avec un temps record de 3,13 secondes. Cet exploit vient s’ajouter à son impressionnant palmarès, qui comprend plus de 60 records mondiaux. Le cube est ainsi devenu bien plus qu’un simple jeu : un véritable instrument de dépassement personnel et d’éducation, utilisé dans des contextes variés comme l’école, les maisons de retraite, et des programmes spécifiques pour l’autisme.

Jean-Louis Mathieu, accompagné de son épouse Viviane. Jean-Louis est une figure majeure du Rubik’s Cube en France. Passionné depuis les années 1980, il débute les compétitions en 2006 et établit un record personnel de 21,83 secondes sur le 3x3x3 en 2011. Bien qu’il ait arrêté les compétitions en 2017, son amour pour le cube ne s’est jamais éteint : aujourd’hui, il en possède une collection impressionnante de plus de 1 500 exemplaires. Mais Jean-Louis ne se contente pas de collectionner. Professeur de mathématiques, il met à profit sa passion en intervenant dans les écoles, où il enseigne la géométrie et les mathématiques à travers le Rubik’s Cube, perpétuant ainsi l’héritage éducatif d’Ernő Rubik. En 2017, il organise le World Rubik’s Cube Championship à Saint-Denis, un événement marquant pour la communauté française. Artiste, il réalise également des mosaïques cubiques, dont ce tableau, réalisé pour les 50 ans du cube, lequel est composé de 430 cubes. @Virginia Ennor

Force est de constater que le Rubik’s Cube a su rester une icône intemporelle. Ainsi, 50 ans après sa création, il continue d’être une source d’inspiration, de défi et de joie pour des millions de personnes à travers le monde. Il incarne à la fois un défi intellectuel, un symbole de logique, de patience et de persévérance, tout en continuant de se réinventer, d’inspirer et de marquer les esprits depuis des décennies.
Quant à son créateur, Ernő Rubik, bien qu’il arbore aujourd’hui des cheveux grisonnants, il n’a pas non plus changé d’un iota. S’il mène désormais une « retraite » confortable, partagée entre la Hongrie et l’Espagne, il est toujours aussi modeste et serein qu’à ses débuts. En 1999, il déclarait avec une sagesse tranquille : « Je n’ai pas envie de faire encore mieux que le cube, car je n’aurais pas la force de revivre ce que j’ai vécu à l’âge de 30 ans. » À cette époque, il ne pouvait imaginer qu’il serait, une trentaine d’année plus tard, toujours entouré d’admirateurs et de serrer des mains pour célébrer son invention, toujours aussi populaire, et les cinquante ans de son « enfant », le Rubik’s Cube.
Pour marquer cet anniversaire et célébrer les 80 printemps de son créateur, le Rubik’s Cube a fait son entrée en grande pompe. Spin Master, propriétaire de la marque depuis 2020, a organisé une farandole d’événements en plein cœur Paris. Aux Galeries Lafayette, une installation immersive cubique de trois mètres de haut a attiré des foules de passionnés. Des moments marquants, tels qu’une chasse au trésor avec des cubes dédicacés par Rubik, une conférence avec l’inventeur, et une performance de danse inspirée du cube par Sadeck Berrabah, ont rythmé cette célébration placée sous le signe de la créativité et de l’innovation.

Sadeck Berrabah Théâtre 13E art 30, Place d’Italie, 75013 Paris @Virginia Ennor

Le professeur hongrois s’est réjoui de voir son Rubik’s Cube continuer d’émerveiller et d’éduquer. Ému par la chorégraphie de Sadeck Berrabah, il a pris le temps de dédicacer les cubes de ses admirateurs, témoignant d’une sincère gratitude envers ceux qui célèbrent son œuvre. « J’ai reçu tant de remerciements », confiait-il avec un sourire, évoquant même des mariages inspirés par le cube. C’est avec cette humilité tranquille que Rubik semble, encore aujourd’hui, savourer la portée de son invention.

À seulement 25 ans, Delphine Tran, jeune informaticienne et première femme à résoudre un 3x3x3 à l’aveugle en 54 secondes, affiche déjà un palmarès impressionnant : 3 médailles d’or, 5 d’argent et 10 de bronze. Lors des Rubik’s WCA European Championship 2024, elle a établi un record personnel époustouflant de 8.65 secondes sur le 3x3x3. Passionnée depuis ses 16 ans, elle a également réalisé en direct, au Théâtre 13E art, un portrait spectaculaire d’Ernő Rubik à l’aide de 450 Rubik’s Cube mélangés, rendant hommage à son mentor et confirmant son talent. @Virginia Ennor

Nul doute que le Rubik’s Cube a toujours de beaux jours devant lui. En dépit de l’ascension fulgurante des jeux numériques, ce petit puzzle en plastique est plus populaire que jamais. Il allie nostalgie, défi intellectuel et expérience tactile, ce qui lui permet de résister à l’ère numérique tout en continuant à évoluer.
Alors, si parmi vos proches, vous croisez des « smartaholics », « ticktoaholics» ou « réseauaholics» (autrement dit, des accros des smartphones, de TikTok ou autres réseaux sociaux), le Rubik’s Cube pourrait bien se révéler être leur meilleur allié pour décrocher. Non seulement il éveille l’esprit, mais il est également économique( on en trouve à partir de 10 euros), écologique (pas d’électricité requise pour les non connectés !) et surtout, il est un excellent moyen de stimuler les neurones. Comme le disait si justement Ernő Rubik : « Je pense que les questions et interrogations sont bien plus importantes que les réponses. » Un petit cube, donc, mais une grande occasion de cultiver la réflexion tout en s’amusant.

Virginia Ennor